Vendredi 14 mars 2025

Opinions

OPINION | Hosy, quand être “hybride” devient un crime

OPINION | Hosy, quand être “hybride” devient un crime

Par Majesté Barenga*

La guerre en République démocratique du Congo (RDC), bien qu’éloignée géographiquement, fait des victimes jusque dans les pays voisins, y compris au Burundi.

Ce lundi matin, alors que je prenais le train pour me rendre au travail, ma routine bien ancrée de veille médiatique m’a conduit à consulter les réseaux sociaux, comme à l’accoutumée. À ma grande surprise, je suis tombé sur une avalanche de messages haineux provenant de jeunes influenceurs burundais qui défendaient la position de leur pays dans le conflit en RDC et face au rôle du M23. Ces jeunes s’affrontaient en ligne avec d’autres influenceurs, situés de l’autre côté de la rivière Kanyaru, prenant la défense de la cause rwandaise.

Jusque-là, rien de vraiment surprenant : la liberté d’expression est un droit fondamental, même si certains propos peuvent parfois franchir la limite de la diffamation.

Ce qui m’a frappé, c’est la virulence des attaques dirigées contre une femme des médias bien connue dans le milieu du divertissement burundais. Elle s’appelle Hosy et dirige le studio Siren Vibes, qu’elle vient d’inaugurer avec fierté. Une telle réussite, particulièrement dans un domaine encore largement dominé par les hommes, est rare et mérite d’être saluée. Certes, nous ne sommes pas amies et nos chemins ne se croisent pas personnellement, mais j’ai suivi son parcours depuis ses débuts. Elle est l’une de ces femmes remarquables qui ont su briser les barrières et s’imposer avec brio.

Ce qui m’a profondément choqué, ce sont les torrents de haine déversés contre elle sur les réseaux sociaux. La raison ? Hosy est « hybride ». Parce que l’un de ses parents serait rwandais, certains la qualifient d’espionne, d’ennemie de l’intérieur.

J’ai vu, les larmes aux yeux, la vidéo qu’Hosy a postée. Dans son message émouvant, elle expliquait qu’être Burundaise et Rwandaise, ne devrait jamais être une malédiction. Personne ne devrait être traité de traître ou d’espion à cause de ses origines.

En lisant ses mots, j’ai ressenti une immense colère. Comment est-il possible qu’une jeune femme burundaise soit ainsi clouée au pilori simplement à cause d’un conflit qui se déroule au Congo ? Ne réalisent-ils pas qu’ils alimentent une spirale de violence, qu’ils appellent implicitement à un lynchage ?

Admettons, pour les besoins de l’argument, que l’un des parents de Hosy soit effectivement rwandais. Est-ce un crime ? Qui, parmi nous, a choisi ses parents ou son lieu de naissance ? Ceux qui ont grandi à Bujumbura savent à quel point le Burundi est un carrefour de cultures, un point de rencontre d’origines diverses. Nous avons tous des racines mêlées. Ce n’est pas un conflit extérieur qui devrait nous autoriser à détruire des vies et à semer la haine au sein de notre propre société.

Cette guerre en RDC, bien qu’elle ait des répercussions dans la région des Grands Lacs, ne doit en aucun cas servir de prétexte à de tels débordements.

C’est pourquoi je lance un appel à la jeunesse burundaise : prenez du recul. Réfléchissez avant d’agir. La géopolitique de notre région est d’une complexité que même les experts peinent parfois à démêler. S’en prendre à une jeune femme ambitieuse et déterminée comme Hosy, qui ne cherche qu’à faire prospérer son entreprise et à contribuer au rayonnement du Burundi, n’est pas la solution. Ce n’est pas en détruisant les individus que vous résoudrez les problèmes structurels de la région.

Aujourd’hui, c’est Hosy qui est visée. Mais demain, ce sera qui ? Un autre Burundais d’origine congolaise ? Un citoyen aux racines tanzaniennes ou métisses ? Ceux qui incarnent la diversité de notre pays doivent être protégés, pas persécutés.

Il est essentiel que les forces vives de la nation s’assurent que notre jeunesse ne soit pas emportée par l’ignorance et la haine. Une campagne de haine, même sur les réseaux sociaux, peut avoir des conséquences dramatiques dans la vie réelle.

