Des leaders des principaux partis commencent à se désolidariser des auteurs des messages de haine et à les condamner dans leur propre camp. Chartier Niyungeko, expert en résolution pacifique des conflits, salue cette prise de conscience qui est un facteur déterminant pour prévenir les conflits.
Il y a des années, des propos haineux, un langage stigmatisant, des appels à la violence et la division étaient parfois tenus par des militants des partis politiques et relayés sur la toile. Certains propos sont tenus lors des rassemblements par des responsables ou contenus dans des chansons. Les leaders des partis politiques conscients de la dangerosité de ces messages, on décide de briser le silence.
Au cours de la campagne d’explication du nouveau découpage administratif du Burundi par le parti CNL tenu à Gitega mi-avril, un groupe d’animation a agrémenté les festivités. Une des chansons n’est pas passée inaperçu. On pouvait entendre ’’un appel aux réfugiés à ne pas rentrer et que même le reste des Burundais va les rejoindre’’.
La chanson a fait polémique au point qu’Agathon Rwasa a dû condamner certains de ses propos. « Nous demandons aux partisans et aux responsables du CNL qu’il faut éviter un langage divisionniste dans les sketchs, danses et chansons. On doit faire en sorte que l’unité des Burundais soit sauvegardée. C’est un langage pacifiste qui convient », a expliqué dans une conférence de presse tenue à Bujumbura trois jours après.
Selon le leader du principal parti de l’opposition, depuis son agrément en 2019, sa position est on ne peut plus claire. « Nous sommes déterminés à œuvrer pour que tous les Burundais vivent sur le sol burundais. Nous disons et nous le dirons toujours, nul n’est né pour vivre en exil. Chacun doit apporter sa pierre à l’édifice à notre nation ».
L’intention, dit-il, est d’appeler à un langage pacifiste, unificateur et non-violent. « Ce n’est pas bon si des propos tenus sont contraires à notre objectif », a-t-il insisté.
Les messages de haine ne sont plus tolérés au CNDD-FDD
Les militants du parti au pouvoir sont connus pour ne pas ménager les opposants dans leurs prises de parole et dans leurs chansons. Dans les réunions et meetings, des opposants sont pris à partie.
Pour Révérien Ndikuriyo secrétaire général du CNDD-FDD, assez est assez. Selon lui, les discours de haine sont indésirables dans la bouche des Bagumyabanga. « Nous avons demandé que les partisans évitent de tenir des discours de haine, des messages de stigmatisation des autres, des mots insultants. On ne peut pas prier et insulter les gens, ce serait de faire quelque chose et son contraire », a-t-il indiqué lors des cérémonies baptisées ’’Nkurunziza Day’’, le 17 juin à Karusi.
Il a tenu à remercier les responsables provinciaux et communaux du parti qui mettent son mot d’ordre en application. M. Ndikuriyo a rappelé le message qu’il avait donné lors de sa visite en commune Muyinga. Pour lui, participer dans un meeting politique, c’est comme rentrer à la maison.
Chartier Niyungeko, expert en résolution pacifique des conflits, salue l’attitude de ces deux leaders des principales formations politiques. « Ils condamnent leurs propres partisans pour leurs messages de haine et comportements violents. Les interpeller est une bonne chose pour éviter des divisions dans le pays. Cette prise de conscience est un comportement rassembleur ».
Un pas vers un climat politique apaisé
Pour lui, les discours des autorités et leaders politiques influencent l’opinion populaire. Ils façonnent, dit-il, l’orientation en matière d’interaction sociale et cohabitation pacifique.
Il considère qu’à la veille des législatives de 2025, c’est un espoir pour des élections libres, transparentes et apaisées. « Même si ce n’est pas de la seule condition pour influencer un climat favorable aux élections, c’est l’un des facteurs déterminants pour un climat favorable aux élections équitables».
Cet expert en résolution pacifique des conflits invite tous les politiques à emboîter le pas à ces deux responsables pour bâtir une société juste et prospère. « Les opinions des leaders peuvent contribuer au rassemblement et à la cohésion sociale. Au contraire, ils attisent des tensions sociopolitiques. Si les leaders politiques tiennent des messages rassembleurs et à la cohésion sociale, le climat sera sain pour des élections équitables, libres, transparences et apaisées ».