L’ancien secrétaire général du conseil des sages du parti Cndd-Fdd fait encore parler de lui. Après avoir juré que ce parti n’a pas volé les élections de 2010, il se rétracte aujourd’hui et accuse.
<doc6763|right>Après une période de silence, Manassé Nzobonimpa, ancien député de l’East African Legislative Assembly, revient à la charge. Il affirme que les dernières élections de 2010 au Burundi ont été fraudées à l’intérieur de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) sous la supervision du parti au pouvoir.
Dans cette déclaration, il parle d’un ivoirien et de Clotilde Niragira, actuellement ministre de la Solidarité, dépêchés à la CENI pour superviser l’opération de fraude baptisée « Bacemwo ».
D’après Nzobonimpa, sept personnes auraient été à la tête de cette opération. Pour lui, il n’y a aucun doute que les élections de 2015 seront également manipulées.
Pourtant, en juin 2011, Manassé Nzobonimpa avait rejeté, la main sur le cœur, toute idée de fraude électorale. Dans une interview exclusive accordée au journal Iwacu, il avait juré, « au nom du Seigneur », qu’il n’y a pas eu de tricherie. « (…) Que les Burundais l’entendent et que le monde entier soit informé. Je le répète : il n’y a pas eu de fraude électorale. Je le dirai jusqu’à ma mort… Il n’y a pas eu de fraude électorale. Dieu m’est témoin. Je ne soutiendrais donc jamais ceux qui accusent le parti présidentiel. »
Des contradictions qui gênent
Mais le 3 janvier 2013, surprise générale. Nzobonimpa, dans une lettre au représentant spécial du secrétaire général des Nations unies au Burundi, il écrit :
« Les fraudes ont été organisées au niveau du fichier électoral, au moment où des responsables politiques et autres partenaires braquaient leurs yeux sur le terrain et dans les bureaux de vote.(…) Tout ce qui est relatif au fichier électoral est resté l’affaire de la CENI et du CNDD-FDD qui devraient collaborer avec le gestionnaire, un ressortissant de la Côte d’Ivoire. Clotilde Niragira, alors ministre de la Justice, a été vite déployée par le Président Nkurunziza à la CENI afin de travailler à huis clos avec le gestionnaire du fichier électoral, l’Ivoirien. Et ce, à partir d’1h à 4 heures du matin. »
L’ADC-Ikibiri s’est déclarée réconfortée dans les dénonciations qu’elle a faites depuis les dernières élections, et ne cache pas sa crainte pour celles de 2015.
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Analyse
On peut se poser des questions sur la bonne foi de Manassé Nzobonimpa quand il déclare que le Cndd-Fdd a « volé les élections de 2010 ». Il y a moins de deux ans, il jurait qu’on peut accuser ce parti de tous les maux, sauf de fraude électorale.
Cependant, des circonstances atténuantes plaident en sa faveur. Lors de ses premières déclarations, il ne pouvait pas accuser de fraude un parti dont il était encore parmi les dirigeants.
Aujourd’hui, s’agit-il d’une simple vengeance, ou les déclarations de M. Nzobonimpa obéissent-elles à une certaine logique ? En effet, ne peut-on pas penser qu’il a dénoncé cette fraude électorale après la reconduction dans la nouvelle CENI de deux personnalités contestées ?
Le silence de la CENI et du parti au pouvoir face à de telles accusations est troublant. La meilleure solution serait une enquête pour vérifier la véracité de ses dires. En tout état de cause, Manassé Nzobonimpa tente de fragiliser la forteresse Cndd-Fdd, mais il risque de provoquer la radicalisation de ses anciens compagnons d’armes.