Plusieurs localités du Burundi manquent cruellement d’eau potable malgré toute une multitude de sources d’eau à travers tout le pays. Certaines collines des communes Nyabihanga et Kayokwe de la province de Mwaro sont également touchées. Les habitants demandent aux autorités compétentes d’agir en leur faveur pour éviter des maladies des mains sales.
« L’eau est la source de vie pour notre monde. Rien ne la supplante plus. Santé, nutrition, éducation, infrastructures, … Elle est essentielle dans tous les aspects de la survie et du bien-être humains ainsi qu’au développement économique et à la prospérité de chaque nation », a déclaré Antonio Guterres, secrétaire général des Nations-unies.
Actuellement, au Burundi, une partie de la population n’a pas accès à l’eau potable. Cela malgré l’abondance des sources d’eau dont il regorge. Dans certaines contrées du pays, les familles se rabattent sur les rivières pour s’approvisionner en eau. Ce sont notamment certaines collines des communes Nyabihanga et Kayokwe.
A Nyabihanga, sur la colline Miterama par exemple, certains habitants lancent un cri d’alarme. Le peu de robinets publics disponibles sont parfois à sec ou amènent de l’eau sale. Nous faisons face aux pénuries d’eau sur notre colline. Trois semaines peuvent s’écouler sans que l’eau n’arrive dans les robinets. Et ces robinets ne sont pas nombreux. Nous nous rabattons sur les eaux des rivières qui sont sales. Nous avons peur d’être contaminés par les maladies des mains sales », se désole Yvette Murekasabe, habitante de cette colline.
Selon l’une de ses compatriotes, ils sont soulagés par l’existence des sources aménagées dit « Rusengo » mais ils doivent parcourir de longues distances. « Il s’agit d’une eau potable pendant la saison sèche, mais pendant la période pluvieuse, nous vivons le même calvaire. Du sable et de la boue endommagent les sources ».
Selon les administratifs à la base, les habitants de la colline Miterama font face à une pénurie d’eau potable sans précèdent. Serges Manirakiza, chef de cette colline, fait savoir que quatre robinets publics dont disposait cette colline ne fonctionnent plus. « En raison des travaux de réhabilitation de la route Nyabihanga-Miterama-Giheta, on n’a pas d’eau potable. L’eau des sources Rusengo existe, mais elle est très loin des ménages. On doit faire de longues distances pour la trouver », précise-t-il.
Ce chef de colline évoque un autre problème lié aux tuyaux métalliques qui sont usés. « Parfois, l’eau récupérée présente une couche de rouille le lendemain. Cette situation inquiète la population sur la santé des gens. C’est grave. On a déjà alerté sur ce cas ».
Il tient à tranquilliser la population que cette question est connue par sa hiérarchie. « Nous pouvons tranquilliser la population que cette question sera résolue. Le projet de remplacement des tuyaux métalliques par ceux qui sont en PVC (plastique) est en cours d’élaboration pour que les habitants aient de l’eau potable. L’eau c’est la vie. Elle ne doit pas constituer alors une menace pour la santé », rassure-t-il.
Telle est aussi la situation qui prévaut sur la colline Kibungere de cette même commune. En raison de la pénurie d’eau, M.P, pâtissière sur cette colline, n’arrive pas à garantir la propreté dans son entreprise. « Nous n’avons pas nettoyé les ustensiles de cuisine. En conséquence, les mouches pullulent sur les tables et s’arrêtent tout le temps sur nos clients dans notre pâtisserie. Ce qui fait fuir notre clientèle », déplore-t-elle.
C’est la même Indignation chez un tenancier d’un restaurant qui propose une brochette de porc grillée communément appelée « Akabenzi ». « Nous avons besoin de l’eau potable pour pouvoir en donner à nos clients qui en ont besoin. L’eau des sources Rusengo provient de loin. Elle nous demande beaucoup d’argent pour des transporteurs à vélo », souligne-t-il.
Selon Pasteur Ndikumana, chef de la colline Kibungere, la colline compte trois sous-collines, mais les bornes fontaines se trouvent sur deux sous collines. « Ce qui n’est pas suffisant. Une seule sous-colline est bien alimentée en eau potable. L’eau des sources (Rusengo) existe, mais elle se trouve loin des ménages. Nous demandons aux autorités compétentes d’agir pour nous sauver », conclut-il.
