Dorine Niyongabo a misé toutes ses économies sur le lancement de son affaire à Ngozi. Depuis deux ans, elle prépare et commercialise avec succès des savons liquides de nettoyage.
Quand avez-vous démarré votre entreprise ?
Fin 2014. Après mes études en gestion et Comptabilité, j’ai réalisé qu’il allait me falloir un temps fou pour décrocher un job et je me suis dit : pourquoi ne pas démarrer ma propre affaire ? Je suis partie au Rwanda suivre une formation entrepreneuriale. J’ai eu la chance d’être formée dans différents domaines (fabrications de craies, préparations de différents jus, colorer des tissus blancs, créations des savons liquides…). J’ai choisi cette dernière option, en me disant que les ménages ont toujours besoin de faire de la propreté. J’offre également des shampoings pour cheveux et des désinfectants pour les mains. J’ai pensé que ces produits allaient se vendre assez rapidement.
Aviez- vous raison ?
Oh que si ! J’ai démarré avec un capital de 300.000Fbu. Trois mois plus tard, j’en étais à 1 millions de bénéfices. Je me suis même acheté une parcelle pour mieux économiser. Les affaires vont plutôt bien (rires).
Des difficultés au démarrage ?
La grande difficulté a été l’emballage. J’ai failli manquer de bidons pour conserver et stocker mes premiers savons. Le problème perdure, je continue à réutiliser des bidons et d’autres emballages plastiques qui ont déjà servi.
L’autre défi auquel je fais face actuellement est la visibilité. Je travaille dans un endroit à mon avis trop isolé, et je n’ai pas de point de vente au marché central de Ngozi, ce qui serait plus pratique pour mes clients.
Comment préparez-vous vos savons ?
Manuellement, à base d’acide sulfonique, d’acide caustique et de quelques parfums. Quant au mélange et au dosage … je me réserve le droit de ne pas les dévoiler (rires).
D’autres entreprises font les mêmes produits, quelle est la valeur ajoutée des vôtres ?
Mes savons enlèvent parfaitement la rouille, redonnent de l’éclat aux objets. De plus ils sont assez faciles à fabriquer. Deux jours de préparations et le savon est prêt. En tout cas les clients témoignent de leurs qualités.
La concurrence ne vous fait pas peur ?
Non (rires), elle te pousse plutôt à t’améliorer pour garder tes clients.
Justement quel est le profil de vos clients ?
Les ménages évidemment, mais aussi les banques, les hôtels et des commerçants de Ngozi. J’ai également quelques clients à Kirundo.
Où trouvez-vous la matière première ?
A part l’acide caustique que j’achète à Bujumbura, je m’approvisionne au Rwanda. C’est assez difficile actuellement à cause de la récente mesure qui interdit aux agences de voyages d’aller vers ce pays.
Et vos prix sont-ils abordables ?
Oui. Je vends le litre à 2000Fbu, cinq litres à 10.000Fbu
Quid de vos futurs projets ?
J’aimerais ouvrir des points de vente dans le Nord du pays (Muyinga, Kirundo, Kayanza) pour distribuer mes produits mais aussi pour générer de l’emploi. J’ai en outre un projet de fabrication de craies. J’avais déjà expérimenté cette production avec mon défunt père et je sais que c’est rentable. Dès que j’ai les moyens d’acquérir un meilleur équipement, je me lance.
Un message à la jeunesse ?
Avec un capital de 50.000Fb et un projet bien mûri on peut démarrer une affaire. Je suis disposé à donner des conseils entrepreneuriaux et des idées en la matière.
Bio express
Mariée et mère d’une petite fille, Dorine Niyongabo est née le 30 octobre 1989 dans la province de Ngozi. Après le cycle primaire à l’Ecole primaire Ngozi I, elle continue ses études à l’Institut Commercial et Administratif de Bujumbura dans la section Gestion et Comptabilité. Puis elle suit une formation entrepreneuriale à l’Eden Business Center au Rwanda. En 2014, elle lance Dorine’s beauty Product Company.
Témoignages
«Un résultat satisfaisant !»
Depuis peu cliente de Dorine Niyongabo, Safia Bugegene est satisfaite de ses premiers achats. Elle compte bien y retourner.
Mme Bugegene est tombé par hasard sur les savons liquides de Dorine’s beauty Product Company. Pour s’assurer de leurs qualités et de leur efficacité, elle a d’abord acheté un récipient de 500 ml à 2000 Fbu.
«Le résultat était plutôt satisfaisant. Comparé aux anciens produits que j’utilisais, ce savon est efficace et abordable. Je l’utilise dorénavant pour l’hygiène dans ma salle de bain. Il nettoie parfaitement le bac de douche et la lunette des toilettes »
Mme Bugegene compte continuer à utiliser les produits de Dorine Niyongabo : «Ses savons durent. J’invite les habitants de Ngozi à les essayer. En plus, son local est facilement accessible ».
Fini le chômage
Après une année d’inactivité, Jean Bosco Ndoreraho reprend sa vie en main grâce à Dorine Beauty Product Company.
Jean Bosco Ndoreraho est désormais l’un des trois employés de Dorine Niyongabo. «Cela fait maintenant deux mois que j’ai intégré l’équipe de Dorine. J’apprends de nouvelles choses et je suis reconnaissant», affirme ce diplômé en informatique de télécommunication- filière qu’il a suivie au secondaire.
Jean Bosco ne regrette pas cette reconversion. «Je fais tout le mélange des différents composants pour obtenir les savons. Du début à la fin je maîtrise maintenant la technique», assure M. Ndoreraho.
Il ajoute qu’il n’est jamais judicieux de sous-estimer un emploi aussi longtemps qu’il permet de gagner honnêtement sa vie. Et c’est le cas : «Le salaire que je perçois me permet de subvenir à mes besoins».
Conseils d’un Pro
«Prudence pour l’ouverture d’autres points de vente»
Pierre Claver Nduwumwami conseille à cette entreprise d’assurer une production constante avant d’enclencher une autre étape.
Pour cet expert dans le domaine entrepreneurial Beauty Product Company dispose de plusieurs atouts. C’est d’abord une entreprise innovante, et c’est d’ailleurs l’un des critères qui lui a récemment valu un prix de la part du BBIN. Deuxième atout, Dorine Niyongabo « a eu droit à des formations managériales et elle maîtrise parfaitement son domaine d’intervention ». Enfin M. Nduwumwami pense que cette entreprise a toutes ses chances d’accéder à un grand marché « car tout ce qui touche à l’hygiène, aux produits de beauté et aux détergents a un marché assuré ».
Aux difficultés d’emballages, M. Nduwumwami ne voit qu’une alternative à étudier minutieusement avant de s’y lancer : «Dorine Niyongabo pourrait penser à s’approvisionner en Ouganda. Mais j’admets que c’est coûteux. Envisager aussi d’autres pays comme la Tanzanie … ».
Pour ce qui concerne l’idée d’ouvrir de nouveaux points de vente, M. Nduwumwami prône la prudence : « Il faut d’abord que l’entreprise assure à sa clientèle une production constante en quantité et qualité. Et dans un premier temps elle devrait plutôt penser à des distributeurs indépendants ».
Courage à de telles personnes! Le Burundi en a besoin en grande quantité. Nous en avons marre avec les charlatans faux politiciens.