La nouvelle composition de la CENI qui va organiser les scrutins de 2015 a fait beaucoup parler d’elle. Parmi les réactions, voici celle d’un lecteur d’Iwacu qui explique la cohérence du parti au pouvoir en [reconduisant le Président d’institution et son Commissaire en charge de la communication->http://iwacu-burundi.org/spip.php?article4314].
N’exagérons pas les choses, de prime abord : l’avenir du Burundi n’est hypothéqué ou mis en danger par la nomination de deux personnes au sein de la CENI. Un parti peut faire des choix qui fragilisent ou qui détruisent tout simplement d’autres partis politiques, cela n’est pas une exclusion. Cela fait parti du jeu politique et ce n’est pas une singularité du Burundi. Si un parti ou un groupe de partis se fragilise lui-même, il me semble utopique de s’attendre à ce que ses adversaires lui fassent des cadeaux.
Ensuite, si j’avais été de l’opposition, lors du vote de la nouvelle CENI, j’aurais probablement voté "contre" mais si j’avais été membre du parti au pouvoir j’aurai certainement voté "pour".
Je m’explique : si le Cndd-Fdd écartait les deux noms [de Pierre-Claver Nayicariye et Prosper Ntahorwamiye ], ce serait un aveu que ces deux hommes ont mal conduit les élections de 2010 et du coup fragiliser la légitimité même du parti au pouvoir. Une erreur politique grave dont l’opposition n’aurait pas hésité à se servir dans l’opinion nationale comme internationale.
Par contre en reconduisant précisément ces deux messieurs, le message envoyé est le suivant : " Les élections de 2010 se sont bien déroulés, la démocratie s’est exprimée et les troubles qui ont suivi ont été causés par les partis qui ont refusé de reconnaître la volonté du peuple ", ce qui est dans la droite ligne de la position de ce parti depuis les élections de 2010. Il y a donc cohérence.
Mais plus encore, cela met [les partis de l’ADC-Ikibiri->http://iwacu-burundi.org/spip.php?article4322] dans une situation très inconfortable. Car il y a deux choix difficiles à faire : soit accepter de participer aux élections de 2015, soit boycotter de nouveau.
En acceptant, ils valident le choix qui a été fait de l’équipe de la CENI et reconnaissent implicitement que ce sont eux qui ont été mauvais perdant en 2010. En refusant, ils sont cohérents avec eux-même (rejet de la conduite des scrutins de 2010) mais prennent le risque de ne pas être suivis par des soutiens qui leur avaient déjà reproché le boycott de 2010. Celui de 2015 pourrait les exaspérer, d’autant plus que le vote de la nouvelle CENI est le fruit d’un vote parlementaire : c’est le plus haut degré de la légitimité qui puisse être (de même que le suffrage direct), et il n’est pas du tout aisé de s’exprimer contre les représentants du peuple d’un pays souverain …
Quelle que soit la position des partis de l’ADC, il y aura des mécontents dans leurs rangs, ce qui pourrait les fragiliser d’avantage. Mais comme la stratégie politique peut avoir une infinité de surprises, le Cndd-Fdd pourrait très bien trouver à un moment donné le moyen de finalement changer une fois de plus l’équipe de la CENI et se donner ainsi l’image d’un parti qui est à l’écoute mais qui reste fort et souverain … Attendons voir !
