Le Netherlands Institute for Multiparty Democracy (NIMD), dans le cadre du projet ARPOG financé par l’Union européenne, a rassemblé à Bujumbura, le mardi 22 avril 2025, une diversité d’acteurs autour d’un thème aussi urgent que fondamental : « L’importance du leadership politique féminin dans une gouvernance démocratique inclusive ».
Ce n’était pas un simple débat. C’était un appel. Un élan collectif porté par des voix fortes, pour repenser le rôle des femmes dans la sphère politique burundaise.
Dès l’ouverture des travaux, Dieudonné Ntanago, directeur pays du NIMD, a planté le décor. « La participation des femmes n’aboutira à rien sans une mobilisation massive. » Il trouve que promouvoir le leadership féminin n’est pas une option. Il s’agit d’un impératif citoyen. Depuis les collines jusqu’aux institutions nationales, les femmes doivent se frayer une voie, bâtir des stratégies et surtout s’engager.
Le message est clair : la démocratie burundaise ne sera pleinement inclusive que si les femmes y occupent la place qui leur revient.
Désiré Nitunga, directeur général de la coordination des ONG et de la promotion des libertés publiques au ministère ayant le développement communautaire dans ses attributions, a réaffirmé l’engagement de l’État burundais à soutenir de telles initiatives. Il a salué les efforts du NIMD et martelé que « la vision 2040–2060 ne sera réalisable qu’avec le développement des femmes ». Et cette vision commence par l’éducation, la promotion et l’inclusion des femmes dans les rouages de la décision politique.
Des modèles qui inspirent
Le panel a été porté par des intervenants passionnés. Salvator Ndayegamiye a distingué trois figures clés du leadership féminin : les politiques, les communautaires et les associatives. Il a évoqué avec fierté l’exemple d’une femme de Bubanza qui, grâce à une coopérative, a offert un emploi à plus de 1 500 femmes.
Pour sa part, abbé Dieudonné Niyibizi a dressé une liste d’obstacles majeurs entravant le développement du leadership féminin au Burundi. Parmi ceux-ci figurent les obstacles socio-culturels. Il a dénoncé certains proverbes burundais qui marginalisent les femmes, citant notamment « umugore n’akarago kabaraye » (la femme doit être offerte aux visiteurs pour que ces derniers puissent bien se reposer) qu’il considère comme devant disparaître car il bafoue les droits des femmes.
Il a également critiqué la culture machiste persistante qui prône la domination masculine tout en appelant à un changement profond des mentalités.
Il a ensuite pointé du doigt les facteurs psychologiques en réfutant l’idée reçue selon laquelle les femmes seraient excessivement émotives, sensibles et moins fortes que les hommes. Il a argumenté que les hommes sont également émotifs mais qu’ils dissimulent leurs émotions. Pour illustrer son propos, il a évoqué l’exemple des femmes en Chine qui conduisent des véhicules lourds. Ce qui constitue une preuve de leur force.
Il a aussi mentionné les normes sociales, la pression familiale et de la belle-famille ainsi que les contraintes liées aux fonctions de production qui bloquent la femme. Et de mettre en évidence les barrières institutionnelles où les hommes sont souvent privilégiés dans les postes de direction tandis que les femmes sont reléguées à des rôles secondaires.
Il a regretté le manque de mentorat pour les femmes, la faible représentation féminine dans les partis politiques qu’il a qualifiée de « problème de conviction des femmes » ainsi que la non-application des dispositions légales en faveur des femmes.
L’appel d’Alphonsine Bigirimana est simple mais puissant. « L’égalité commence dans la famille. » Un écho partagé par la sénatrice de la province de Muyinga Belyse-Carine Dukundane qui milite pour une célébration de la Journée internationale de la femme ancrée dans les milieux ruraux là où les femmes ont trop longtemps été tenues à l’écart du débat public. Selon elle, cette initiative a déjà porté ses fruits dans sa colline natale où « la journée est célébrée depuis deux ans ».
Certains partis politiques donnent déjà l’exemple de l’intégration des femmes dans leurs activités. Le parti Ranac aligne par exemple des femmes en tête de liste dans plusieurs provinces. Jean de Dieu Mutabazi, du Radebu, appelle à une éducation à l’égalité dès l’enfance. Des pas importants sont enregistrés mais, le chemin reste long.
Léonie Ndayishimiye, représentant le Forum national des femmes, a lancé un appel vibrant en faveur de la sensibilisation autour de la masculinité positive. Elle a exhorté les différents acteurs pour l’instauration de « plusieurs formations sur la masculinité positive en milieu rural ».
Avec une conviction inébranlable, Salvator Ndayegamiye a martelé que toutes les normes ne se valent pas et que celles qui perpétuent la discrimination envers les femmes doivent impérativement être abrogées. Il a insisté sur le rôle fondamental de la loi comme moteur de transformation des relations entre les hommes et les femmes soulignant que les principes cardinaux de non-discrimination et d’égalité doivent s’ancrer profondément au sein même du tissu familial.
Abbé Niyibizi a reconnu l’existence de différences entre les hommes et les femmes, mais il a mis en lumière « leur complémentarité essentielle ». Il a plaidé avec force pour le respect et la valorisation constante des femmes dans toutes les sphères d’activité.
Il a invité les femmes à persévérer dans leur engagement politique en les appelant à s’investir par patriotisme et non par opportunisme. « Elles ne doivent pas y entrer pour faire du commerce politique », a-t-il souligné avec insistance.
Il a également demandé aux partis politiques de privilégier, dans leurs programmes électoraux, des initiatives favorisant l’épanouissement des femmes. En outre, il a incité les femmes leaders politiques à encourager celles des communautés à s’impliquer davantage dans la lutte pour leur développement et leur émancipation.
Transformer les discours en actions

La conférence s’est conclue sur un appel vibrant à l’action. Le NIMD, par la voix de Dieudonné Ntanago, a encouragé les participants à faire vivre les recommandations formulées. Désiré Nitunga, de son côté, a exhorté les femmes à faire preuve « d’audace, de fierté tout en restant fidèles aux valeurs culturelles burundaises ».
Ce jour-là, à Bujumbura, une vérité s’est imposée : l’avenir du Burundi se conjugue au féminin. Et avec des initiatives comme celles du NIMD, cet avenir devient de plus en plus tangible et concret.
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