Le Ministère de la Santé Publique de la Lutte contre le SIDA, en collaboration avec l’OMS et l’APEFE sur financement du Gouvernement belge (DGD), a procédé mercredi 6 mars à Bujumbura, au lancement officiel du Plan Stratégique de Réadaptation 2023-2027 au Burundi (PSRB).
Après le mot de bienvenue prononcé par le représentant du Maire de Bujumbura, les représentants de l’OMS, de l’organisation belge APEFE et du MSPLS se sont tour à tour exprimés sur les objectifs du PSRB 2023-2027.
Le Dr Denise Nkezimana, Déléguée du Représentant de l’OMS au Burundi, a rappelé que, à l’échelle mondiale, 2,4 milliards de personnes (ce qui représente près d’un tiers de la population) vivent avec un problème de santé pour lequel la réadaptation peut les aider à mieux « fonctionner », c’est-à-dire à mieux accomplir les activités normales de la vie quotidienne. « La réadaptation est donc un élément important de la couverture sanitaire universelle et une stratégie essentielle pour atteindre l’objectif N°3 du développement durable, permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être à tous à tout âge ».
Malheureusement, plus de 50 % des personnes dans le monde qui ont des besoins en réadaptation n’en bénéficient pas. Ce chiffre est encore plus important dans les pays à revenus faibless ou intermédiaire. Le PSRB 2023-2027 est donc un élément très important pour faire évoluer les choses dans le bon sens au Burundi.
Les soins de réadaptation sont incontournables
« Longtemps négligés, les soins de réadaptation sont de plus en plus essentiels au Burundi, en Afrique et dans le monde entier, à mesure où la population vieillit et à mesure où évolue l’épidémiologie des maladies handicapantes », a fait remarquer Olivier Jadin, Administrateur du Programme Santé de l’APEFE au Burundi.
Il a fait constater que les AVC, les traumatismes de la route, les affections cardio-vasculaires, les maladies respiratoires, les affections rhumatologiques et bien d’autres encore sont en pleine croissance.
« Elles perturbent profondément le fonctionnement des personnes dans leur environnement social, professionnel et familial. Elles provoquent le handicap chez celles et ceux qui en sont victimes et ne peuvent plus participer normalement aux activités de la vie quotidienne », a-t-il alerté.
« Toute personne aura, un jour ou un autre, besoin de réadaptation, à la suite d’un traumatisme, d’une chirurgie, d’une maladie ou d’un problème de santé ou parce que son fonctionnement a diminué avec l’âge », a-t-il précisé.
Le Burundi a heureusement inscrit la réadaptation depuis 2011 dans les priorités de sa Stratégique Sectorielle en Santé. Deux plans antérieurs au présent plan stratégique ont été élaborés et validés. Ils bénéficient depuis plus d’une dizaine d’années des appuis efficaces des partenaires du MSPLS comme l’APEFE, l’ONG nationale COPED, l’organisation Hope Walks, et d’autres partenaires comme, plus récemment, la Croix-Rouge Française et la Croix-Rouge du Burundi.
Le PSRB 2023-2027 n’arrive donc pas en terrain vierge car beaucoup de choses ont été réalisées depuis plus d’une dizaine d’années. Ce 3ème plan stratégique, élaboré avec l’appui de l’OMS et de l’APEFE se veut donc un accélérateur des activités en réadaptation au Burundi.
Dans cette perspective, lors d’une réunion régionale « réadaptation » organisée par l’OMS en novembre dernier à Addis Abeba, il a été constaté qu’un total de 18 pays africains ont déjà adopté des plans stratégiques en réadaptation. Les réalisations déjà mises en œuvre par le Burundi dans le cadre de son propre plan ont été très remarquées.
La réadaptation, une réponse thérapeutique essentielle
Le Dr Cléophile Akindavyi, Directrice Générale des services de santé et de lutte contre le SIDA au MSPLS a confirmé que « La réadaptation constitue un pilier essentiel du système de santé, au même titre que les soins préventifs, curatifs et de promotion de la santé. Elle apporte une réponse cruciale aux grands défis de santé publique et aux handicaps qui leur sont associés ».
Pour mieux faire face à tous les défis liés à la multiplication des maladies handicapantes comme les AVC ; les traumatismes ; les maladies chroniques dues à l’urbanisation, aux changements d’habitudes alimentaires et au vieillissement, le Dr Cléophile Akindavyi a confirmé que le MSPLS a souhaité élaborer ce plan stratégique pour renforcer la composante « Réadaptation » dans le système de santé national.
Les chiffres sont parlants.
