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Société

Pascal Ngendakuriyo: «En matière civile, la preuve incombe au demandeur»

17/01/2019 Commentaires fermés sur Pascal Ngendakuriyo: «En matière civile, la preuve incombe au demandeur»
Pascal Ngendakuriyo: «En matière civile, la preuve incombe au demandeur»

Dans une interview accordée à Iwacu, le président de la CSTB, la Cour Spéciale des Terres et autres Biens, s’exprime sur le bilan des réalisations de cet organe et les défis liés à son fonctionnement.

La Cour est au service des justiciables depuis quatre ans. Quel bilan ?

Je voudrais d’abord rappeler que la CSTB connaît en dernière instance les recours contre les décisions prises par la Commission nationale terres et autres biens. Elle est établie pour une durée de sept ans. Le bilan est satisfaisant.
Dans l’ensemble, au niveau des deux chambres de la Cour, nous avons 862 dossiers inscrits au rôle, 728 dossiers jugés et prononcés, soit un taux d’évacuation du rôle de 84, 45%. Le nombre de dossiers déjà exécutés définitivement est de 286 sur un total de 430 dossiers en état d’être exécutés, soit un taux de 66, 51% déjà exécutés.

La CSTB a aussi jugé les dossiers fonciers opposant l’Etat aux particuliers. A titre des résultats, 2 054 hectares 16 ares sont rentrés dans le domaine de l’Etat. La CSTB a également fait entrer 18 949 094 BIF dans les caisses de l’Etat.

Depuis sa création, la Cour s’est attelée à instruire avec célérité les dossiers dont les parties sont essentiellement des vulnérables comme les veuves, les orphelins, ce qui fait que d’après les statistiques 32% des justiciables constituent cette catégorie des vulnérables.

Y a-t-il justement l’instruction des dossiers sur terrain ou des audiences en itinérance pour permettre à ces vulnérables d’accéder facilement à la justice ?

Bien sûr. Pour plus de 90% de dossiers que nous instruisons, la Cour se transporte sur terrain. Et ces descentes bénéficient de l’appui du PNUD. L’instruction sur terrain facilite la tâche et la compréhension à nos juges. Car un dossier instruit sur terrain a beaucoup de chances d’être bien instruit qu’un dossier instruit au siège de la Cour.

Etant sur le lieu du bien litigieux, la Cour peut interroger, d’une façon spontanée, les témoins trouvés sur place, à côté de ceux que les parties ont présentés. La cour saisit cette opportunité pour voir les contours ou les bornes de cette propriété litigieuse. Ce qui facilite la tâche pendant le délibéré.

Certains justiciables, surtout les rapatriés, accusent la Cour d’exiger des documents des propriétés alors que ces derniers ont été détruits durant différentes crises. Qu’en dites-vous ?

En matière civile, la preuve incombe au demandeur. Il appartient donc à celui qui allègue que le bien lui appartient de le prouver. Toutefois, il n’y a qu’une seule preuve. Lorsque le juge constate que le requérant ne dispose pas de documents (acte de notoriété, contrat de vente), il lui demande de produire d’autres preuves.

Il peut amener des témoins. La Cour ne peut pas être prisonnier des pièces écrites. Il faut que le requérant parvienne à convaincre le juge. Pourvu que le juge parvienne à avoir l’intime conviction que la propriété lui appartient.

D’autres justiciables se lamentent affirmant qu’il y a une certaine lenteur dans le traitement des dossiers dont certains connaissent des remises ? Comment comptez-vous y remédier ?

L’instruction des dossiers se fait dans la sérénité et avec célérité. Toutefois, il y a d’autres principes qu’il faut respecter notamment le principe du droit à la défense. La loi précise que les remises ne peuvent pas excéder trois. Il peut y avoir plusieurs motifs qui puissent empêcher l’une des parties à ne pas se présenter à la Cour pour faire entendre ses droits.

Si on pouvait s’en limiter à une ou deux remises, on risquerait de compromettre le droit à la défense. La Cour évite d’instruire les dossiers avec une vitesse excessive pour ne pas compromettre le procès équitable à toutes les parties.

Des cas de rébellion contre l’exécution des jugements s’observent ici et là, comment expliquez-vous cette attitude ?

Heureusement, je dois avouer que les cas de rébellion contre l’exécution des arrêts rendus par la CSTB ne sont pas nombreux. Contrairement aux cas de rébellion qu’on observait auparavant au niveau de la Commission nationale terres et autres biens.
On peut avoir ici et là un cas de rébellion mais l’allure n’est pas inquiétante. Nous avons plutôt des cas très encourageants. Des cas où celui qui a perdu le procès approche la partie gagnante pour lui demander une portion de terre. Des cas où celui qui a gagné le procès accorde très facilement une portion de terre.

Pouvez-vous nous donner des cas concrets ?

Oui. Le cas s’est produit sur la colline Mukubano, commune Nyanza-lac, en province Makamba. Il s’agit du dossier RSTBA 0151 qui opposait Eliphaz Kabura à Joseph Mpigiye. Ce dernier a gagné le procès. Lors de l’exécution, Joseph Mpigiye a cédé le quart de sa propriété aux perdants.

Un autre cas s’est produit sur la colline Gitwe, en commune et province Rumonge. Il s’agit du dossier RSTBA 0108 qui opposait la succession de Ntamahungiro, représentée par Lameck Ngembo à celle de Dominique Niyongabo, représentée par Fidèle Ndayikengurukiye. Lors de l’exécution Lameck Ngembo a cédé 25m su 30m à Fidèle Ndayikengurukiye, une superficie où ce dernier avait érigé des maisons.

Les dossiers en rapport avec les autres biens tels que les comptes bancaires disparus, des biens meubles et immeubles accaparés ne sont pas encore abordés. Qu’est ce qui manque pour que ces dossiers soient traités ?

La Cour fonctionne à l’instar d’autres juridictions, c’est-à-dire que la Cour doit être saisie. Ce sont les dossiers qui manquent. Seulement, il y aurait quelques cas au niveau de la Commission nationale terres et autres dont les voies de recours ne sont pas encore terminées pour que celui qui se sentira lésé puisse faire recours au niveau de la Cour.

Mais tant qu’on n’a pas ces cas, on continue à recevoir les litiges fonciers. On a déjà connu un seul cas relatif aux autres biens. L’objet du litige était une vache. Le cas s’est produit à Matongo.

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