Vendredi 22 novembre 2024

Économie

Quand le retard dans la distribution des engrais chimiques inquiète

07/03/2018 11

Il s’observe des lenteurs dans la distribution des engrais chimiques pour la saison culturale en cours à travers tout le pays.

Des agriculteurs en attente des engrais chimiques au chef-lieu de Gitega rural.

Les agriculteurs s’en alarment. Un kilo d’engrais chimiques de type DAP s’achète entre 2.500 Fbu et 2.700 Fbu dans certains endroits du pays. Toutefois, le prix officiel de ce fertilisant est de 1.120 Fbu. Cette différence s’observe également pour d’autres types d’engrais chimiques utilisés au Burundi. Notamment l’Urée, KCL, NPK et Dolomie. Selon certains agriculteurs, ce différentiel de prix est dû au retard du ministère de l’Agriculture dans la distribution des engrais chimiques alors que la saison culturale touche à sa fin.

Damien Nzinahora, agriculteur de la colline Bihororo en commune Giheta, ne mâche pas ses mots : « Aucun agriculteur n’est au courant des motifs du retard.» Là où le bât blesse, se lamente-t-il, c’est que les commerçants profitent de ce retard pour augmenter les prix des engrais chimiques. « Ils vendent un kilo de NPK à 2 300 Fbu alors que le prix fixé par le ministère de l’Agriculture est de 1 080 Fbu.»
Et de préciser qu’un kilo de NPK s’achetait 1 500 Fbu à la même période de l’année dernière.

Cet agriculteur indique qu’il a commandé 500 kilos de DAP en novembre dernier. Jusqu’aujourd’hui, il n’a pas reçu la moindre quantité de fertilisants. Le coût total de sa commande s’élève à 560 000 Fbu, soit 28 000 Fbu par sac de 25 kilo.

Il affirme qu’il a payé 100. 000 Fbu d’avance en novembre dernier et le reste en janvier de cette année. Ce qui est étonnant, insiste-t-il, c’est que les responsables en charge de la distribution des engrais chimiques n’informent pas les agriculteurs sur les raisons de ce retard. « Ils nous donnent des rendez-vous qu’ils ne respectent pas.»

Désespéré, il confie avoir opté pour l’utilisation du fumier organique afin d’éviter de semer en retard. Comme le sol est habitué aux engrais chimiques, il s’attend à une baisse considérable de la production.

Charles Ndayiragije, un autre agriculteur de la colline Rutegama, en commune Giheta, déplore le comportement discriminatoire de certains responsables chargés de la distribution des fertilisants. « Ils donnent des quantités importantes aux commerçants au dépens des agriculteurs. » Pire encore, ces commerçants préfèrent aller vendre à des prix très élevés dans d’autres communes, notamment Rutegama et Ndava.

N. T., agriculteur de la colline Rwasazi, en commune Muramvya, soutient que la distribution des fertilisants a commencé au début de cette semaine. Mais la quantité distribuée reste insuffisante. Il témoigne avoir reçu la moitié de sa commande. « Tous les agriculteurs n’ont pas été servis. Même ceux qui ont eu cette chance, ils ne reçoivent pas la totalité de leurs commandes ».

Les commerçants voient rouge

Suite à la décision du ministère de l’Agriculture et de l’Elevage interdisant le commerce des fertilisants sur le territoire national, les commerçants des engrais chimiques ne décolèrent pas. « Cette mesure est injuste ! », fulmine J.K., un commerçant au marché de Giheta. Depuis cette année, l’administration communale organise des fouilles des engrais chimiques dans toutes les boutiques. « Une fois saisie, ils sont distribués gratuitement aux agriculteurs. » Ce qui est étonnant, fait-il remarquer, c’est que le commerce des fertilisants se faisait normalement dans le passé.

Il indique qu’il a commandé 1 250 Kilos de NPK en novembre dernier pour un montant de 1 350 000 Fbu. Son manque à gagner s’élève à 875.000Fbu. Sous peine d’être sanctionné par l’administration, il a dû fermer sa boutique.

