{« L’intellectuel est quelqu’un qui se mêle de ce qui ne le regarde pas »}
(Jean-Paul Sartre)
<doc7547|right>{Abize}, {Incabwenge}… au Burundi, ces mots pour désigner ceux qui ont été à l’école sont prononcés avec respect. Car l’école menait au pouvoir et ceux qui avaient été sur ses bancs constituaient une sorte de « caste », admirée par la grande masse de « paysans ». Inutile de préciser que se faire traiter de « paysan » est une véritable insulte ici.
Et pourtant, au regard de la gestion du pays depuis l’indépendance par ces élites, il y a lieu de se poser des questions. Cette classe est-elle si « éclairée » que cela ? Où étaient tous ces {abize}, ces « intellectuels », lors des nombreux massacres ? Qui s’est écrié, tel Emile Zola, « J’accuse » face aux injustices qui jalonnent
notre histoire ? Nos intellectuels ont été trop silencieux. Ils le sont encore aujourd’hui.
Face aux grands enjeux économiques, scientifiques, sociaux, culturels, religieux, les intellectuels burundais sont absents. Les journalistes savent tout le mal qu’ils ont pour faire réagir un spécialiste. Toute la place est laissée aux seuls décideurs qui auraient pourtant besoin de beaucoup d’éclairage.
Cette démission de l’intellectuel burundais s’explique par plusieurs facteurs. Par le passé, les régimes militaires – qui ont donc accédé au pouvoir par la force – se sont toujours méfiés de l’intelligentsia. Et, apparemment, les choses n’ont pas changé avec l’accession au pouvoir de l’ancienne rébellion. La gestion des affaires de
l’Etat est donnée en priorité à ceux qui se sont illustrés sur…le champ de bataille !
En prenant position, fatalement, l’intellectuel s’expose. Ce n’est pas pour rien que les rares ouvrages critiques sur le Burundi étaient le plus souvent publiés par des
auteurs en exil. Ainsi, par manque de courage, pour protéger son poste, l’intellectuel, l’universitaire burundais est devenu fonctionnaire ou encore un « consultant », c’est à la mode, au service de l’ordre établi.
Le Burundi vit une période difficile. De par leurs compétences, les intellectuels ont le devoir d’intervenir, d’éclairer la société. Ils ne peuvent plus s’y dérober sans trahir leurs responsabilités.
C’est pourquoi nous saluons tous ces intellectuels qui ont accepté d’intervenir dans les grands débats qui agitent la société sur le plan politique, économique,
culturel, religieux, social.
On ne connaît pas de société qui se soit développée et épanouie sans vie intellectuelle véritable et dynamique. Iwacu est heureux d’être ce cadre d’expression, de réflexion et de débat pour rendre visibles les interventions et stimuler les recherches et les réflexions des intellectuels burundais.