Une pénurie du ciment Buceco s’est observée au cours de ces deux dernières semaines. Les commerçants évoquent une offre insuffisante du produit. Une version contestée par la Société Buceco.
Il est 11 heures mardi 15 septembre au quartier « Asiatique », en commune Mukaza de la mairie de Bujumbura, un des milieux les plus réputés pour la vente des matériaux de construction. La majorité des commerçants rencontrés sur les lieux confirme la pénurie du ciment BUCECO.
N. T., un semi-grossiste du ciment BUCECO, manque de mots pour expliquer la pénurie du ciment : « Deux semaines que je n’arrive pas à m’approvisionner, pas le moindre sac. J’ai passé une commande il y a trois semaines, mais j’attends toujours que le produit soit disponible dans les stocks de mes fournisseurs. Ces derniers nous disent que leurs stocks sont vides et qu’ils attendent la livraison par Buceco.»
Ce vendeur du ciment indique que la pénurie du ciment Buceco a provoqué la hausse du prix des différents ciments importés de Tanzanie et de Zambie. C’est le cas du ciment dit « DANGOTE ». «Un sac de 50 kg s’achète à 35 000 BIF contre 32 000 BIF, il y a seulement trois semaines.» Le prix de Supaset ciment importé de Zambie est passé de 33 000 BIF à 36 000 BIF en moins de trois semaines.
P.K., un autre vendeur du ciment croisé dans le même quartier explique la pénurie du ciment par l’offre insuffisante de Buceco, la seule cimenterie du pays. «La production de Buceco ne peut pas couvrir la demande nationale qui augmente du jour au jour.» Certains grossistes cachent le produit pour le revendre à un prix exorbitant. Il affirme que des camions de Buceco approvisionnent certains grossistes du quartier. Ce qui est frappant, regrette-t-il, ces derniers dissimulent le produit et le vendent aux détaillants choisis.
Des informations recueillies sur place évoquent la hausse des prix du ciment importés par le manque de devise. Un des vendeurs affirme qu’il est difficile de trouver des devises pour passer une commande du ciment à l’extérieur du pays.
Offre insuffisante
Contrairement à la pénurie du ciment qui se manifeste dans le quartier asiatique, le produit est disponible à Kinama, quartier du nord de la capitale Bujumbura. Cette pénurie du ciment Buceco a provoqué la hausse du prix de ce denier. Alors que le prix officiel d’un sac de 50 kg du ciment BUCECO 32. 5 R est fixé à 24 500 BIF, ce dernier se vend entre 32 000 BIF et 30 000BIF en fonction de la quantité achetée.
Les commerçants expliquent cette hausse du prix du ciment par l’insuffisance du produit dans les dépôts des grossistes. Certains fournisseurs en profitent pour spéculer.
C.N., un commerçant rencontré au marché de Kinama affirme qu’il vend un sac de ciment Buceco 32.5 R à 30 000BIF pour un client qui achète moins de cinq sacs. «Ceux qui veulent une grande quantité déboursent 29 000 BIF.» Au début du mois, se souvient le commerçant, le prix d’un sac du ciment Buceco s’élevait à 24 500 BIF. Ce qui est sûr affirme le quadragénaire habitué à la vente du ciment, une pénurie de ce dernier se manifeste généralement pendant la saison sèche, période au cours de laquelle beaucoup de gens construisent des maisons.
Ce commerçant raconte, par ailleurs, qu’il ne vend pas du ciment à tous les demandeurs. «Je réponds à toute personne que je ne connais pas que la quantité disponible est déjà prise par d’autres clients.»
Les constructeurs des maisons sont dans le désarroi. «Ça fait deux semaines que je cherche là où je peux acheter le moindre sac de ciment,» lâche amèrement G. K., un ingénieur rencontré à Kinama. « Les maçons ont suspendu les activités de mon chantier. Ce m’inquiète davantage, c’est la saison pluvieuse qui risque d’endommager les murs déjà construits».
Avec une différence de 5 500 BIF par pièce sur un devis de 500 sacs, cet ingénieur chiffre le manque a gagné à 2 750 000 BIF. Ce constructeur dénonce l’inaction des autorités en charge du respect des prix. «Pourquoi l’administration et la police n’arrêtent pas les spéculateurs?» Là où le bât blesse, regrette-t-il, les commerçants vendent du ciment à un prix exorbitant au vu et au su de tout le monde sans être inquiétés. Il demande au ministère en charge du commerce de prendre des mesures pour juguler la pénurie répétitive du ciment qui s’observe surtout pendant la saison sèche.
« Simple spéculation »
Chrysologue Mutwa, le directeur général du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme, explique la pénurie du ciment Buceco par une simple spéculation de certains commerçants. «La quantité du ciment produit par Buceco est suffisante. 700 tonnes de ciment ont été distribuées lundi 14 septembre aux 20 grossistes répartis dans quatre provinces du pays.»
Le directeur général du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme, rassure les commerçants et les acheteurs sur la disponibilité du ciment à travers tout le pays : «La distribution de 805 tonnes du ciment se poursuivra mardi 15 septembre aux 23 grossistes répartis dans différentes provinces du pays.»
Ce haut responsable met en garde les commerçants spéculateurs : «La récréation est terminée. Il faudra qu’ils reviennent à l’ordre et respectent le prix officiel fixé à 24 500BIF. Le ministère a demandé la liste des grossistes à la société Buceco. Des sanctions exemplaires sont prévues pour les récalcitrants.» Et d’interpeller les autorités administratives à surveiller les prix fixés par le ministère.
Verra Izere, chargée de la communication à Buceco, assure que la production de ciment est suffisante : «Le produit est disponible dans le pays.» Le ciment Buceco doit être distribué de manière équitable à plus d’une centaine de grossistes répartis à travers tout le pays. Elle assure que sa société continue d’augmenter sa capacité de production : «Au début des activités de l’usine, une seule phase était fonctionnelle.» Aujourd’hui la deuxième phase tourne à plein régime. » Pour accroître son offre, fait savoir Mme Izere, la cimenterie prévoit bientôt la construction de la troisième phase de l’usine.