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OPINION – Burundi : ministre de l’Injustice ou ministre de la Justice

15/02/2017 11

Les articles de la rubrique opinion n’engagent pas la rédaction

Par AMILCAR RYUMEKO*

Amilcar Ryumeko
Amilcar Ryumeko

Au lendemain du procès en lien avec l’attaque récente du camp de Mukoni de la province de Muyinga, madame Laurentine Kanyana, ministre de la (in)Justice et garde des Sceaux a tenu des propos, selon moi, contraires à la déontologie ainsi qu’à l’éthique liée à sa fonction, qui ont été relayé par plusieurs médias et qui ont fait réagir plusieurs personnes.

D’après les propos rapportés, il est évident qu’elle a fait preuve d’un aveuglément volontaire inouï sur des cas flagrants d’actes tortures.

Pire, ses propos minimisent certains piliers qui garantissent la tenue d’un procès juste et équitable à savoir « l’impartialité » et « le devoir de réserve ». En effet, ses propos tendancieux minent la confiance à l’endroit de l’institution qu’elle représente (système judiciaire), au regard du devoir de réserve et de l’impartialité dont elle devrait faire preuve, à mon humble avis, dû à sa position dans la structure de l’État, surtout quand il s’agit d’un procès en cours.

Le devoir de réserve du pouvoir exécutif à l’endroit du système judiciaire signifie que le premier ne doit intervenir, sous quelques formes que ce soit, ou tenter d’intervenir, sur la manière dont le deuxième mène les procès et rend ses jugements. Sur un plan plus pratique, le devoir de réserve impose aux personnages politiques de garder leurs distances par rapport aux procès en cours. Toute intervention publique à propos d’un procès en cours mine l’impartialité dudit (propos de madame Laurentine Kanyana dans le cas qui nous concerne) remet en cause l’indépendance judiciaire aux yeux d’un citoyen bien informé. Le devoir de réserve lui impose de s’abstenir à s’exprimer publiquement sur des sujets de litige en cours au sein du système judiciaire. L’objectif du devoir de réserve vise essentiellement à donner l’assurance au public que le système judiciaire rend sa décision dans le cadre de la règle de droit, sans interférence de qui que ce soit sur des cas de justice qui lui sont soumis. En d’autres mots, il vise à mettre les tribunaux à l’abri des ingérences du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif. Le devoir de réserve permet au système judiciaire d’agir dans des conditions qui permettent de rendre la justice avec toute l’impartialité et la sérénité requises.

Pour ce qui est de l’impartialité, elle est étroitement liée à l’indépendance judiciaire. En effet, sans l’impartialité, on ne peut pas espérer avoir un système judiciaire indépendant. Le terme « impartial » renvoie à une absence de préjugé, réel ou apparent. L’impartialité réelle ou apparente est l’une des conditions imposées au pouvoir exécutif dans sa relation avec le pouvoir judiciaire et sans laquelle on ne peut espérer l’indépendance judiciaire qui est essentiel pour avoir un procès juste et équitable. Dans le cas présent, l’impartialité désigne l’attitude de madame kanyana vis‑à‑vis du procès mentionné plus haut.

Donc, l’impartialité lui impose de non seulement maintenir, mais également donner l’apparence de maintenir son impartialité. L’apparence d’impartialité est importante pour assurer la confiance du public dans le système judiciaire. L’objectif étant de garantir sa neutralité et son impartialité vis-à-vis du processus judiciaire.

Au regard des propos tendancieux de madame Kanyana, il est clair que les principes d’indépendance judiciaire et d’impartialité auraient été mieux respectés si elle s’était abstenue de tout commentaire relativement au procès en lien avec l’attaque récente du camp de Mukoni de la province de Muyinga.

Dans ce contexte, vu le préjudice causé par madame Kanyana et le système judiciaire qu’elle représente quant à la garantie d’un procès juste et équitable, j’ose espérer que l’institution qu’elle représente veillera à garantir le droit à un autre procès (juste et équitable cette fois-ci) aux présumés. Mais, mon instinct m’indique ça serait trop demander au ministre de l’injustice et garde des Sceaux…

Malgré qu’elle fasse partie d’un gouvernement illégitime, on se serait attendu, au minimum, à une certaine décence de sa part, pour ce qui est du respect de la personne humaine, de l’équité et l’intégrité du système judiciaire qu’elle représente. Autrement dit, on se serait attendu à ce qu’elle soit la garante de la primauté du droit au sein de la société burundaise et maintenir, au Burundi, un système de justice digne de confiance et intègre dans le but de favoriser le respect des droits individuels et collectifs de tous les citoyens burundais.

