Face aux catastrophes naturelles et divers accidents, le Burundi ne compte en premier que sur la police de Protection civile. Ce corps fait de son mieux pour intervenir. Mais, ses moyens sont très limités. Rencontre avec Anicet Nibaruta, directeur général adjoint de cet organe.
Quelles sont les catastrophes auxquelles le Burundi est exposé ?
Le pays n’est pas à l’abri et il en a déjà été victime à plusieurs reprises. Il y a par exemple les inondations de février 2014, à Gatunguru avec un bilan désastreux : plusieurs morts, 10 mille sinistrés et plus de 3.500 maisons détruites ; celles de mars 2015 à Gataza, province Rumonge, où plus de 700 maisons, des ponts, des étendues de champs, … ont été détruits.
La route Bujumbura-Rumonge a été impraticable, plusieurs familles obligées de se réfugier dans des écoles ou des sites de déplacés provisoire comme celui de Cashi, etc. Ce sont aussi des incendies comme celui qui a ravagé le marché central de Bujumbura, le 27 janvier 2013, du supermarché chinois T2000, etc. Ajoutons également les épidémies de choléra, la malaria et des cas de disette.
Quels sont les défis auxquels vous faites face dans vos interventions ?
Dans le cadre de la gestion des catastrophes, le gouvernement a consenti trop d’efforts dans l’achat des camions anti-incendie. Mais, ils sont d’une faible capacité de contenance : 6.000 litres pouvant être épuisés en six minutes quand le conducteur travaille sans relâche. Au niveau national, nous avons seulement un seul camion à échelles pour intervenir en cas d’incendies dans des maisons en étages. Acquis en 1982, il est très vieux et tombe souvent en panne. Il y a aussi des provinces non-équipées à savoir Bubanza, Bujumbura rural, Mwaro, Karusi et Cankuzo.
D’autres équipements font défaut en cas d’incendie. Le pompier doit avoir un équipement spécifique : la tenue coûte 20 mille dollars, sans parler des bouteilles d’oxygène dont il doit se munir. Nous ne disposons que d’une seule ambulance pour toute la ville de Bujumbura.
Et quand il s’agit porter secours dans l’eau, la police de la protection ne dispose d’aucun plongeur, même les deux de la Regideso sont vieux et seraient déjà partis à la retraite. Il y a donc une nécessité de bénéficier de formations en la matière étant donné que Bujumbura se trouve, par exemple, au bord d’un lac.
Le manque de moyens constitue un handicap de taille. D’où, l’incapacité de mettre en place des stocks des premiers secours comme les nourritures, les tentes, les médicaments, etc. En cas d’urgence, nous devons faire recours à la Croix-Rouge, au CICR, etc. Car, il est impossible de constituer des stocks stratégiques de réponses aux urgences.
Ce qui ralentit aussi la décentralisation de nos services. Ainsi, sur 119 communes, nous avons déjà mis en place seulement 46 structures communales de réduction et de gestion des catastrophes en se basant sur leur degré de vulnérabilité aux catastrophes.
Le manque de loi portant politique nationale de prévention et de gestion des risques des catastrophes est un autre grand défi. Nous avons une grande restriction d’action parce que quand la direction générale de l’urbanisme ou celle de l’aménagement du territoire attribue des parcelles aux demandeurs, normalement la plateforme devrait donner son point de vue. C’est cette structure qui dispose d’une cartographie des risques dans différentes zones sous menace. Ces structures ne devraient pas attribuer des parcelles dans ces périmètres.
Qu’en est-il des avancées ?
Elles sont significatives mais le chemin est encore long, très long. Des structures ont été créées comme la police de la protection civile, actuellement décentralisées au niveau des provinces.
La perspective étant d’en créer dans toutes les communes. En 2007, une plate-forme nationale de la prévention et de la gestion des catastrophes a été mise sur pied.
Elle comprend des points focaux issus des différents ministères techniquement concernés, des agences onusiennes, des ONGs humanitaires, des congrégations religieuses, etc.
Pour son opérationnalisation, elle est décentralisée au niveau provincial et le gouverneur en est le président. L’étape est au niveau communal, des structures qui seront dirigées par les administrateurs communaux.
Même si les moyens tardent, des concepts de réduction des risques des catastrophes ont été intégrés dans le cadre stratégique de lutte contre la pauvreté, 2ème génération (CSLIP II).
Des séances de renforcement des capacités du service national chargé de la météo ont été organisées, un service qui nous renseigne sur l’état des changements climatiques. Car, les risques des catastrophes auxquels fait face le Burundi sont liés à plus de 70% aux changements climatiques.
Des campagnes de sensibilisation communautaire ont été menées. A l’Université du Burundi, il y a déjà une formation en la matière, au niveau du Master. L’intention étant de les intégrer dans le curricula scolaire avec le consentement du ministère de l’Education et de l’Unesco.
Et un réseau national de communication et d’information pour la réduction des risques des catastrophes (RNCI-RRC) a été mis en place. Ce qui permettra aux journalistes de mieux communiquer en cas de catastrophes, d’informer et d’éduquer sur la prévention et la réduction des risques des catastrophes avec des termes appropriés.
Le bilan de 700 morts lors de la catastrophe de février 2014 a Gatunguru me semble exagéré… Est-ce un lapsus kalami du rédacteur ou autre chose?
Sinon les constructions anarchiques sur certains sites restent et resteront pour longtemps un danger pour le pays….une action vigoureuse et urgente s’impose de la part des pouvoirs publics aussi bien que des acteurs non-étatiques