Les ministres de la Santé et des Finances jettent la responsabilité de la pénurie de sang sur le directeur du Centre National de Transfusion Sanguine (CNTS). Ce dernier est accusé de n’avoir pas informé ses supérieurs de la rupture de stock des poches de prélèvement. Pourtant, selon lui, la commande date de mai 2014.
Que des victimes
Novembre 2014. C’est le délai que donne le ministère de la Santé publique et de la Lutte contre le Sida, pour que la situation reprenne son cours normal dans les stocks du CNTS.
28 août 2014. Devant les élus du peuple, Sabine Ntakarutimana, ministre de la Santé, persiste et signe qu’il n’y a jamais eu de mort suite à la pénurie du sang dans les hôpitaux du pays. Pourtant, la liste des victimes s’allonge.
Il y a deux semaines à l’hôpital Prince Louis Rwagasore. Une famille de Mwaro ne reverra plus sa chère Bénigne, épouse et mère. Elle meurt après accouchement dans le bloc opératoire suite à une hémorragie. Pourtant, d’après les membres de sa famille, elle avait décidé de venir à Bujumbura de peur d’avoir des complications dans un endroit dépourvu de matériel.
Fin juillet 2014 à Gitega, dans la commune Bukirasazi. Deux enfants, déclare Dr Wilson Bizimana, médecin directeur de l’hôpital Espoir de Kibuye, sont morts. Selon lui, l’hôpital ne disposait que de deux poches de sang alors que tout le Centre Régional de Transfusion Sanguine (CRTS) de Gitega n’en avait qu’une seule. D’après le directeur de l’hôpital Espoir, ces deux poches ne correspondaient pas à leurs groupes sanguins.
Lundi, 21 juillet 2014. Le Centre Régional de Transfusion Sanguine (CRTS) à Gitega n’avait que quatre poches de sang dans le stock alors qu’il a besoin de 100 poches par jour pour approvisionner les 17 hôpitaux du centre-est du pays.
Moïse Ntiburuburyo, président de l’Association pour la défense des droits des malades, signale que son association a été informée de la mort d’une femme également pendant l’accouchement : « Son mari nous a indiqué qu’elle a succombé suite à l’hémorragie, phénomène fréquent chez les femmes qui accouchent. Le médecin n’a pas pu la secourir malgré sa bonne volonté. »
Cependant, Dr Roland Willy Niyibizi, médecin provincial, indique qu’aucun cas de décès lié au manque de sang ne lui a été signalé.
Des opérations chirurgicales reportées
Dans différents hôpitaux du pays, témoignent des chirurgiens, des opérations ont été ajournées en attendant que ce problème soit réglé. « Nul ne peut prendre ce risque. C’est contre le principe de l’obligation de moyens du personnel soignant », confient-ils.
Ida Marebo, 38 ans, est alitée dans un hôpital de Bujumbura. Son garde-malade indique qu’elle attend depuis trois semaines pour se faire opérer les intestins. Ses cris de douleurs se font entendre jusqu’à l’entrée de sa chambre. Néanmoins, son médecin lui a recommandé de rester jusqu’à ce que le sang soit disponible. Mme Marebo, dans sa souffrance, balbutie qu’elle n’en peut plus : « Je préfère mourir au lieu de souffrir de la sorte. »
Elle n’est pas la seule. Il y a quatre jours, dans la chambre d’à côté, une enfant de cinq ans, racontent des patients, a trouvé la mort à cause du manque de sang pour la transfuser. La fillette souffrait d’anémie.