Kayokwe n’est pas épargnée
Certaines localités de la commune Kayokwe vivent la même situation qu’à Nyabihanga. « Sur notre colline, la question de l’eau potable est grave », se lamente Jean Ndayizeye habitant de la colline Saswe. Cette colline comprend deux écoles, à savoir Gasave I et Gasave II. Tous ces établissements scolaires n’ont pas d’eau. « Les élèves manquent d’eau à boire et pour faire la propreté. Les lieux publics doivent avoir de l’eau. Il y a le risque d’attraper les maladies des mains sales car la propreté devient difficile. A côté, il y a aussi une église ».
Jeanne Kankundiye doit faire près d’une heure pour arriver à une source aménagée « Rusengo ». Elle fait remarquer que ce n’est pas possible de s’y rendre tous les jours. Elle demande l’aménagement des sources plus proches pour diminuer la distance.
Les habitants de cette colline appellent l’administration communale et les hautes autorités à agir vite. « Nous nous rabattons sur l’eau des rivières. Cette dernière peut être contaminée et nous rendre malades. Il faut des actions urgentes pour protéger notre santé ».
Claude Ngaraba, chef de la colline Saswe en commune Kayokwe fait savoir que cette colline compte 1 020 ménages. Comme à Nyabihanga, pour trouver de l’eau potable, la population doit faire de longs trajets. « C’est quelque fois de l’eau des sources Rusengo. Pendant la période des pluies, cette eau est trop sale à cause des ruissellements. Au lieu d’en consommer, il vaut mieux consommer l’eau de pluie provenant des toitures des maisons », estime-t-il.
Il fait savoir que les habitants de cette colline sont dans des conditions difficiles et appellent à l’aide pour avoir de l’eau potable. « Il y a le centre de Kibumbu, le centre Majambere. Ces centres se trouvent sur la colline Saswe et comprennent des écoles et des hôpitaux. Ils sont également dotés d’adduction d’eau potable et d’électricité. Tous les visiteurs qui viennent à ces centres pensent que la colline est gâtée. Ce qui n’est pas vrai puisque le reste de la colline connaît de sérieux problèmes », se lamente-t-il.
Les autorités de la commune Kayokwe reconnaissent cette problématique de pénurie d’eau potable qui frappe certaines localités. « C’est une question qui revient dans beaucoup de rapports et lors des réunions. Nous avons transmis le rapport à l’Agence burundaise de l’Hydraulique et de l’Assainissement en milieu rural, AHAMR. Nous avons des difficultés car la province de Mwaro n’a pas beaucoup de partenaires. Des techniciens ont fait des études. Nous espérons que le projet sera mis en œuvre », fait savoir Emmanuel Nduwimana, conseiller chargé des questions économiques et des statistiques à la commune Kayokwe.
Pour permettre aux personnes d’accéder à l’eau potable, dit-il, des efforts énormes sont déjà engagés. Amazi Water est l’une des organisations engagées dans le soutien du développement national via la distribution de l’eau potable. Cette ONG installe des pompes submersibles manuelles alimentées par l’énergie solaire à travers le pays. Elle intervient surtout dans des zones qui manquent d’eau potable. « On a implanté des forages sur la colline Saswe mais ça n’a pas marché. On va devoir essayer dans un autre endroit pour voir si c’est possible ».
La commune Ndava sauvée
Par contre, la commune Ndava toujours de la province de Mwaro est quelque peu épargnée. Le chef de l’Etat, Evariste Ndayishimiye y a en effet inauguré officiellement l’adduction d’eau potable sur la colline Mpanuka le vendredi 14 juin 2024. C’est une réalisation de l’archidiocèse de Gitega via l’Organisation pour le développement de l’archidiocèse de Gitega, Odag avec l’appui financier de l’association espagnole Manos unidas.
Cette adduction d’eau potable s’étend sur une distance de plus de 5 km et desservira 554 ménages, les écoles de la localité ainsi que les enceintes de la paroisse Mpanuka. Les habitants de la colline Mpanuka et de ses environs n’auront plus de problème pour s’approvisionner en eau. Les bénéficiaires ne tarissent pas d’éloges.
Le président Ndayishimiye a demandé aux bénéficiaires de bien entretenir les ouvrages. L’administration communale a été interpellée pour la construction des réservoirs afin de recueillir l’eau pour l’acheminer vers d’autres collines qui sont dans le besoin.
D’après Mgr Bonaventure Nahimana, l’archevêque de Gitega, cet ouvrage traduit l’amour du prochain. C’est un projet qui a duré longtemps avant de se réaliser, a-t-il dit. Il a fallu avoir un appui financier de la part de Manos unidas, une organisation de droit espagnol, précise-t-il.