Le Burundi est membre des pays qui ont adopté la Déclaration et le Programme d’action de Beijing. Ces pays membres de l’ONU se sont engagés à la même occasion à mettre en œuvre un programme qui vise à promouvoir les droits des femmes et leur autonomisation. Malheureusement, des violences basées sur le genre, VBG, sont toujours commises au Burundi à l’endroit des femmes et des jeunes filles. Cela est favorisé par la culture et les mentalités patriarcales. Des hommes sont aujourd’hui aussi victimes de ces violences.
En commune Gihanga de la province de Bubanza, le lundi 25 novembre 2024, il y a eu lancement officiel des 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre (VBG) à l’endroit des femmes et des filles.
Selon les déclarations de la ministre en charge du genre, les violences basées sur le genre ne sont pas encore éradiquées au Burundi. Selon elle, comme le montrent les effectifs de ceux qui se sont adressés aux centres d’aide aux victimes des violences, le nombre de violences augmentent chaque année.
Par ailleurs, Ildephonse Majambere, le porte-parole du ministère en charge du genre précise que la situation des VBG au Burundi est encore une triste réalité. « Si on prend référence des rapports émanant des tribunaux sur des cas traités de violences basées sur le genre, on ne peut pas nier que le phénomène persiste. Même si des efforts ont été consentis dans la répression des cas des auteurs de violence », souligne-t-il.
Des facteurs et des raisons multiples
Les facteurs qui expliquent la persistance des VBG sont multiples. Une culture favorable à la masculinité et des croyances obscures sont notamment citées. Elles contribuent ainsi à une difficile éradication du phénomène selon Ildephonse Majambere, « Une culture qui n’est pas favorable à l’émancipation de la femme est un défi qui est là. Certains préjugés liés à la sexualité et aux croyances obscures des gens qui se livrent à la sorcellerie et à des pratiques occultes favorables aux pratiques des violences basées sur le genre existent toujours », confie-t-il.
Inès Kidasharira, activiste des droits féminins trouve aussi que les VBG persistent pour plusieurs raisons. « D’abord, elles prennent racine dans les normes et certaines croyances culturelles et religieuses. D’où leur ténacité. Ensuite, je trouve que les efforts fournis jusqu’ici ne sont pas à la hauteur du défi que constituent les VBG ».
Elle insiste aussi sur le fait que le ministère ayant le genre dans ses attributions figure encore parmi les ministères les moins financés. « Comment alors mener à bien des actions de transformation profonde d’une communauté sans budget ? », s’interroge-t-elle Elle remarque que ceci s’étend à l’ensemble du budget national qui, à son avis, devrait être sensible à cet aspect-là pour éradiquer les violences dans leurs multiples facettes (physiques, économiques pour ne citer que celle-là). Enfin, elle parle d’un manque d’une vision claire, consciente, constante et unifiée.
Elle estime que l’éradication des VBG est un combat sur la durée qui requiert une constance dans les actions. En effet, il vise un changement profond de comportement, de pratiques et de pensée de manière générale par rapport aux rapports sociaux femmes/hommes.
Les hommes ne sont pas épargnés
Des associations pour la lutte en faveur des droits de l’Homme comme l’association de lutte contre le chômage et la torture (Aluchoto) ainsi que l’Association des hommes en détresse tirent la sonnette d’alarme. Elles font remarquer que les VBG ne sont pas seulement commises à l’endroit des femmes et des filles. Les hommes sont aussi concernés.
« Dans nos rapports au niveau national, on a relevé que les VBG ne sont pas seulement commises envers les femmes et les filles mais aussi envers les hommes. Pour les femmes et les filles, c’est de l’ordre de 60% et pour les hommes c’est de l’ordre de 40 %. Dans nos rapports, quatre hommes ont été tués par leurs conjointes.» Cela a été déclaré lors d’un point de presse animé par Vianney Ndayisaba, coordinateur de l’Aluchoto le jeudi 28 novembre 2024.
Il estime qu’il faut dénoncer toutes les formes de violence de tous les côtés et que cela soit mis dans les programmes de lutte contre les VBG du ministère en charge du genre et de l’organisation des Nations unies. Son constat est que ces derniers accordent la priorité aux violences commises envers les femmes et les filles.
Même son de cloche chez Boniface Nduwimana, coordinateur de l’Association des hommes en détresse. Il trouve lui aussi que les hommes rencontrent les mêmes situations de VBG que les femmes.
Et d’indiquer que cette année 2024 par exemple, il a enregistré 51 cas des hommes qui ont sollicité une intervention en commune Kayanza où ils ont leur siège.
« Certains hommes n’ont pas le droit à la richesse familiale comme les recettes des récoltes et les salaires de leurs épouses. Il y a des hommes qui n’osent pas rentrer chez eux par peur d’être frappés par leurs femmes et leurs enfants. Des hommes sont aussi traumatisés psychologiquement par les insultes de la part de leurs conjointes. Enfin, une femme peut considérer le devoir conjugal comme un commerce sexuel et exiger à son mari un pagne, de la bière avant de passer à l’acte. », rapporte-t-il
Boniface Nduwimana déplore aussi des cas des mutilations génitales pratiquées par certaines femmes sur leurs maris. Seulement, les hommes n’osent pas se plaindre, souligne-t-il. Cela est dû aux coutumes qui leur interdisent de verser des larmes devant le public.
L’arrangement à l’amiable constitue un frein
L’arrangement à l’amiable freine la répression des VBG. Cela ne profite pas à la victime qui se sent toujours lésée dans ses droits. Selon le porte-parole du ministère en charge du genre, lorsque des infractions sont commises et qu’elles ne sont pas portées à la connaissance des autorités et du public, la victime en souffre au profit de l’auteur.
Donc l’arrangement ne contribue pas à éradiquer le phénomène parce qu’on ne peut pas comprendre l’ampleur du méfait commis tant qu’il n’est pas dénoncé régulièrement, fait-il savoir.
Selon Inès Kidasharira, il y a encore cette tendance funeste à vouloir régler à l’amiable un viol parce que l’on ne mesure pas la portée grave d’un tel crime sur la victime. « Beaucoup s’empressent encore à marier la victime au violeur pour éviter qu’elle n’accouche à la maison et n’entache l’honneur de la famille. D’autres estiment que, de toutes les façons, la fille n’est jamais une enfant (umukobwa ntaba umwana) ou qu’elle grandira là où elle va (azokurira iyo agiye). C’est dommage, parce que cela renforce le mal qu’a subi la victime en l’obligeant à cohabiter avec son violeur au quotidien », déplore-t-elle.
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