Je termine en rappelant que (normalement) le mandat du ministère de la Justice, à travers madame Kanyana, est de protéger les droits et libertés fondamentales et protéger tous les Burundais contre toute atteinte à la jouissance des droits et libertés individuels et collectifs que leur confère la Constitution burundaise.
_________
*Citoyen burundais vivant au Canada, Amilcar Ryumeko est diplômé en science politique de l’Université de Sherbrooke. Il milite pour le retour aux institutions reflétant la lettre et l’esprit des Accords d’Arusha et de la Constitution

Forum des lecteurs d'Iwacu

11 réactions
  1. Munyangeri

    Abarundi twibagira ningoga. Nimwibuke ko aho hambere Kanyana yari mubajuges bo muri cour constitutionnelle bongeye, kunguvu, mandat imwe umukuru w’igihugu. Nawe munyuma yaciye amurungikira ascenseur amugira umushikiranganji w’ubutungane. Kanyana rero mugomba ko abatunganiriza iki? Mwamuhaye iki? Azotunganiriza uwamuhaye. Nimumuveko rero mumaguru masha. Kanyana azi umukuru w’igihugu wenyene. Abasigaye bose nimubandanye inzira. Ntavyo kurorera biriho. Murubahuka kuvuga justice mu gihugu gitwarwa na dictature!!!

  2. Munyangeri

    Abarundi kwibagira ningoga. Nimwibuke ko aho hambere Kanyana yari mubajuges bo muri cour constitutionnelle bongeye, kunguvu, mandat imwe umukuru w’igihugu. Nawe munyuma yaciye amurungikira ascenseur amugira umushikiranganji w’ubutungane. Kanyana rero mugomba ko abatunganiriza iki? Mwamuhaye iki? Azotunganiriza uwamuhaye. Nimumuveko rero mumaguru masha. Kanyana azi umukuru w’igihugu wenyene. Abasigaye bose nimubandanye inzira. Ntavyo kurorera biriho. Murubahuka kuvuga justice mu gihugu gitwarwa na dictature!!!

  3. RUGAMBA RUTAGANZWA

    Pour moi, la Ministre de la Justice n’est même pas Ministre de l’Injustice. C’est pire que cela. Elle cautionne, au nom de la loi, y compris en mentant officiellement, les crimes graves pouvant être qualifiés de crimes contre l’humanité y compris, la torture, les disparitions forcées et même les exécutions extrajudiciaires car c’est de cela dont il était question à Genève en juillet 2016 quand, au lieu de répondre aux questions claires et concises qui lui étaient posées lors de la session avec le Haut-Commissariat des NU pour les droits de l’homme, elle a préféré faire l’école buissonnière puis rentrer précipitamment sur Bujumbura, elle et la délégation qu’elle conduisait.
    Rappelez-vous de ses dires, vites démentis par le concerné, il y a quelques jours seulement, concernant le Caporal Ndayikengurukiye Fulgence dans l’affaire attaque (ou vol d’après Baratuza) au camp de Mukoni à Muyinga. Rappelez-vous de ce qu’elle a déclaré il y a quelques temps sur RFI concernant la disparition et probablement l’assassinat de la trésorière de la Ligue Iteka. Malheureusement, la liste de ses mensonges, au nom de la justice qu’elle est sensée garantir à tous le Burundais, n’est pas exhaustive… !!!
    Elle peut continuer de mentir, au nom de la solidarité gouvernementale, mais ce qu’elle oublie c’est que quand la justice (nationale ou internationale) se réveillera enfin elle répondra seule de ses actes graves souvent posés pour couvrir sa hiérarchie politique. C’est cela, à mon avis, que les gens impliqués, au nom de l’Etat, dans ce genre de problèmes graves de violations des droits de la personne humaine, y compris de crimes contre l’humanité, semblent oublier.
    En ce qui me concerne, je souhaite que justice soit rendue pour que ce genre de personnes qui ont causé tant de torts à notre pays, n’aient pas le dernier mot.

  4. kibwa

    Vous perdez votre temps mon ami. La dame défend les intérêts d’une bande dont elle fait partie et partage le butin.
    L’Etat de droit a fui avec les milliers de gens qui meurent dans des camps de fortune hors du Burundi. Kanyana est dans l’inconscient politique.
    Elle va se réveiller un jour comme beaucoup d’autres avant lui, dans la même fonction et dans les mêmes égarements!!!!
    Que voulez vous avoir comme dirigeants quand le pays est le plus pauvre du monde????
    Bonne soirée
    KIBWA

  5. Fofo

    Cher Amilcar RYUMEKO,
    Le développement de votre analyse est riche et instruisant! Toutefois, son titre et certaines expressions utilisées remettent en cause les conseils que vous prodiguer à Madame la Ministre! Nous devons apprendre à dissocier nos sentiments à notre profession. L’article est bien développé mais mal introduit! Le développement est très professionnel et instruisant! L’introduction, quant elle, exprime tes sentiments! Vous devriez choisir entre : EXPRIMER VOTRE OPINION ou INSTRUIRE!

