Depuis le 9 septembre, les réfugiés burundais du camp de Nyarugusu sont privés de marchés. Une situation intenable exacerbée par l’accord signé entre le Tanzanie et le Burundi de lancer une vaste campagne de retour en masse des réfugiés à partir du 1er octobre prochain.
Les marchés du camp de Nyarugusu sont dorénavant fermés depuis le 9 septembre. Des réfugiés qui se ravitaillaient dans les trois marchés que comptait le camp se disent exaspérés. Pour des commerçants de fruits et légumes, le manque à gagner est énorme. Ils ont dû liquider la marchandise en les vendant à perte. « La situation est intenable. J’ai dû vendre ma marchandise à la sauvette par crainte qu’elle ne soit avariée. Pour ce qui est de la farine de manioc par contre, j’ai décidé de la garder chez moi, » témoigne un petit commerçant.
Le communiqué annonçant la fermeture des marchés a été laconique. Silence radio sur les raisons de la privation de commerce qui permettait pourtant d’améliorer les conditions de vie des réfugiés.
Un silence qui donne lieu à des hypothèses et à des spéculations des réfugiés de ce camp. « Pas de doute, le gouvernement tanzanien nous fait comprendre qu’il ne veut plus de nous sur son territoire, » se murmurent des voix inquiètes à Nyarugusu.
Cette décision succède à celle prise quelques jours avant. Le gouvernement a stoppé tout rapatriement volontaire prévu ce mois de septembre dans le cadre de la tripartite Tanzanie, Burundi, HCR. Les réfugiés censés revenir au pays devront attendre le retour massif début octobre.
Il semble donc que le pouvoir de Magufuli campe sur sa position de renvoyer les Burundais chez eux. Une décision prise à l’issue de la visite du ministre de l’Intérieur burundais du 23 au 24 août. Il a été reçu par son homologue tanzanien et ensemble, ils ont visité les camps de Nduta et de Mtendeli. Les ministres burundais et tanzanien de l’Intérieur ont signé un nouvel accord de rapatriement des réfugiés burundais. Cet accord indique que les Burundais doivent regagner leur pays, car la paix est totale.
L’accord prévoit un retour de 2000 réfugiés par semaine d’ici le 1er octobre, pour un total d’environ 180 mille réfugiés.
« Ils doivent rentrer chez eux, coûte que coûte. Le Burundi a recouvré la paix et la sécurité. Nous ne voyons pas pourquoi ils ne veulent pas retourner dans leur pays natal, » a déclaré le ministre de l’Intérieur Tanzanien Kangi Logola à l’issue de la rencontre.
Assez remonté notamment contre le Haut-commissariat et les organisations internationales qui découragent le retour des Burundais, il a prévenu : « Ce rapatriement ne doit en aucun cas être interrompu par qui que ce soit : Burundais, Tanzaniens ou HC. Nous savons qu’il y a des gens ou des organisations internationales qui disent aux réfugiés que le Burundi n’est pas en paix, ce qui est faux. Celui qui sera attrapé en train de dire aux réfugiés que le Burundi n’a pas de paix, aura à affronter le feu du président tanzanien John Pombe Magufuli, ».
Depuis l’annonce de cet accord, les protestations fusent de partout. Des défenseurs des droits de l’homme, des politiques, la société civile burundaise, tous s’insurgent contre la mesure. Les mots expulsion, refoulement, rapatriement forcé sont vite évoqués. Tous dénoncent une violation de la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés.
Gitega, lui exulte. Il se dit prêt à accueillir tous les réfugiés burundais. Le ministre de l’Intérieur burundais Pascal Barandagiye dément les accusations de rapatriement forcé. Il indique que le retour sera volontaire. « Quoique je me demande ce qu’ils sont en train de faire en exil alors que la sécurité est garantie ici au pays. » Il demande au HCR-Tanzanie et au HCR-Burundi de se tenir fin prêts à aider au retour des réfugiés burundais. Il prévient : si le HCR refuse de coopérer, les deux pays vont s’en charger tous seuls. « Nous n’allons plus subir les réticences d’une organisation qui a fait des réfugiés burundais un business, un fonds de commerce. »