Depuis le mois de juin, le trafic monte en flèche au port Kabonga. Les dockers gagnent plus. Les commerçants font des bénéfices sans précédents. Du côté de l’autorité maritime, les recettes sont multipliées par cinq.
La suspension de l’exportation des boissons Brarudi via le port de Rumonge est la cause principale de la vitalité de Kabonga.
Au port de Kabonga, quatre bateaux sont accostés au bord du lac Tanganyika. Les dockers chargent les caisses des boissons. Eric sue. Il soulève les deux caisses de Primus dans les mains. Ce docker ne cache pas sa joie « C’est la première fois que nous chargeons plus de 5 bateaux par semaine. »
Selon lui, depuis le mois de juin, le commerce refleurit sur ce port. Ce père de deux enfants raconte qu’avant, les portefaix étaient désœuvrés. Je gagnais au moins 5 mille BIF par semaine. Actuellement, nous gagnons plus de 20 mille par semaine… Nous pouvons subvenir aux besoins quotidiens de nos familles.
Il est 11 h. Au port transfrontalier de Kabonga, situé à 15 km de la commune Nyanza-lac. Ngomba, une commerçante congolaise, supervise les portefaix qui transportent les boissons. Elle est venue de la RDC dimanche soir. Cette mère de six enfants exporte les boissons Brarudi. Jadis, elle s’approvisionnait au port de Rumonge. Suite à la suspension de l’exportation des boissons au port de Rumonge du 26 avril, elle s’est rabattue au port de Kabonga.
Pour rappel, huit commerçants ont été interdits de vendre les boissons au port de Rumonge parce qu’ils détiennent la licence d’exportation. Cette commerçante révèle que l’interdiction de l’exportation de boisson via le port de Rumonge a tourné en sa faveur. Et de jurer qu’elle ne retournera plus s’approvisionner à Rumonge : « Nous gagnons plus en achetant au port de Kabonga qu’au port de Rumonge. Même si la mesure est levée, je n’y retournerai pas.»
Là-bas, les boissons étaient très chères, poursuit-elle, notamment le Primus et l’Amstel. Une caisse de Primus de 72 cl qu’elle achetait à 20 mille BIF, ne s’obtient qu’à 17 mille BIF au port de Kabonga. Une caisse d’Amstel 65 cl s’obtenait à 25 mille BIF s’achète 21 mille BIF à Kabonga. Au port de Kabonga, une caisse de Primus 50 cl s’achète 21 mille BIF alors qu’elle se vend à 25 mille au port de Rumonge.
Les commerçants congolais profitent
Mme Ngomba témoigne qu’elle est venue s’approvisionner au port de Kabonga pour la troisième fois. Cette dernière précise qu’elle exporte 15 caisses Primus 72 cl, onze caisses d’Amstel, quatre caisses Primus 50 cl, trente caisses Nyongera et trois caisses de Fanta. « Sur cette quantité, je gagne plus de 90 mille BIF supplémentaire par rapport à la marge bénéficiaire encaissée à Rumonge».
Ce commerce lui rapporte plus, entre 300 et 350 mille BIF par semaine. Cette activité est la seule source de revenus. Depuis le mois de juin, une caisse de Primus lui génère un bénéfice de 10 mille BIF, Amstel 15 mille BIF, Nyongera 8 milles BIF, soda 6 mille BIF. D’après elle, tout commerçant qui exporte les boissons Brarudi en RDC ne peut aller en dessous de cette marge bénéficiaire.
Jean-Paul, commerçant des légumes soutient également que le commerce au port de Kabonga monte en flèche. « A partir du mois de juin, je parviens à vendre deux fois par semaine », se réjouit-il. Pour lui, cela est un pas franchi. Depuis que j’ai commencé ce business, explique-t-il, je ne vendais qu’une fois le mois. Le gain était insignifiant. Selon lui, ce dépôt de produit Brarudi a boosté le commerce sur ce port. Le mois dernier, il confie qu’il a réalisé un bénéfice de 100 mille BIF sur les choux et les tomates vendus. « Mes clients sont des commerçants congolais qui viennent s’approvisionner en boissons Brarudi », souligne-t-il. Tous les jours, il se pointe au port pour entrer en contact avec les commerçants congolais.
Les recettes douanières augmentent
Cyprien Nizigama, le seul grossiste de boissons Brarudi à Kabonga, dit qu’il est encore tôt d’affirmer que son commerce est rentable : «J’ai commencé cette activité au mois de juin.»
Il fait savoir que la vente de boissons Brarudi au port est réservée seulement aux grossistes exportateurs. Ce grossiste tient à préciser qu’il fournit exclusivement aux commerçants exportateurs.
M. Nizigama confie, par ailleurs, qu’il détient l’autorisation d’exportation des boissons Brarudi à partir du port de Kabonga, depuis le mois de juin. Cependant ce grossiste refuse les transactions qui se font en BIF. Et d’expliquer : « Nous vendons en dollars, car nous achetons à la Brarudi en dollars. »
Ce grossiste soutient que la vente de ces boissons se fait dans la transparence. Il explique le processus d’exportation de l’achat à la vente. Nous achetons les boissons à la Brarudi. Les produits sont embarqués dans les camions sous scellés. Ces derniers sont déchargés sous surveillance des douaniers de l’OBR.
Et de marteler que d’autres boissons qui ne sont pas vendues en dollars ne peuvent être introduites dans le dépôt. Car, l’agent de l’OBR conserve la clé dudit dépôt. Et de souligner que les boissons sont surtout exportées en Tanzanie et en RDC.
Selon l’un des agents de l’autorité maritime de Kabonga sous couvert d’anonymat, la suspension de l’exportation des boissons de la Brarudi via le port de Rumonge a fait augmenter le trafic commercial sur ce port. Le nombre de bateaux immatriculés au Congo a augmenté. « Regardez ! » Il nous montre d’un signe de la main quatre bateaux accostés tous d’origine congolaise. Ils attendent leurs chargements. Selon cette même source, ces bateaux sont tous nouveaux au port de Kabonga. Cet employé fait savoir que cinq bateaux sont partis en RDC. L’un d’immatriculation burundaise et quatre d’origine congolaise. Ils ont transporté 1488 caisses de boissons (22,32 tonnes), 3,3 tonnes de choux, 558 kg de tomates. Ces bateaux ont payé les frais d’accostage. Celui immatriculé au Burundi a payé 120 100 BIF et ceux d’immatriculation congolaise ont payé 65 $ chacun.
D’après cet agent, ce montant de recettes n’avait jamais été atteint, depuis la création de ce port. Au moins, un seul bateau se rendait en RDC par semaine. Ce dernier ne transportait que 350 caisses. Cette recette dépasse de loin celle collectée au mois de mai. Chaque semaine, indique-t-il, nous n’encaissions que 65$.