Dimanche 24 novembre 2024

Culture

OPINION – Parce que le Burundi le vaut bien

28/01/2016 9

20 personnalité ont répondu à l’appel d’Iwacu pour la liberté d’expression et la démocratie au Burundi. Chaque semaine, nous mettons à l’honneur un appel lancé par une personnalité. Nous invitons nos lecteurs à débattre avec nous sur les médias burundais. Après « Grand débat sur les médias burundais : 1972- 2015, Burundi au centre du continent africain », débattons maintenant avec Marie-France Cros sur « Parce que le Burundi le vaut bien »

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L’accès à cette édition spéciale est gratuit mais, si vous le souhaitez, vous pouvez acheter votre accès par solidarité envers les médias burundais.


Par Marie-France Cros

Marie-France Cros
Marie-France Cros

La liberté d’expression et celle des médias était un des principaux acquis des dix années de gouvernance CNDD-FDD. Récemment encore, juste avant l’explosion des protestations contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza, j’avais été frappée par le profond changement survenu à cet égard chez les Burundais au cours des années.

Dix, quinze ou vingt ans auparavant, il était habituel, pour un reporter étranger, de rencontrer des Burundais clandestinement. Une conversation sans témoin, au milieu d’un jardin, se déroulait à voix basse – qui baissait encore aux passages les plus compromettants pour le pouvoir alors en place – accompagnée de coups d’œil inquiets aux alentours. Jamais on ne parlait politique dans un endroit public ou devant témoin(s) – sauf les autorités en place, du moins lorsqu’elles vous servaient le discours officiel, parfois démenti en privé un peu plus tard.

Tout cela avait bien changé.

La liberté de presse exercée sous le CNDD-FDD n’a pas toujours été exemplaire : il y a eu des menaces contre des journalistes par des personnes en position d’autorité, et il y a eu des articles/émissions aux données non vérifiées, plus proches de la diffamation que de l’information, ou marqués par un constant parti pris sans alternative. A cet égard, il faut saluer l’effort d’Iwacu pour diffuser des avis divergents sur un sujet controversé et séparer l’information du commentaire, effort qui fait honneur à la profession.

Les restrictions à la diffusion des radios indépendantes proches de l’opposition, suivies de la destruction de médias, mettent en péril la liberté de la presse au Burundi, tandis que la violence de la répression des opposants au troisième mandat présidentiel compromet fortement la liberté d’expression individuelle.

Leurs promoteurs espèrent, par la peur, donner l’impression d’une unité nationale sur les problèmes de l’heure. S’ils arrivent à faire taire toutes les voix discordantes sur le troisième mandat, ils pousseront nécessairement leur effort un peu plus loin et feront taire toute divergence sur tous les sujets d’importance, comme cela s’est vu dans la plupart des pays placés dans la même situation.

Car le Burundi n’est pas la première nation dont les autorités sont tentées d’imposer un unanimisme de façade. Partout où cela se pratique surgissent des résistances – la passive, de presque tous, et la clandestine, des actifs – et des mouvements armés. Les régimes militaires tutsi au Burundi interdisaient toute mention de l’ethnie : cela a-t-il empêché des massacres ethniques, des milices ethniques, une guerre ethnique?

Comment repérer les mouvements profonds qui agitent la population quand chaque Burundais aura repris l’habitude de se taire? Il est bien connu que 80% des activités des services de renseignement des pays occidentaux consistent à… lire/écouter la presse. Le Burundi pourra-t-il jamais se payer autant d’analystes de l’information qu’il compte de journalistes aujourd’hui ?

Dans les pays sans liberté d’expression, la résistance passive de la population et les mouvements armés sont généralement peu à peu renforcés par le mécontentement croissant des citoyens devant le recul des performances nationales et la hausse de la misère. Car l’absence de liberté d’expression interdit tout débat public sur les questions fondamentales et chacun sait que c’est de la confrontation des idées que naissent les progrès et les succès.

Le CNDD-FDD est aujourd’hui placé devant un dilemme : préserver ses acquis, dont les libertés de presse et d’expression, ou rejoindre les cohortes de partis sans âme, fossoyeurs des libertés et des rêves de leur peuple.


Marie-France Cros

Journaliste à La Libre Belgique depuis 1981, elle a travaillé quelques années aux faits divers avant de passer à l’actualité internationale – Amérique latine puis Afrique. Elle suit l’actualité burundaise pour La Libre depuis 1988.

Forum des lecteurs d'Iwacu

9 réactions
  1. Je vois que cette journalistes s’interesse au Burundi depuis longtemps. Qu’elle nous dise le resultat de ses enquetes sur les differentes tueries commises par les partisans des colonisateurs Belges. Aurait-elle eu le courage de publier des infos sur ceux qui ont decapite la democratie et qui ont assassine les democrates hutus Burundais? Qu’elle me reponde SVP.

