La défense relève des irrégularités qui ont émaillé le procès des vingt-huit prévenus pour putsch manqué du 13 mai 2015 contre qui le ministère public a requis la perpétuité.
« Dans l’ensemble, la Cour suprême a foulé au pied le principe de l’égalité des armes. Ce principe veut qu’accusé et accusation soient placés dans les mêmes conditions devant le juge », estime Me Fabien Segatwa.
Comme première irrégularité, la défense déplore que les avocats comme les parties n’aient pas eu le temps de préparer la défense. Ceci étant, le Pacte International relatif aux droits civils et politiques, qui fait partie intégrante de la Constitution du Burundi, garantit à toute personne accusée d’une infraction « de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de la défense et à communiquer avec le Conseil de son choix ».
Me Segatwa observe aussi que les accusés ont été grugés de leur droit de prise de contact avec tout le dossier. Or, lorsque le dossier se trouve devant le juge du fond, il n’a plus de caractère secret, les parties peuvent prendre connaissance de tout le dossier et même en prendre copie. Le juge a décidé que les prévenus devraient lire le dossier dans les locaux de la Cour d’appel de Gitega où le procès se tenait. Seulement, « au vu de la sécurité, du volume du dossier, du nombre d’accusés et du temps accordé, cette décision n’était qu’une fin de non-recevoir à la requête des accusés d’avoir droit à tout le dossier », estime Me Segatwa.
Il regrette aussi que l’acte d’accusation détaillé (note de fin d’instruction et de la saisine) n’ait pas été communiqué à la partie civile.
Récusés et remplacés : bonnet blanc et blanc bonnet
La difficulté d’accès à tout le dossier et le manque de temps suffisant pour la préparation de la défense ont causé même un incident : le juge a récusé sept avocats pour « absence injustifiée à une audience ».
Comme solution de substitution, la Cour suprême a commis des avocats pour la défense des accusés. Mais là où le bât blesse est que ces avocats n’ont pas non plus eu le temps de s’imprégner du dossier et d’entrer en contact avec les accusés. Conséquence : certains des prévenus, tel le Général-Major Cyrille Ndayirukiye, ont jugé bon de renoncer à l’assistance.
Pourtant, et c’est aussi une autre irrégularité, selon l’article 166 du Code de procédure pénale, lorsque l’infraction pour laquelle le prévenu est poursuivi est punie d’une servitude pénale d’au moins vingt ans, l’assistance d’un défenseur est obligatoire sauf si le prévenu y renonce.
Enfin, selon Me Segatwa, la Cour a violé le principe comme quoi en matière pénale, la charge de la preuve incombe au ministère public. Dans une de ses conclusions, il soutient s’être trouvé devant un dossier sans témoin, construit sur base d’allégations sans preuve, « un dossier vide », selon le jargon judiciaire.
Signalons que quand une affaire est en délibéré, le ministère public s’interdit de commentaires sur les exceptions de la partie adverse.
« Insurgés » du 11 décembre : procès au fond sans assistance
Le procès des 58 jeunes arrêtés pour participation aux attaques des camps militaires du 11 décembre a été entaché d’au moins quatre irrégularités.
« Je n’espère nullement que le jugement sera en faveur des accusés », lance un avocat qui participait à la défense d’un des prévenus.
Et pour cause, le Tribunal de Grande Instance de Bujumbura, qui siégeait à Muramvya, n’a pas accédé aux exceptions de forme soulevées avant le débat au fond par la défense et les accusés.
Selon toujours cet avocat qui a requis l’anonymat, pour cause de torture sur les présumés « insurgés », la défense a plaidé en vain pour l’annulation des procès-verbaux de la garde à vue. Bien plus, les procès-verbaux ainsi que les actes d’instruction du parquet de la République devraient être frappés de nullité parce qu’établis sans que les présumés soient assistés alors que le ministère public a requis la perpétuité contre les prévenus.
Les avocats regrettent aussi le rejet par le juge de leur requête d’accorder du temps suffisant à la défense pour préparer la plaidoirie et pour se consulter avec les clients. « Nous avons été constitués vendredi le 8 et le procès devait se tenir lundi le 11 janvier. Quelques prévenus seulement avaient des avocats constitués depuis longtemps. »
Selon la même source, les avocats ont souhaité en vain que seuls ceux qui ont été attrapés les armes ou effets militaires à la main soient jugés selon la procédure de flagrance. Les autres devraient être jugés selon la procédure ordinaire.
Face au refus du tribunal de statuer sur la nullité de la procédure pré-juridictionnelle, bien des avocats ont jugé bon de ne pas plaider quant au fond. L’affaire a pourtant été entendue et mise en délibéré.
Signalons que les prévenus arrêtés à Ny akabiga et à Jabe sont accusés de port illégal d’armes, de participation à des bandes armées et d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat. En plus de ces accusations, ceux arrêtés à Musaga sont poursuivis pour assassinat sur des forces de l’ordre, de vol d’armes et munitions dans les magasins militaires, et de tentative de renversement des institutions.
Commentaire
Quelle que soit la lourdeur de la faute commise, le juge est tenu à faire un procès équitable. Un procès équitable veut le respect strict des règles de procédure. Les avocats ne jouent pas les sophistes en défendant les prévenus dans des causes « de flagrance », jugées perdues d’avance pour le commun des mortels.
En effet, en cas de condamnation par le juge d’appel, les exceptions portant sur les irrégularités de forme justifieront le pourvoi en cassation. Et pour cause, la cassation n’est pas un troisième degré de juridiction, mais une chambre de la Cour Suprême qui statue sur les irrégularités de forme. Cette chambre peut casser un procès pour vice de forme. Sinon, à quoi servirait le Code de procédure pénale ?
Armes inégales ? Ils auraient du^ prendre des armes supérieures quand ils ont fait leur connerie. Mais, comme disaient les romains, vae victis, malheur aux vaincus. Par « vaincus », je parle des vrais coupables, et non des innocents auxquels, dans notre culture collectivisante, on étend les punitions des fautes qu’ils n’ont pas commises.
Vous avez menti aux jeunes qu’ils peuvent aller au Rwanda pour apprendre la guerre pendands 2 mois et revenir conquerrir les quamps militaires. Quelle folie? Une peines maximale doit etre prononcee pour ces jeunes.
Jeremy, le jour où tu sauras bien écrire « camps », on se permettra de lire tes commentaires or, tes écrits sont bidons et ne relèvent de la bassesse.
@HIMA Jeremy
Même si ton orthographe est fantaisiste, on te comprend. Quant à moi, j’approuve entièrement le contenu de l’article ci-dessus, mais je pense que tu soulèves un point important.
En effet, il est inquiétant de voir que la violence des armes semble devoir régler un problème politique et de respect du droit. D’autant plus inquiétant que les cercles dirigeants ont délibérement dirigé le conflit dans cette voie.
Autant la voie des armes a pu paraître justifiée face aux dictatures du passé, autant ce choix du retour à un passé « héroïque » racornit l’image de ceux qui y souscrivent. 2015 et la suite vont discréditer totalement le régime qui en porte la responsabilité et ses partisans.
La morale de l’histoire ? Ne confiez pas à des militaires la gestion d’une société qui se veut civile. Qui veut un loup dans sa bergerie ?
Jean-Jacques Rousseau : » Le premier prix de la justice est le sentiment qu’on la pratique « . Le gouvernement burundais se verra donc décerner … le dernier prix. Celui du cancre