Selon les évaluations faites par l’OMS pour l’année 2019, il apparaît que, 2,9 millions de Burundais (sur les 12 millions d’habitants du pays) ont connu des problèmes de santé nécessitant des soins de réadaptation.
Cela signifie qu’en 2019 un Burundais sur quatre aurait eu besoin de réadaptation. Parmi eux, on estime par exemple que 780 000 Burundais ont souffert de mal de dos.
Quid du contenu du PSRB ?
Le PSRB 2023-2027 a été élaboré en suivant les axes de la stratégie « Réadaptation 2030 », initiée par l’OMS en 2017 et intitulée « renforcer la réadaptation dans le système de santé ». Cette stratégie s’appuie sur les 6 piliers constitutifs du système de santé :
– Renforcer la Gouvernance et le leadership du développement de la réadaptation
– Assurer le financement de l’offre et de la demande de soins
– Former les ressources humaines de la réadaptation
– Produire et utiliser de l’information permettant la prise de décision en réadaptation
– Développer un réseau d’infrastructures (de service de soins) en réadaptation
– Rendre plus accessibles les technologies d’assistance en réadaptation (prothèses, orthèses, fauteuils roulants, aides visuelle et aide auditives)
Qu’est ce qui a déjà été fait au Burundi ?
Le Dr Jean de Dieu Havyarimana, Médecin directeur du Programme National Intégré de Lutte contre les Maladies Chroniques Non-Transmissibles (PNILMCNT), a énuméré les réalisations déjà enregistrées au Burundi dans ces 6 domaines de développement de la réadaptation :
Pilier 1 : Gouvernance :
– Deux plans stratégiques en réadaptation ont été élaborés et adoptés par le MSPLS (2011-2015 et 2019-2023)
– un service chargé du développement de la réadaptation a été créé au MSPLS en 2017
Pilier 2 : financement de l’offre et de la demande de soins :
– le MSPLS et les hôpitaux publics et privés du pays financent de plus en plus la création de services de réadaptation à travers tout le pays
– les mutuelles et assurances-santé publiques et privées collaborent avec un nombre croissant de centres et service de réadaptation
Pilier 3 : formation des professionnels de la réadaptation :
– Depuis 2008 un noyau de 16 kinésithérapeutes-cadres a été formé à l’extérieur (Bénin, Belgique, Chine) au niveau licence, master et doctorat.
– Ces ressources humaines, de retour au pays ont permis la création du centre National de Référence en Kinésithérapie et réadaptation (CNRKR) à Bujumbura en 2016
– Elles ont également permis la création d’une école nationale en Kinésithérapie à l’INSP de Bujumbura en 2019 qui vient de produire sa seconde promotion de 19 diplômés
Piler 4 : production et utilisation d’information en réadaptation :
– 20 centres et services de réadaptation du pays utilisent le logiciel de dossier médical informatisé « Open Clinic – réadaptation »
– Cela permet la transmission annuelle d’indicateurs « réadaptation » vers le Système National d’Information Sanitaire (SNIS) du MSPLS
Pilet 5 : Développement d’un réseau d’infrastructures en réadaptation
– Le Dr Havyarimana a mentionné 43 centres et services de réadaptation hospitaliers publics, confessionnels ou privés qui fonctionnent en 2023sur l’ensemble du territoire, contre une petite dizaine seulement en 2010.
Pilier 6 : Accès aux technologies d’assistance en réadaptation.
C’est le principal point faible du Burundi a déploré le Dr Havyarimana. « Il n’y a que 4 orthoprothésistes diplômés dans le pays, quatre centres d’appareillage orthopédique. Il n’y a presque aucune prise en charge du coût des orthèses et prothèses.
Il n’y pas de fauteuils roulants fabriqués dans le pays (seulement des tricycles). Il n’existe qu’un seul centre (privé-cher) pour la fourniture d’appareils d’aide auditive. Il y a très peu de centres pour la fourniture de lunettes de vue.
Dans le processus de renforcement de la réadaptation dans le système de santé, Dr Havyarimana s’est réjoui de ce qui a été accompli par le Burundi tout en attirant l’attention sur ce qui reste à faire au niveau de chaque pilier.
Réagissant sur le contenu du PSRMB les participants ont salué ledit plan, qui selon eux, va apporter une bouffée d’oxygène dans la réadaptation au niveau de la santé.
Ils ont recommandé la vulgarisation de ce plan jusque dans les communautés à la base.
Au moins ça… Si la Ministre va signer le projet sans demander sa part ! Ce qui risquerait de voir le projet avalé par une Ministre et ses DGs et finalement rien sur terrain pour le Peuple malade.