À toi, Hosy, je sais à quel point cette période doit être douloureuse. Mais tiens bon. Tu n’as pas choisi tes parents ni tes origines. Reste concentrée sur ton business, sur tes projets et sur l’avenir que tu veux bâtir. Les épreuves d’aujourd’hui forgeront en toi la force des femmes qui marquent l’histoire.

Tu n’es pas seule. Le Burundi a besoin de ses talents hybrides, de ses esprits ouverts, et de cette richesse culturelle qui fait notre fierté.

*Les articles de la rubrique opinion n’engagent pas la rédaction

Forum des lecteurs d'Iwacu

9 réactions
  1. Anto Lumbu

    Au Congo nous n’avons pas un probleme ethnique; non elle non pas droit de dire ce dire ne connait pas.Je ne sais pas son ethinie mais elle n’a pas le droit de dire cela. On a un probleme de mauvaise gouvernance et un point et un trait.
    je sais que les femmes ne s’aiment aps si elle savez la souffrance des autres femmes du Congo elle ne commantairerez pas de cette facon

  2. Niyonkuru gilbert

    Fardeau lourd pour le Burundi,les militaires burundaises ont été impliquees dans le pillage des magasins à Bukavu,ils ont vidés les stations de carburants,quelle honte pour une armée régulière………mon Dieu.

  3. Hihi

    le Burundi, grand pays catholique,
    sera t il un jour voué à la dannation.
    La haine, les idées de génocides, le rejet de l’autre différent.
    Que tout être vivant soit respecté ́.
    Que le Pouvoir et l’Eglise s’investissent

  4. Gasore

    Oh lord, this is beyond comprehension. In all these « crusades » orgabnized by the Burundi leaders, prayers for unity, peace and eradication of all forms of blind hate and division should be at the forefront. The last group I could thought of uttering such nonsense were the young people, future generation and leaders of the country.
    Burundians living abroad, married to someone other than a Burundian, perhaps of a different race, culture, language etc… are their offspring automatically enemies of Burundi or spies?
    The seeds of blind hate and divisions are mindboggling in Burundi.
    Starting to wonder what define a true Burundian (umunyagihugu/umwenegihugu)?

  5. Billy

    Tres bel article! Courage Hosy, moi je te supporte.

  6. Ahishakiye

    Laissez les burundais et burundaises utilisent leurs talents pour faire avancer le pays à travers les familles,
    Comment une telle femme née au Burundi d’un parant de mwaro, avec deux enfants burundais aussi orpheline de la mère, qui avait traversé de telle histoire puisse être une espion d’un pays comme le Rwanda!!
    La haine de certains citoyens de chez nous causes la perte de confiance et le courage pour les autres jeunes nationaux qu’internationaux, futures investisseurs de leur pays.

  7. Rujwi

    Merçi Barenga
    K’imbécibimité n’a pas de limites

    • Stan Siyomana

      @Rujwi
      Ivyo kuja kwagiriza ngo naka ni maneko/espion kandi utabifitiye ivyemezo ni kumwikoreza inkono ishushe, NI BIBI, NI ITERABWOBA, ET C’EST TRES LACHE KANDI N’ABANYAGIHUGU BOHAHAMUKA NGO IGIHUGU CINJIRIWE.
      Jewe nikeka ko naka ari maneko sinoza kubitangaza kuri reseaux sociaux kuko noba ndiko ndamuburira kugira ngo yinyegeze. Ahubwoho noja kubwira inzego z’umutekano (zoba zizi ibijanye na contre-espionnage) kugira zimutungure ataco yikeka.

  8. Bruno-Walter Mizero

    L’excès de zèle dont fait preuve certains de nos concitoyens pourrait faire l’objet d’une étude approfondie portant sur les effets du manque d’instruction citoyenne généralisée.Comment peut-on s’en prendre à une concitoyenne qui n’a ni commenté d’une manière ou d’une autre l’actualité géopolitique régionale ni manifesté son soutien à l’une ou l’autre des parties belligérantes juste parce qu’un de ses parents est d’origine rwandaise?

    Une prise de conscience de la jeunesse burundaise,dans ces moments où il est plus facile de céder à la haine que de rester lucide et prôner l’unité nationale, s’impose.
    Comme s’interroge Alain-Majesté,si ça continue comme ça,qui sera le suivant à être victime de ce genre de campagne de médisance qui peut même dégénérer en une forme de lynchage physique si rien n’est fait pour inculquer à notre notre jeunesse les valeurs et principes indispensables pour garantir une société libre, tolérante et éprise du profond respect de la vie d’autrui.

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