En présence de quatre membres du gouvernement, les représentants du peuple ont analysé ce mercredi 10 octobre, le rapport sur les activités de la CVR. Ils ont constaté que cette commission, en fin de mandat, est encore à la phase préparatoire.
Une reconduction de quatre ans avec possibilité d’extension en cas de besoin. Cette recommandation a été formulée par les parlementaires, ce mercredi 10 octobre, au sujet de la CVR. Les deux chambres du Parlement, réunies en congrès, évaluaient un rapport provisoire des réalisations de cette commission, deux mois avant l’expiration de son mandat.
Pour rappel, ce dernier prendra fin le 10 décembre prochain. La loi de mai 2014 régissant la CVR prévoit notamment une prolongation d’un an à la requête de ses responsables.
Ce mercredi, l’appréciation est loin d’être positive au Palais des Congrès de Kigobe. Devant entre autres les ministres de l’Intérieur, de la Justice, de la Sécurité publique et celui en chargé des Droits de l’Homme, Daniel Gélase Ndabirabe, président de la commission permanente à l’Assemblée nationale chargée des affaires politiques, y va sans détour : «Visiblement, les activités proprement dites n’ont pas encore débuté, la CVR est à sa phase préparatoire».
Pour lui, la principale mission de la CVR, qui est celle de mener les enquêtes sur le terrain, n’a pas encore eu lieu. Le gros du travail abattu se limite à la recherche documentaire, qui n’est qu’une étape pré-opérationnelle.
Le député Ndabirabe estime que le rapport n’a été produit qu’à des fins spéculatives: «demander la prorogation du mandat et la majoration du budget allouée à la CVR». Il souligne que la loi prévoit un rapport définitif et non provisoire.
La commission en charge des affaires politiques propose l’amendement de la loi régissant la CVR, notamment en son article 4 portant sur le mandat et les modalités de prorogation de ce dernier, afin de permettre la décision dans ce sens.
Les élus du peuple convergent sur la reconduction
Après la restitution de l’analyse de la commission, les avis des députés et sénateurs abondent dans le même sens. Ils sont tous pour la reconduction de la CVR.
«Il convient que nous nous réconciliions, mais il faut avant tout que nous ayons connaissance de ce qui nous avait divisé», a souligné Révérien Ndikuriyo, président du Sénat.
Il estime que les crises cycliques qu’a connues le Burundi plongeraient leurs racines dans la période coloniale. D’où, il importe de proroger le mandat de la CVR pour qu’elle couvre la période coloniale.
Le député Pierre Célestin Ndikumana partage cette préoccupation. Pour lui, la CVR devrait se pencher en plus sur la crise de 2015. Pour rappel, le travail de la CVR se situe, selon la loi régissant ses missions, entre le 1er juillet 1962 (date d’indépendance) et le 4 décembre 2008, celle marquant la fin des hostilités.
Le député Ndikumana fait remarquer que la CVR se trouve devant un travail délicat. Au cas où le travail serait bâclé, il y a risque d’aggraver la situation. Ainsi, elle doit y aller avec prudence. «Ce qui compte n’est pas la clôture des activités mais plutôt la réussite».
Abondant dans le même sens, Agathon Rwasa, premier vice-président de la Chambre basse du Parlement, suggère déjà la prévision d’une nouvelle prorogation en cas de nécessité.
Tous les membres du gouvernement, présents à l’hémicycle, approuvent la requête des élus du peuples. «Toutes ces crises que nous avons traversées, c’est la création du colon», a martelé Pascal Barandagiye, ministre de l’Intérieur.
Il insiste sur «la découverte de la responsabilité de ce colon» afin de «le traduire devant la justice le cas échéant». Pour ce, l’élargissement du mandat de la CVR et de ses missions est d’une importance capitale. Cependant, M. Barandagiye invite la commission à être rapide et, si possible, présenter le rapport définitif avant la fin de son second mandat : «Les Burundais ont soif de la vérité».
«La CVR a travaillé dans la limite de ses moyens »
La CVR reconnaît qu’elle n’est pas parvenue à s’acquitter de tout son travail. Clotilde Niragira, secrétaire exécutif, justifie cet échec par l’insuffisance des moyens financiers et des ressources humaines.
D’après Mme Niragira, la CVR avait demandé 34 millions de dollars américains pour l’aboutissement de son plan stratégique concocté en 2015. Dans la foulée, des partenaires techniques et financiers étrangers en avaient promis plus de 10 millions de dollars. Cependant, aucun n’a tenu la promesse suite à la crise de 2015. Ainsi par exemple, explique-t-elle, le personnel nécessaire n’a pas été recruté.
La séance a été sanctionnée par une déclaration qui recommande notamment que les enquêtes de la CVR couvrent la période qui va de 1896, année d’arrivée des colonisateurs allemands au Burundi.