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Politique

Pr. Pascal Rwankara, constitutionnaliste : « Le serment prêté par Bernard Busokoza n’est pas valide »

23/10/2013 1

Pr. Pascal Rwankara affirme que la prestation de serment de Bernard Busokoza, nouveau 1er vice-président de la République, est inconstitutionnelle. Le serment prononcé est consacré aux seuls ministres alors que seul le peuple burundais détient la souveraineté nationale. M. Rwankara appelle la Cour constitutionnelle à la rigueur.

Quelle interprétation faites-vous du serment du nouveau 1er vice-président ?

Le Pr Rwankara ©Iwacu
Le Pr Rwankara ©Iwacu

C’est un serment non conforme à l’article 127 de la Constitution. Il faut rappeler le principe de l’alinéa 1er de celui-ci. Il dispose sans ambages que lors de l’entrée en fonction du vice-président de la République, il est procédé à la prestation solennelle de serment. C’est-à-dire que la solennité est exigée comme on dit en latin non seulement ad probationem mais également ad solanimitatem.

Concrètement, que voulez-vous dire ?

Que la prestation de serment est exigée non seulement pour la preuve mais aussi pour la solennité. C’est-à-dire que l’acte posé est revêtu d’une importance fondamentale. Sinon, il suffirait du simple décret du président de la République.
Or, ici, le caractère solennel est dépourvu de sa substance du fait que le texte présenté et reçu par la Cour constitutionnelle est celui prononcé par les ministres ou membres du gouvernement.
En outre, le 1er vice-président a prêté serment par erreur devant le président de la République en le qualifiant de seul détenteur de la souveraineté nationale. Il faut rectifier rapidement. C’est le peuple burundais qui est détenteur de la souveraineté nationale par représentation ou par les élections. Donc, le serment prêté par Bernard Busokoza n’est pas valide.

A qui incombe alors cette responsabilité ?

Elle est partagée. Peut-être que par émotion, le 1er vice-président ne s’est pas aperçu de l’erreur, mais il aurait dû s’imprégner du texte avant.
Il est question aussi des mécanismes de fonctionnement, les rouages et les compétences acquises de certaines personnes qui occupent des fonctions techniques.
En termes juridiques, la véritable institution coupable est la Cour constitutionnelle. Elle est le garant de la bonne conformité des principes constitutionnels. Ses membres ne sont pas là pour faire de la figuration. Qu’une erreur pareille soit commise, c’est une grave et lourde faute professionnelle.

Est-ce que l’erreur peut avoir des conséquences quant à l’exercice des fonctions du 1er vice-président ?

On suppose qu’avant le serment, les vice-présidents ne sont pas en fonction. C’est pourquoi, il n’est pas anodin, ce n’est pas une simple formalité publique, c’est un acte posé avec une importance fondamentale. Il est tout à fait normal de s’imaginer que les actes posés par M. Busokoza dans l’intervalle de la rectification de l’erreur, pourraient poser quelques difficultés au niveau de leur validité.
Imaginons un seul instant qu’un justiciable au cours d’une procédure judiciaire, invoque l’inconstitutionnalité du 1er vice-président de la République qui aurait par exemple rendu un arrêté avant la rectification de son serment. Ça peut paraître hypothétique mais ça peut exister.

Comment procéder alors à sa rectification?

Il n’y a pas mille chemins. Les erreurs administratives se corrigent par la même procédure ou par les mêmes mécanismes de leur accomplissement. Ici, on peut quand même abréger les participants à cette cérémonie. Il ne faut pas l’oublier, l’actuel 1er vice-président est député, donc membre du parlement aujourd’hui en session. A la limite comme le dit clairement la Constitution à l’article 127, la présence du président de la République n’est pas indispensable. On pourrait imaginer que la seule présence de Bernard Busokoza, des élus du peuple et de la Cour constitutionnelle soit suffisante.

Et quelle portée peut avoir une telle erreur sur la vie d’une nation ?

Elle peut renseigner sur la compétence au niveau du fond des institutions qui régissent la République. On peut penser que même des erreurs plus dramatiques sont permises même si ce n’est pas le cas jusque-là.
Dorénavant, il faut que les techniciens fassent leur travail et préparent soigneusement les procédures et les modalités. C’est pour ça d’ailleurs qu’il y a prestation solennelle. Que cette prestigieuse institution qu’est la Cour constitutionnelle et tout ce beau monde qui y travaille ne parviennent pas à s’apercevoir d’une erreur pareille, c’est interpellant.

Au moment où nous mettons sous presse, le Premier vice-président de la République doit de nouveau prêter serment devant la Cour constitutionnelle, ce vendredi.

Forum des lecteurs d'Iwacu

1 réaction
  1. Baba

    L’appel est inutile car la Cour a déjà obtempéré aux injonctions de Rwankara . Le problème réside dans le fait du coup d’Etat du 3 juillet 1993. DB

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