« Le commerce des fertilisants était mon seul gagne-pain », s’indigne P.N., commerçant de Giheta. L’administration communale a saisi dans sa boutique 250 kilos de DAP d’une valeur de 2.800 000 Fbu. Dès lors, il ne sait pas à quel saint se vouer.

Alexis Manirakiza, administrateur de la commune Giheta, a fait savoir, mercredi 28 février, que la distribution des engrais chimiques a commencé la veille. Mais, il a reconnu que la quantité de fertilisants reste insuffisante par rapport aux besoins des agriculteurs. Seule une partie de ces derniers a été servie. Mais ils n’ont pas reçu la totalité de la quantité commandée.

M. Manirakiza a indiqué, par ailleurs, que l’administration communale a interdit le commerce des engrais chimiques pour empêcher la spéculation de certains commerçants. « Ces derniers profitent de ce retard pour augmenter les prix des fertilisants ».

Il assure que plusieurs sacs de fertilisants ont été saisis et distribués gratuitement aux agriculteurs. Et il a mis en garde les commerçants qui continuent le commerce des fertilisants. « Des sanctions sévères seront appliquées aux récalcitrants.»

Problèmes d’approvisionnement à l’ origine

Prosper Dodiko : « La distribution des engrais chimiques a commencé la semaine dernière et devra se poursuivre jusqu’au 31 mars prochain. »

Prosper Dodiko, directeur de la fertilisation des sols au ministère de l’Agriculture et de l’Elevage, explique le retard de la distribution des engrais chimiques par des problèmes d’approvisionnement. « Le gouvernement tanzanien a interdit à toutes les entreprises établies sur son territoire l’exportation des fertilisants, ce qui a tari les sources d’approvisionnent de nos fournisseurs.» Les négociations entre les gouvernements burundais et tanzanien ont duré deux mois. Les fournisseurs des engrais chimiques ont reçu l’autorisation d’exporter au moment où les agriculteurs avaient commencé à semer.

M. Dodiko signale que la distribution a commencé la semaine dernière et devra se poursuivre jusqu’au 31 mars prochain. « 18 mille tonnes sur un total de 22, 2 tonnes d’engrais chimiques attendus pour cette saison culturale sont déjà arrivés au Burundi. L’heure est à la distribution.»

Le directeur de la fertilisation des sols au ministère de l’Agriculture et de l’Elevage soutient que la suspension de certaines ONG participant dans la distribution des engrais chimiques, dont Tubura, n’a aucune incidence sur l’insuffisance des fertilisants. « C’est le ministère de l’Agriculture qui importe la totalité des engrais chimiques y compris ceux distribués par ces organisations.» La quantité maximale d’engrais par agriculteur est de 150 kilos.

Il souligne que le commerce des engrais chimiques est illégal au Burundi. « Aucun commerçant n’est autorisé à importer et à vendre les engrais chimiques sans l’autorisation du ministère de l’Agriculture. » Et de préciser que plus de 10 000 kilos ont été saisis à travers tout le pays et distribués aux agriculteurs.


Evolution des importations des engrais chimiques au Burundi, 2014-2018

Les prix des engrais chimiques utilisés au Burundi

Source : Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage

Forum des lecteurs d'Iwacu

11 réactions
  1. Rurihose

    Gacece, lorsqu’on montre l’étoile avec le doigt à un i…le, il voit seulement le doigt. I pointed out my degree in agriculture to highlight the disastrous management of mineral intrants in Burundi economy.
    You find it normal anyway. Me not.
    Ps More that 70% of burundians are facing hunger, according to PAM statistics.
    Warm greetings

    • Rurihose

      Sorry, The comment is addressed to Bakari not Gacece

    • Gacece

      @Rurihose
      Tu cherches vraiment à me faire réagir dans ce cas-ci! Me voici!

      À tous ceux qui invoquent cette injurieuse allusion, je réponds toujours ceci :

      Le problème n’est pas la direction du regard, c’est plutôt l’épaisseur du doigt de celui qui pointe et à quelle distance de son visage le doigt se trouve.

