Le Forum pour la conscience et le développement (Focode) condamne l’usage de la force pour appliquer la décision de la CNTB il y a trois jours de cela, dans le quartier 5 à Ngagara. Pour Pacifique Nininahazwe, son président, la commission a dévié de sa mission de réconciliation des burundais et demande sa suspension.
« Quel intérêt a le gouvernement de réhabiliter une famille dans ses droits tout en jetant une autre dans la rue ? Le nouvel acquéreur profitera-t-il de sa nouvelle maison ? » s’interroge Pacifique Nininahazwe, dans une conférence de presse tenue ce 30 mai à la maison de la presse. Pour lui, il fallait toute une ‘’pédagogie » pour éviter l’incident de ce 28 mai et les parties en conflit seraient sorties gagnants-gagnants. « Il faut que la Commission, insiste-il, distingue clairement les acquéreurs de bonne foi, les vrais spoliateurs et les rapatriés. » Pour appliquer la décision, le Focode trouve que la CNTB devait suivre tout le processus en justice pour qu’elle ne soit pas remise en cause. Elle privilégie, s’étonne Pacifique Nininahazwe, les seuls intérêts des rapatriés et oublie qu’en plus de restituer, il doit réconcilier.
Loi fondamentale, accord d’Arusha, … violés
« L’expulsion de la famille Justin Nyakabeto est contraire à l’article 36 de la Constitution du Burundi », regrette le président du Forum. Cette clause stipule que {« nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, dans le cas et la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité ou en exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée. »
Cette expulsion, poursuit le Focode, a aussi violé l’accord d’Arusha qui reprend le même article dans son protocole IV de ‘’Reconstruction et Développement’’ et les principes internationaux en la matière.
Dans ce même protocole, l’article 9 préconise la création d’un fond national des sinistrés qui serait alimenté par le budget national et par des dons d’organismes de coopération bilatérale et multilatérale ou des aides ONG. Alors que le porte-parole du gouvernement a déclaré sur les ondes des radios que c’est impossible de dédommager toutes les victimes, le Focode trouve qu’il ignore l’accord d’Arusha : « La CNTB, rappelle M. Nininahazwe, aurait commencé ses activités après la mise en place de la Commission Vérité et Réconciliation, le Tribunal Spécial ainsi que ce fonds pour les sinistrés. »
Le Focode demande la suspension de la CNTB
Le Focode interpelle les décideurs politiques et surtout le président de la République à se pencher sur la question sans faux-fuyant. Il demande aux forces de défense et de sécurité de faire preuve de professionnalisme, aux victimes lésées par les décisions de cette Commission de privilégier les vois de la non-violence et de la justice, à la jeunesse de ne pas tomber dans des discours ethniques. Ce Forum recommande l’amendement de la loi régissant la CNTB et sa suspension du moment où son travail est contesté et est à l’origine des tensions communautaires. « La restitution n’est pas toujours une solution juste. L’indemnisation juste et équitable peut parfois mieux réparer les torts », conclut Pacifique Nininahazwe. Optimiste, il garde un espoir que ces les cris de ceux qui appellent au changement dans la manière de faire du CNTB finiront par être entendus.