Lundi 23 décembre 2024

Politique

Que faudra-t-il donc retenir de cet atelier sur la CNTB ?

04/07/2013 3

Sur la forme tout d’abord, les 43 recommandations issues de ces heures d’échanges ne sont, au vu des critiques émanant de l’Uprona, pas le fruit d’un consensus. Il n’y aurait donc pas eu d’accord sur les points de convergence et les pierres d’achoppement…

Qui plus est, ces quarante-huit heures de concertation semblent également dérisoires face aux quarante années de remous historiques que la CNTB se doit de couvrir dans son action. Les derniers événements de Ngagara dans l’affaire Nyakabeto tentent à démontrer que démêler les fils historiques dont les citoyens burundais ont été les victimes plutôt que les acteurs n’est pas une sinécure et que pour une réforme significative de la CNTB, plusieurs semaines de négociations ne seraient sans doute pas inutiles.

Sur le fond, ensuite, et ne soyons pas mesquins, il y a des rappels très positifs pour peu qu’ils soient appliqués. Le point 2 incite ainsi à ne pas ethniciser la question foncière, plus loin, le point 11 tire dans le même sens en invitant à ne pas utiliser la CNTB comme un outil de propagande politique.

Afin de remettre l’église au milieu du village, il est également question de « réétudier les missions de la CNTB et sa composition ». Comment ? Avec qui ? Pas un mot, il est vrai. Mais il est sans doute nécessaire de saisir cette opportunité et de l’analyser comme une main tendue vers un dialogue pour qu’enfin la CNTB fasse l’unanimité.

Reste, enfin, les points d’interrogation. Ceux-là même qui peuvent continuer d’alimenter les discussions les plus folles quant à l’action de cette Commission. Le débat sur la notion d’ « acquéreurs de bonne foi » a fait rage deux jours durant. Néanmoins, le point 25 – pour être précis – de ces recommandations stipule qu’il faut « inventorier tous les acquéreurs de bonne foi avant toute éventuelle procédure d’indemnisation. » Le travail est titanesque! Comment prouver la bonne foi?

S’il est légitime de pointer un doigt accusateur vers une administration ou des autorités ayant mené des politiques ethnicisantes et ayant pratiqué le rejet de l’autre, il ne l’est pas, par contre, de dénoncer des civils ayant bénéficié de ces politiques. Ont-ils supporté ces politiques ? Se sont-ils tus pour ne pas être condamnés à l’exil ? Les méandres de l’histoire ont apporté leur lot de déménagements, de changements de propriétaire qu’il est difficile de retracer. Un acheteur de l’an 2000 connaît-il nécessairement l’historique de son nouveau bien ? Poser la question, c’est partiellement y répondre. Et les papiers officiels d’alors n’y pourront rien, ou du moins pas grand chose.

Par ailleurs, l’antépénultième recommandation fera quant à elle grincer des dents. « Un bon geste de reconnaissance s’avère nécessaire à l’égard du président de la CNTB et son équipe pour le travail aussi louable qu’ils entreprennent du jour au jour ». Un geste d’autocongratulation pas nécessairement bienvenu dans ces heures de polémiques. S’il est certain que le travail qui échoit à la CNTB est dantesque, il n’est pas besoin de solliciter les Burundais à applaudir à deux mains.

Depuis la mise en place de la CNTB, les dossiers sensibles se sont accumulés sur son bureau. Qu’on le veuille ou non, à l’occasion d’une restitution de biens fonciers, il y a fatalement une victime, un déçu. Et c’est là qu’intervient le principal point faible de cet atelier, l’absence de fonds d’indemnisation. Le budget n’est pas là, tout simplement. Et le gouvernement comme la CNTB doivent donc agir avec les moyens qui sont à leur disposition. Le message des autorités doit donc être clair, communiqué plus rapidement et calmement, par une sensibilisation au quatre coins du pays. Et ce, dès maintenant.

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. MNF

    Au Burundi, le terme concensus est beaucoup evoqué dans des Dossiers tant politiques que techniques. Malheureusement le « concensus«  ne signifie pas toujours « satisfaction « , je cite, en passant, l`exemple de la Commission Electorale Nationale Indépendante de 2010, je laisse le soin à tout le monde de méditer l`impact sinon la polémique suscitée par la Fameuse Commission dite de concensus de la part des Formations politiques en présence à l`époque.
    Je conseille au Burundais de se faire confiance et acceptée d`être représentés comme d`autres peuples civilisés : notre histoire très dure devrait nous servir de leçon. Il n ya pas moyen de s`entendre sur tous les points avant de faire quoi que ce soit, car cette façon de faire n`a réussi nulle part au monde; mine de rien, notre dicton en langue nationale nous le rappelle: «  Abahigi benshi bayobeza intozo« .

    MNF

  2. muzotangara

  3. E.N.

    Très bien rédigé et articulé. J’aime.

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