Vendredi 22 novembre 2024

Santé

Paludisme au Burundi : « loin de l’éradication »

30/04/2022 1
Paludisme au Burundi : « loin de l’éradication »
Des mamans qui gardent leur enfant souffrant du paludisme à l’hôpital de district de Kamenge

Alors que le monde a célébré la 15ème Journée internationale de lutte contre le paludisme, le constat est qu’il reste un problème de santé majeur au Burundi. Sans chiffres actualisés, les acteurs dans la lutte estiment que le combat doit se poursuivre.

Vers 7h45 à l’hôpital du district sanitaire de Kamenge, jeudi 28 avril 2022. Presque tous les services sont ouverts. Les membres du personnel continuent d’arriver. Des patients attendent des consultations, d’autres sont hospitalisés comme c’est toujours le cas d’ailleurs.

A la pédiatrie vers 9h20 de ce 28 avril, beaucoup de mamans, plus d’une quinzaine, gardent leurs enfants malades de diverses maladies. Et les infirmiers et aides-soignants s’activent. « 5 parmi eux souffrent du paludisme », confiera une infirmière.

A la médecine interne, c’est-à-dire chez les adultes, notre source fait savoir qu’il y avait 12 personnes hospitalisées dont 8 souffrant de paludisme. Parmi les malades, des cas graves sont signalés. « Il y a ceux qui ont atteint le stade de l’anémie ».

Constance Habonimana, originaire de Mubone en zone de Buterere qui garde son enfant de six ans à l’hôpital de district dit qu’il a amené son enfant en situation critique, il y a 4 jours. « Heureusement, il se rétablit petit à petit », se réjouit cette mère de 7 enfants. Elle reconnaît qu’elle et ses enfants ne se couvrent pas de moustiquaire imprégnée d’insecticide.
Un homme qui a son enfant de 10 mois malade du paludisme, lui, soutient que lui et sa famille ont des moustiquaires bien que son enfant soit malade. « Les moustiquaires ne protègent pas à 100 % ».

Des actions menées pour la lutte
A cet hôpital du district, se trouvent aussi les bureaux du chef de district Nord de Bujumbura. Bénigne Ndikumana, superviseure dans les hôpitaux et dispensaires du district reconnaît que le paludisme est la principale cause de décès dans son district.

Mais, rassure-t-elle, des actions sont menées pour lutter contre cette maladie. « Le district sanitaire donne des moustiquaires aux femmes enceintes qui font la consultation prénatale pour la première fois afin qu’elles se protègent avec leurs enfants, elles reçoivent aussi un comprimé qui protègent le fœtus, afin que leurs bébés ne naissent pas avec cette maladie », annonce Bénigne Ndikumana.

Les enfants qui sont vaccinés contre la rougeole bénéficient également de moustiquaires imprégnées d’insecticide. « Elles sont  distribuées  gratuitement et c’est toujours disponible pour ces bénéficiaires ciblés ».

Ce n’est pas tout comme actions menées au district de santé du nord de Bujumbura. La superviseure du district souligne que les agents communautaires font des sensibilisations sur la lutte contre le paludisme. D’après elle, le district fait tout pour lutter contre le paludisme : la prévention, le traitement, le diagnostic, etc.

Albert Mbonerane, président de l’association Action de Lutte contre la Malaria (ALUMA), reprenant le rapport de situation d’OCHA sur la période de 2021, fait remarquer que le Burundi n’est pas encore au point d’éradiquer le paludisme.

En décembre 2021, reprend Albert Mbonerane, près de 5,7 millions de cas de paludisme ont été recensés au Burundi. Pour lui, les choses ne changent pas beaucoup.

Il juge que le combat continue et qu’il faut mettre ensemble les énergies pour éradiquer cette maladie qui est la première cause de mortalité au Burundi.
D’après lui, le paludisme est lié au changement climatique. « Plus il y a l’augmentation de la température plus il y a beaucoup de prolifération des moustiques ».

D’après lui, les pluies torrentielles qui s’observent aussi favorisent des eaux stagnantes qui occasionnent à leur tour la multiplication de moustiques. «Si nous ne protégeons pas l’environnement, et que la température continue de monter, les cas des décès risquent d’augmenter ».

M. Mbonerane regrette que les certains patients recourent encore au sorcier. Pour atténuer les risques du paludisme le président de l’association ALUMA propose la sensibilisation sur toutes les collines pour dire à la population que la malaria guérit quand elle est soignée à temps à l’hôpital.

Sylvain Habanabakize, chargé de plaidoyer au Cadre d’Expression des Malades (CEMABU), soutient aussi que le paludisme est un problème de santé majeure au Burundi.

Il affirme comme le président d’ALUMA que le nombre de décès dus à la malaria a baissé en 2021. « En 2021, le nombre de décès a diminué de 41%, soit 1.519 décès jusqu’en date du 12 décembre, contre 2.589 décès à la même date en 2020 », rappelle Habanabakize, citant aussi le rapport d’OCHA.

Le vaccin n’est pas pour bientôt

Pour que la baisse progressive des décès observés en 2021 continue, le CEMABU propose des stratégies comme l’intensification du front stratégique entamé par le gouvernement à savoir la Campagne de Distribution de moustiquaires (CDM), la pulvérisation intra domiciliaire (PID), l’organisation, au moins une fois le trimestre, des caravanes de sensibilisation sur la lutte contre le paludisme, etc.

Le ministère de la Santé publique n’a pas encore publié des chiffres actualisés des cas de paludisme. Dans un communiqué du 24 mars, la ministre Sylvie Nzeyimana reconnait que le paludisme reste un problème de santé publique. « Nous devons continuer à tout faire pour que toute la population soit protégée contre le paludisme ».

Elle regrette que bien que l’Organisation mondiale de la santé ait annoncé l’existence des vaccins contre le paludisme, ils ne puissent pas parvenir à tous les pays dont le Burundi. « Ils ne sont pas encore suffisants ».

Néanmoins, elle révèle que beaucoup d’actions ont été réalisées en vue de lutter contre cette maladie. Il s’agit notamment de l’adoption de nouveaux médicaments antipaludiques, tout faire pour que les médicaments et les équipements ne manquent pas ainsi que la formation des agents de santé communautaires pour soigner les enfants de moins de 5 ans dans leurs communautés.

La journée internationale de lutte contre le paludisme sera célébrée vendredi 6 mai à Muyinga.

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