Amorcé dans les années 90, le processus de privatisation et de libéralisation de la filière café est dans sa dernière phase. Elle pourrait se clôturer en octobre prochain. Les principaux intervenants dans ces secteurs divergent sur son bilan.
Joseph Ntirabampa, le président de la Confédération Nationale des Associations des Caféiculteurs du Burundi (CNAC) est catégorique : « La privatisation est un échec. Elle n’a rien apporté au caféiculteur ». Pour lui, la privatisation n’a produit que des résultats négatifs: les sociétés de déparchage font des bénéfices au détriment des caféiculteurs qui ont vu les prix chutés.
M. Ntirabampa indique aussi que la fraude du café vers le Rwanda s’est intensifiée. En plus, il doute des capacités de l’Etat à contrôler les mouvements de rapatriement des devises issues de la vente du café. Enfin, il se demande si l’Etat et le caféiculteur ne perdent pas de vue qu’une société comme Web Cor qui maîtrise la chaîne du café est aussi celle qui joue un rôle clé dans la fixation des prix à l’exportation. Et de conclure que le délaissement des caféiteurs de l’entretien des plantations est une conséquence logique de l’échec de la privatisation.
Néanmoins, M. Ntakarutimana estime que la privation pourrait apporter une plus-value aux caféiculteurs si au moins 30 des 77 stations de lavage (SDL), qui seront privatisées au courant du mois d’octobre, sont accordées aux producteurs regroupés au sein du CNAC et que les acquéreurs des SDL acceptent de livrer 25% de leurs actions aux producteurs.
Autre son de cloche
Au ministère à la Présidence chargé de la Bonne Gouvernance, et de la Privatisation, Léonidas Habonimana, commissaire général des Services Chargés des Entreprises Publiques (SCEP), dit que « le désengagement de la filière café » est une réussite eu égard aux raisons qui l’ont dicté.
Pour lui, il était grand temps que l’Etat se retire du secteur production car l’état a toujours subventionné ce secteur, mais la production et la qualité n’augmentaient pas proportionnellement aux fonds injectés.
En outre, le commissaire général est convaincu que le désengagement de l’Etat a eu des effets positifs sur notamment les prix au producteur et l’encadrement du caféiculteur dans certaines régions comme Gitega.
M. Habonimana dit que le SCEP ne trouve aucun inconvénient à ce que le CNAC prenne toutes les 77 SDL qui seront mises sur le marché. « Mais cela doit être validé par le Comité interministériel et le Conseil des ministres qui devront se prononcer sur les stratégies d’acquisition par les caféiculteurs », fait-il savoir.
Il invite aussi le CNAC à prendre les 25% des « parts réservataires » (celles réservées à l’Etat) dans les SDL déjà privatisées afin d’avoir un mot dans la fixation des prix.
Pour lui, le délaissement est justifié par les prix bas sur le marché international.
« Trop tôt pour se prononcer »
A l’Association Interprofessionnelle de la filière café du Burundi, (Intercafé), le secrétaire exécutif, Oscar Baranyizigiye, dit qu’il est encore très tôt pour évaluer la politique de privatisation. Il souligne quand même qu’elle a permis la concurrence et que les prix au producteur ont ainsi augmenté.
M. Baranyizigiye martèle que la libéralisation du secteur café (l’autre aspect du processus de désengagement de l’Etat) est une réussite puisque toute personne intéressée peut travailler sur toute la chaîne de valeur du café : production, transformation et commercialisation. « Cela ne fut pas le cas par le passé », fait-il remarquer.
La privatisation de la filière était pertinent mais malheureusement elle était très mal conduite. Je ne comprend pas par exemple comment l’ARFIC , chargée de la régulation, soit dotée d’un DG et tant des directeurs, avec des moyens exorbitants pour le fonctionnement et les indemnités de son personnel. C’est d’autant incompréhensible car l’argent pour le fonctionnement de l’ARFIC doit provenir du café. Les gens s’enrichissent sur la tête du pauvre paysans qui à son tour bénéficie de très peu de ces structures budgétivores.
A mon avis, un Directeur, un véhicule, un simple bureau, quelques conseillers et un planton suffiraient pour jouer le rôle confié à l’ALFIC.