    • Ek

      Je crois qu’il est libre de choisir son style… C’est son oppinion basé sur des connaissances cher (e) Fofo. La Section où l’article se trouve est: « Opinion »… Donc Opinion propre au rédacteur.

  6. SENYAMWIZA JEAN CLAUDE

    Pour moi, la Ministre de la Justice n’est même pas Ministre de l’Injustice. C’est pire que cela. Elle cautionne, au nom de la loi, y compris en mentant officiellement, les crimes graves pouvant être qualifiés de crimes contre l’humanité y compris, la torture (rappelez-vous de ses dires concernant le Caporal Ndayikengurukiye Fulgence pour ne citer que le plus récent) , les disparitions forcées (rappelez-vous de ce qu’elle a déclaré il y a quelques temps sur RFI concernant la disparition et probablement l’assassinat de la trésorière de la Ligue Iteka pour ne citer que celle-ci) et même les exécutions extrajudiciaires car c’est de cela dont il était question à Genève en juillet 2016 quand, au lue de répondre aux questions clairs et concises qui lui étaient posées, elle a préféré faire l’école buissonnière et a choisi de rentrer su Bujumbura précipitamment.
    Elle peut continuer de mentir, au nom de la solidarité gouvernementale, mais ce qu’elle oublie c’est que la justice (nationale ou internationale) se réveillera enfin elle la frappera individuellement pour ses actes y compris ces mensonges pour couvrir sa hiérarchie politique. C’est cela, à mon avis, que les gens impliqués, au nom de l’Etat, dans ce genre de problèmes graves de violations des droits de la personne humaine, y compris de crimes contre l’humanité, semblent oublier.

  7. AuRevoir

    Citoyen Burundais? Muratubesha….rien qu’à voir son nom, il a l’air d’un rwandais! Ensuite…
    « Il milite pour le retour aux institutions reflétant la lettre et l’esprit des Accords d’Arusha et de la Constitution » …Qu’il exprime ce genre d’idées au Canada et qu’il donne des ordres là-bas! Les accords d’Arusha finiront par disparaitre. De toute façon, 60% et 40% pour les uns, il y a quelque chose qui ne va pas. Remettons les choses dans l’ordre!

    • Inyankamugayo

      Meme dans l’armée 50/50 contre environ 85% et 14%. Quelle injustice envers les Hutus! Ceux qui ont negocié Arusha étaient affamés de pouvoir et ont signé aveuglement. Toutefois, Dieu merci kuko ngo UBUSA BUSUMBA AKAMARAMAZA! Arusha s’igiheko ngo tuyigumizeko. Il faut évoluer. S’il y a l’amour du prochain meme si le Tutsis sont à 10% dans l’armée ils ne vont pas s’inquiéter. Ko carwanijwe kikamanika amaboko kandi bari 100%. Ikibazo si ibitigiri, ikibazo ni intwaro mbi zicanishamwo Abarundi , bo n’abanyagihugu batumvira abaganza.

      CIRE AYO MACAKUBIRI.

      • kkagajo

        Reka kuba ubesha! Ngo caragwanijwe??Wombwira aho mwafashe igihe mwari mwishamba?? Ko mwica abakecuru nabana mugaca mwiruka! Mwagize imana Buyoya arakibasororera none ubu mwarigiz ibihangange!! Mbe urabona umukuru wigihugu amara imyaka ibiri atava mugihugu afise controle yigisoda cose?? Harya agenda abundabunda wibaza ngo nikubera iki? Gusa mwasanze hariho ibihume vya ba FAB bikunda amahera birasinzira… Ariko ntaco ubu twarabonye ko atakwizerana kuhari! Arusha mugisoda izoguma ari 50/50 muvyemera muvyanka!!! Nugusubiramwo vyose!!

  8. Congo

    Eh Amilcar, c’est bien de nous rappeler le droit. Mais nous ici on vise à ce que notre roi bien aimé soi t bien servi. La justice est au service de Nkurunziza. Le pouvoir judiciaire, législatif, militaire et je ne sais quoi, tout est à la botte Nkurunziza et vive la démocratie . Le discours d Amilcar est bon mais nous on n est pas au canada. Merci quand même.

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