    • Yves

      Les colonisateurs ont quitté le Burundi il y a plus de cinquante ans. Cinquante, c’est aussi visiblement le nombre de neurones qui sont encore en état de fonctionnement chez vous… inutile de vous fatiguer à relayer la propagande gouvernementale sur ce site, personne ne vous accorde le moindre crédit 😉 contentez-vous d’aller toucher votre chèque

  2. Vunji

    Rwenyuza,
    Votre theorie qui consiste a tout nier au nom « de la souverainete nationale » (je suis etonne que vous ne l’avez pas mentionnee…) a des limites. Certes, le mensonge peut durer, mais pour combien de temps ici? Affirmer que tout observateur etranger qui « ne plaide pas en faveur  » de ce qui se fait aujourd’hui n’est pas credible est une faiblesse dangereuse. Et si demain, apres avoir termine toutes les cibles actuelles, la logique change vers ceux-la meme qui supportent tout corps et ame?

  3. Rwenyuza

    Cette dame n’est pas crédible, quand elle reprend les divagations de Mr Maingain concernant des génocides imaginaires au Burundi.

    En reprenant des images de FRANCE 3, cette dame n’a aucunement pas fait honneur à la profession de journalisme.

    Mais on peut le comprendre, rares sont les journalistes occidentaux qui travaillent pour le journalisme pur. Leur plume est toujours inclinée dans le sens des intérêt de leur pays d’origine. Ici, la Belgqique aurait voulu que Nkurunziza soit assassiné comme l’a été Rwagasore et Ndadaye.

    • Yves

      Tiens, un nouveau propagandiste du gouvernement… et toujours les mêmes non-arguments. Vous aurez au moins l’honnêteté intellectuelle de justifier vos (graves) accusations à l’encontre de la Belgique. Vous nous direz d’abord sur quels élements CONCRETS se basent vos accusations. Vous nous expliquerez ensuite quel est l’intérêt économique ou politique de la Belgique à éliminer Nkurunziza. Et enfin, vous nous expliquerez pourquoi la Belgique, qui a pendant dix années soutenu économiquement, mais aussi politiquement le gouvernement burundais, aurait si soudainement changé son fusil d’épaule. A défaut, nous serons obligé de vous considérer comme complice du gouvernement et des extrêmistes qui portent de telles accusations, dont – et tout le monde le sait bien – l’unique fonction est de détourner l’attention des crimes commis par les groupes proches du pouvoir… je suis impatient de lire votre réponse ^^

      • Rwenyuza

        Je suis pour le Burundi, Nkurunziza pourrait disparaître demain comme Rwagasore, comme Ndadaye et le Burundi restera avec ses problèmes et cela par la faute de quelques uns.

        Et quand on commence à traiter quelqu’un d’extrémiste, c’est que l’on est à cours d’argument. je suis extrémiste par rapport à quoi.

        Si la Belgique a financé le Burundi est ce pour les beaux yeux des Burundais qu’elle a fait où c’est uniquement pour ses intérêts dans la région. Et quand ses intérêts sont menacés, il est parfaitement normal qu’elle change son fusil d’épaule.

      • Bakari

        @Yves
        « Cette dame n’est pas crédible, quand elle reprend les divagations de Mr Maingain »
        Sans avoir aucune intention de minimiser ce que fait le gouvernement du Burundi, j’avoue que moi je trouve grave de diffuser de fausses informations pour décrédibiliser quelqu’un. Vous pas peut-être? Puisque vous n’y faites aucune allusion dans votre commentaire sur ce que écrit ce brave commentateur.

        • Yves

          @Bakari : Maitre Maingain n’a jamais dit qu’un génocide était en cours, il a dit que c’était un risque possible à court ou moyen terme. La nuance me semble importante ! Pour ma part, je pense que l’on devrait qualifier ce qui se passe de crimes de masse, car c’est avant tout l’opposition qui est ciblée avant tout profilage ethnique. Soit… . Je trouve par conséquent que cette dame, qui n’emploie pas le mot génocide au demeurant, a bien raison de s’inquiéter. Et vous nous expliquerez exactement quelles sont les fausses informations utilisées par Mme Cros dans cette carte blanche parce que moi, je n’en vois aucune…

    • Rwenyuza

      Vunji

      Il y a des problèmes au Burundi, personne ne peut le nier. Est ce que la solution passe par accréditer des conclusions qui découlent de l’étranger et de surcroit émanant d’une personne déjà mis en doute par ses publications! Je ne le pense pas.

      La solution du Burundi viendra des Burundais eux mêmes. Qu’ils apprennent d’abord à se dire la vérité en face à commencer par les hauts dignitaires des régimes passés. Buyoya, Bagaza, Simbananiye etc doivent parler vrais et éviter le langue de bois et de noyer le poisson.

      L’on déjà entendu ici et là de la bouche de certains Burundais disant que le Président Ndadaye s’est suicidé. Comment humainement parlant peut on supporter cela quand on connait les conséquences de sa mort.

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