Faire fi de la culture d’excellence dans une société donnée, c’est répandre sur elle le souffle stérilisateur de la médiocrité qui produit à terme des adeptes de la culture de la loi du moindre effort intellectuel. Supprimer la compétition, cela revient à mettre la raison de toute une nation en berne. Quid du Burundi ?
<doc7310|right>Nous constatons une perversion de la lettre de l’Accord d’Arusha – source de la Constitution en vigueur – qui consiste à ne pas faire grand cas du mérite personnel au profit des considérations d’ordre politique, ethnique et régional dans le pourvoi d’une fonction apolitique. A cet égard, des candidats à des postes à l’Office burundais des Recette (OBR), qui ont passé avec succès les tests de sélection, n’ont finalement pas été retenus par l’entreprise. Sans oublier la volonté du pouvoir d’avoir un droit de regard sur le personnel burundais dans certaines organisations internationales, en faisant prévaloir les critères susmentionnés. Que d’anciens employés du Bureau Intégré des Nations unies au Burundi (BNUB) en ait fait les frais, est un secret de polichinelle.
Le parti présidentiel, depuis son accession au pouvoir, pratique ce que le politologue Achille Mbembe appelle la « fétichisation de la différence ». En l’occurrence, les caciques du Cndd-Fdd considèrent l’absence d’une intelligentsia interne au parti comme un atout au point d’en faire un critère de légitimité. L’ancien président du Cndd-Fdd avait qualifié sa formation politique de « parti du peuple » en lice contre le parti des élites, lors d’un meeting pour la campagne des législatives de 2010. Et pour cause, plus de 55% des Burundais sont analphabètes.
Dans cette "logique médiocrisante", nous avons franchi le Rubicon avec les concours national (sans problèmes à résoudre) et le test de la 10ème année sous forme de questions à choix multiples (QCM), édition 2012. C’est surtout vrai pour les finalistes du 1er cycle du secondaire qui doivent être évalués sur leur capacité de conceptualisation, notamment par les cours de français et de mathématiques. Car c’est une condition sine qua non à une pensée profonde et complexe.
Désormais, il s’agit d’une dynamique de suicide intellectuel, pour toute une nation, qui répond à cette question vertigineuse : "Peut-on rendre stupide tout un peuple ?" De surcroît, elle ne fait qu’alimenter, par le phénomène de la généralisation, dans certains milieux tutsi, l’idée saugrenue selon laquelle l’idée d’excellence est étrangère aux Hutu.