L’organisation ’’Parcem’’ (Parole et Actions pour le Réveil des Consciences et l’Évolution des Mentalités) doute de la faisabilité de la détermination du chef de l’Etat de réguler les prix des marchandises. Cette annonce a été faite à Mbuye, en province de Muramvya ce samedi 4 janvier.
« Aucun commerçant ne fixera plus les prix de son gré, sous peu le Gouvernement va s’en charger et il ne restera qu’à appliquer les tarifs, Il faut être prêt », a lancé le président de la République, Evariste Ndayishimiye. C’est au moment où il menace de dissoudre le ministère du Commerce s’il se montre incapable de réguler les prix des biens de première nécessité.
Que le produit soit local ou importé, a martelé le chef de l’Exécutif burundais, les prix seront fixés et il va falloir les respecter « Les contrevenants s’exposeront à des sanctions. Nul par ailleurs au monde, aucun commerçant ne fixe les prix de ses produits comme bon lui semble. Cela ne se fait qu’au Burundi comme s’il n’y avait pas d’autorité. Tout cela est fini maintenant ».
Mais la plupart des économistes approchés sont unanimes. Ils renvoient au chapitre III de la Liberté des prix du Code burundais du commerce dans son article 4, il stipule que les prix des biens et services doivent être « librement déterminés par le jeu de la concurrence », un principe qui garantit la liberté aux commerçants tout en favorisant un marché compétitif, essentiel pour l’économie.
L’économiste Jean Ndenzako fait savoir que « le code de commerce révisé consacre la libre concurrence pour le commerce des biens, services et produits. » Selon lui, seul le respect de la loi doit primer.
La volonté exprimée par le Chef de l’État Evariste Ndayishimiye de réguler les prix des marchandises suscite des réserves du côté de l’organisation militant pour la bonne gouvernance ’’Parcem’’.
Bien que cette idée puisse sembler idéale, cette organisation estime que ce désir du chef de l’Etat risque d’être « difficilement applicable dans le contexte actuel du pays ».
« Il y a des risques liés à la régulation des prix »
Pour cette organisation, il y a des défis liés à la mise en œuvre d’une telle mesure. « D’abord, par principe, la régulation des prix devient plus pratique quand il y a un monopole ou un oligopole où quelques individus se partagent le marché face à de nombreux acheteurs. Or dans le cas présent, on a plusieurs offreurs et acheteurs. En plus, les circuits d’approvisionnement sont différenciés. En effet, certains sont de l’intérieur, d’autres de l’extérieur ».
L’organisation Parcem met également en avant les contraintes logistiques et structurelles qui pourraient compliquer davantage l’application de cette régulation. « Par exemple, l’entrée de tous les produits dans la ville de Bujumbura n’est pas maîtrisée, sans parler des difficultés de transport liées à la pénurie du carburant. Il y a un risque de voir ces produits se raréfier et les prix n’auraient qu’à exploser beaucoup plus », a-t-elle averti.
Face à ces défis, l’organisation Parcem en appelle à une réflexion approfondie et à une coordination des actions pour éviter d’aggraver la situation économique et sociale du pays.
L’annonce du président de la République de sa volonté de permettre à l’Etat de fixer les prix, a suscité des inquiétudes chez les commerçants de Bujumbura, la plupart disent redouter un effet dissuasif sur les investisseurs et une déstabilisation du marché.
« Je pense que cette décision ne sera pas facile à mettre en œuvre. Je ne comprends pas comment le gouvernement pourrait fixer les prix des produits sans consulter les commerçants. Est-ce qu’ils ont fait le tour de tous les marchés pour demander les prix d’approvisionnement ? », a lâché N.N., un commerçant rencontré dans un magasin du centre-ville de Bujumbura.
Jean partage son avis, il estime que cette décision restreint la liberté d’approvisionnement des commerçants. « Comment est-ce que le gouvernement peut se mêler de mes marchandises importées de l’extérieur du pays ? Par exemple, je peux m’approvisionner en Tanzanie du même produit que celui qui s’est approvisionné à Ngozi. Est-ce qu’on doit vendre au même prix ? », s’est-il interrogé.
Selon lui, le gouvernement devrait d’abord résoudre le problème de carburant afin de stabiliser les prix. « Je trouve que le problème à résoudre est la disponibilité du carburant en premier lieu. Cela permettra de stabiliser les prix. Celui qui s’approvisionne à l’intérieur du pays fixe le prix en fonction des dépenses qu’il a enregistrées ».
Bien que dubitatifs, la plupart des consommateurs rencontrés au centre-ville de Bujumbura se disent heureux et saluent cette annonce du gouvernement pour cette initiative. « Pourvu que ce soit mis en application ».
Pour eux, certains commerçants ont profité de la situation pour gonfler les prix. « Je suis content d’avoir eu cette nouvelle que le gouvernement compte s’impliquer dans la fixation des prix des produits de première nécessité ».
Au fait, renchérit Marc un autre consommateur approché, il y a certains vendeurs qui profitent de la conjoncture actuelle. Imaginez, par exemple, pour le prix du haricot, il y a ceux qui ont ajouté 300 BIF sur le prix du kilo, cela dépend du quartier. « Si cette régulation venait à être mise en application, les choses seront claires pour nous les acheteurs, nous allons nous rendre au marché tout en sachant les prix de produits à l’avance ».
Rappelons que lors de l’émission publique du 27 décembre 2024, le président de la République a donné un délai de 15 jours aux cadres du ministère du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme, pour régler le problème de spéculation sur les prix. En cas d’échec, le chef de l’Etat a annoncé qu’ils seraient démis de leurs fonctions.
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