      Il se pourrait alors que sa vue soit voilée… par celui qui est censé montrer l’étoile.

      Si 70% de la population sont menacés par la faim (et non par la famine), ils trouveront les moyens de se trouver à manger. Sinon ils périront!

      Et pour cela, je vous proposent un pari :

      on se retrouve en mars 2019. Si au Burundi il ne reste plus que 30% de la population, tu auras gagné, j’accepterai volontiers ton qualificatif. Par contre, même s’il se peut qu’on n’ait plus de possibilité de nous en parler toi et moi, écris-le dans ton agenda.

      Le 12 mars 2019, tu seras un imb…le!… Pour une journée seulement!

      D’accord celui qui regarde les étoiles en plein jour? Essayez de moins vous prendre pour des malins de temps en temps!

      De la par d’un i..le qui s’assume.

      • Gacece

        Trop tard! La réponse était déjà partie. Mais elle reste valable.

  2. Rurihose

    J’écris après mes heures de service.
    Nagira wari kuvuga ko ivyo nanditse sivyo?

  3. Rurihose

    Je m’excuse de monopoliser le débat
    1) Est ce que l
    a Tanzanie a des industries qui produisent les intrants minéraux?
    Pourquoi le directeur de la fertilisation invoque comme argument la Tanzanie. Niho honyene bagura engrais? WHY?
    2) L ir Mutabazi, qui sûrement lit nos commentaires, ppurquoi n’en dit il rien?
    Son commentaire serait apprécié.

  4. Rurihose

    Avec un peu d humour caustique, j avais demandé (dans un de mes commentaures acerbes sur la corruption et la gabegie au Burundi) à Gacece et Ayubu de nous expliquer le retard dans la distribution des engrais dans les communes Bukeye rt Mbuye.
    C est Gahama qui a répondu.
    Merçi.
    C est tout de même hallucinant que les autorités techniques ne pipent mot.
    3 semaines c est énorme.
    Comme les autorités agricoles le savaient; ils auraient dû expliquer aux agriculeurs de semrr et appliquer alors les engrais au sarclage.
    C est + intelligent

  5. Rurihose

    Pouvez vous nous expliquer très clairement à des gens intelligents
    1) pourquoi on a interdit le commerce des engrais aux privés
    2) En quoi cela amène une meilleure disponibilité des engrais
    3)Aux lecteurs qui ne le savent pas , nous payons 45% de la valeur de l’engrais 3 mois d’avance.
    4) Un retard de 3 semaines dans le cycle végétatif du haricot est un désastre.
    PS: Je suis un agriculteur mais je suis aussi Ir Agronome

    • Bakari

      @Rurihose
      Vous êtes agronome agriculteur et vous passez 3/4 de votre temps à nous rédiger vos commentaires sur le web; quid du rendement des plantations sur web? Vous l’homme le plus futé du Burundi?

      • Gacece Edouard

        @Bakari, tu ne crois pas que quelqu’un puisse travailler si fort au point de faire ses heures normale de travail et etre actif sur le net? Si toi tu ne peux pas le faire, je peux te garantir qu’il existe des travailleurs infatiguables, capables de soulever de montagnes. Uririra. Ceci n’est pas pour dire que Rurihose est un ou une de ces gens mais c’est possible.

        • Bakari

          @Gacece Edouard
          Vous ne m’avez pas compris; je vais vous faire un dessin: je parlais de sa vantardise en exhibant son diplôme. Iwacu n’est pas un lieu d’exhibition (permettez-moi de le dire, chers responsables du site)!

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Question à un million

Quelle est cette personne aux airs minables, mal habillée, toujours en tongs, les fameux ’’Kambambili-Umoja ’’ ou en crocs, les célèbres ’’Yebo-Yebo’’, mais respectée dans nos quartiers par tous les fonctionnaires ? Quand d’aventure, ces dignes serviteurs de l’Etat, d’un (…)

Online Users

Total 2 247 users online