Le ciment est devenu un produit rare depuis plusieurs mois à Bujumbura et dans les provinces. La Buceco n’est plus en mesure de satisfaire la demande et le Burundi doit importer pour combler le déficit, mais les importateurs déplorent le manque de devises. L’Olucome propose des solutions.
Lundi 27 décembre. Sur 5 points de vente visités au quartier Asiatique, seulement un vend du ciment. Même celui-ci n’a pas le ciment Buceco, il propose le ciment importé, dit « Dangote » et le sac de 50 kilogrammes se vend à 42.000 francs burundais.
La plupart des commerçants rencontrés font savoir que le ciment de type Buceco ne fait plus partie des marchandises qu’ils vendent. « De longues files d’attente des clients se forment devant le magasin d’un commerçant qui parvient à obtenir une petite quantité du ciment et il est raflé dans une fraction de seconde », confie F. I., commerçant de matériel de construction.
P. K., une autre vendeuse du ciment, assure que pour avoir un sac de 50 kg de type Buceco, tu dois l’acheter à 30.000 francs burundais au lieu de 24.500 francs burundais ou on te donne à 28.000 francs burundais un sac de 47 kg. « Et cela se fait dans le secret ».
Les portefaix sont désœuvrés et ne savent plus comment nourrir leurs familles. T. N., l’un des portefaix ne cache pas sa peine : « Depuis deux jours, je n’ai chargé ou déchargé aucun sac de ciment. Pourtant, ma femme attend de l’argent pour aller s’approvisionner au marché surtout avec ces fêtes de fin d’année.»
Les chantiers dans différents quartiers sont aux arrêts faute du ciment. Les ingénieurs interrogés expliquent qu’ils ne sont pas en mesure d’acheter un sac de ciment à 30.000 francs burundais. Ils disent que ceux qui ont les moyens ont abandonné Buceco et utilisent actuellement Dangote.
Les importateurs déplorent le manque de devises
La plupart des importateurs du ciment regrettent le manque de devises pour augmenter la quantité importée. « Avec ces constructions qui poussent comme des champignons, la demande est croissante, mais les devises nous font défaut. Nous sommes obligés d’importer une petite quantité malgré la forte demande due à l’insuffisance de ciment produit localement par Buceco », confie l’un de ces importateurs sous couvert d’anonymat.
Selon lui, ils sont obligés de recourir au marché parallèle pour avoir les devises et parfois, les cambistes n’ont pas la quantité dont ils ont besoin. « Cela nous causent des retards dans l’approvisionnement ».
La quantité du ciment importée a augmenté de plus de trois fois depuis le mois de janvier jusqu’au mois de mars, passant de 4.503 tonnes à 15.676,4 tonnes. Et depuis le mois d’avril, la quantité importée a continuellement diminué, passant de 12.516,3 tonnes au mois d’avril à 11.194,9 tonnes au mois de mai, pour atteindre 5.719,6 tonnes au mois de juin.
« Avec toutes ces initiatives, il n’y aura plus de pénurie du ciment »
Venant Ngendabanka, directeur général du commerce au sein du ministère du Commerce, du Transport, de l’Industrie et du Tourisme (MCTIT), reconnaît que depuis un certain temps, se manifeste une pénurie du ciment.
« Lors d’une conférence de presse animée par la ministre du Commerce en présence des représentants de Buceco, en octobre dernier Buceco a fait savoir qu’elle n’est plus en mesure de satisfaire la demande en ciment. Néanmoins, elle a promis de doubler la production afin de satisfaire la demande intérieure avant le mois d’octobre 2022 », confie M. Ngendabanka.
Pour lui, la situation s’est empirée à cause de la spéculation de certains commerçants: « Buceco n’a pas revu à la hausse le prix du ciment. Pourtant, on trouve que parfois le prix officiel du ciment n’est pas respecté ».
Il fait savoir que le ministère en charge du commerce est à l’œuvre pour que la quantité disponible soit facilement accessible et vendue au prix officiel. « Il y a un service chargé du commerce intérieur qui supervise la distribution du ciment et les commerçants qui font la spéculation sont soit rayés de la liste des grossistes, soit sommés de payer l’amende », ajoute M. Ngendabanka.
Il demande également à la population de dénoncer à temps, les commerçants qui vendent le ciment au prix supérieur à 24.500 francs burundais, le prix officiel. « Actuellement, ils peuvent informer les administratifs à la base. Et bientôt, le ministère va mettre en place un canal de réception des plaintes de la population ».
M. Ngendabanka affirme que le ministère du Commerce facilite l’octroi du code importateur pour les commerçants qui veulent importer le ciment. De surcroît, il y a une société de cimenterie en provenance de la Zambie qui veut implanter sa succursale au Burundi. « Avec toutes ces initiatives, il n’y aura plus de pénurie du ciment ».
Gabriel Rufyiri : « Il faut un système de rapatriement des devises et une restructuration de leur gestion »
S’approvisionner en ciment est devenu un casse-tête ces derniers mois. L’Observatoire de Lutte contre la corruption et les malversations économiques (Olucome) propose des solutions. Interview avec Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome.
Comment se présente la situation actuellement ?
Le ciment est quasiment introuvable dans plusieurs points de vente depuis presque une année, dans la ville de Bujumbura. Le monopole, le manque de devises sont les principales causes de la pénurie de différents produits. D’ailleurs, ce n’est plus un secret, de nombreux représentants des institutions financières ont révélé, lors du forum national sur le développement qu’ils n’ont pas de devises pour servir leurs clients.
Quelles solutions ?
Premièrement, l’Olucome trouve qu’il faut un environnement favorable aux affaires pour inciter les investisseurs étrangers et nationaux à investir au Burundi. Ces derniers pourront créer de nouvelles entreprises pour compléter la production de Buceco et ainsi satisfaire la production.
Deuxièmement, il faut démanteler le monopole des hauts dignitaires.
Plusieurs hautes personnalités du pays sont des commerçants et accaparent presque tous les marchés. Ils sont dans tous les secteurs du pays : ciment, sucre et des boissons de la Brarudi. Cela entraîne une concurrence déloyale, car aucun autre investisseur ne peut rivaliser avec eux.
D’ailleurs, il est nécessaire d’interdire à tout mandataire public d’exercer le commerce. Il faut qu’ils tiennent compte du principe d’incompatibilité. Normalement, les hauts cadres ne devraient pas faire le commerce. Mais, actuellement, c’est une triste réalité.
Une autre solution ?
Il faut un système de rapatriement de devises et une restructuration de leur gestion pour résoudre ce problème. Plusieurs sources de devises sont actuellement mal gérées d’où le manque de plusieurs produits qui nécessitent de devises pour l’importation.
Expliquez ?
La promotion des cultures d’exportation comme le coton, le thé et le café contribueraient sans doute à l’entrée de devises. Le secteur minier est aussi une source importante de devises, mais il est mal géré.
De plus, il faut normaliser les relations avec nos bailleurs de fonds afin de reprendre la coopération.
« Il faut un système de rapatriement des devises » Mr Rufyiri les choses ne sont pas aussi faciles pour le Burundi! « Il faut plutôt rapatrier les réfugiés » !!
@Papblo
1. Vous écrivez: » Il faut plutôt rapatrier les réfugiés » !!
2. Mon commentaire
A ce que je sache, le HCR facilite toujours le rapatriement des réfugiés burundais qui sont sous sa protection et qui veulent rentrer chez eux au Burundi.
Et puis je ne vois pas comment ce rapatriement va résoudre le problème de manque de devises.