A la fin du 19ème siècle, l’Europe entrait de plain-pied dans l’ère industrielle et n’avait plus besoin d’esclaves pour les grandes étendues agricoles outre-Atlantique.
Il fallait plutôt des ouvriers dans les usines, une population de plus en plus grande de consommateurs de produits manufacturés et surtout de nouvelles contrées pourvoyeuses de matières premières. Parmi celles-ci, l’Afrique était en bonne place et il fallait que les puissances du moment s’accordent sur son dépeçage systématique selon les rapports de force du moment et les équilibres nécessaires pouvant éviter des conflits inutiles entre elles comme la crise de Fachoda (Kodok actuelle) au Soudan entre Anglais et Français en 1894.
Du 15 novembre 1884 au 26 février 1885, les puissances occidentales de l’époque se réunirent à Berlin pour convenir de la façon dont elles allaient exploiter le continent africain. Un grand nombre de leaders africains se révoltèrent, mais il furent neutralisés et mis hors d’état de nuire. D’autres, plus nombreux encore, signèrent des « traités d’alliance » dont ils ne comprenaient pas les tenants et les aboutissants. La colonisation venait de commencer avec son lot de misères, d’incompréhensions et d’exploitation éhontée. Dans son livre percutant, « Les Damnés de la Terre », Frantz Fanon dit ceci : « Le bien-être et le progrès de l’Europe ont été bâtis avec la sueur et les cadavres des Nègres, des Arabes, des Indiens et des Jaunes. Cela nous décidons de ne plus l’oublier. » ((Cfr. Fanon, F., Les Damnés de la Terre, Paris, La Découverte (édition de poche), 2002, p 94))
Aujourd’hui, plus que jamais l’exploitation du reste du monde s’organise non plus grâce à l’alliance du sabre et du goupillon, mais davantage par le truchement de multinationales qui corrompent et achètent tout au point de reléguer les gouvernements au second rang ; et de sectes religieuses qui promettent monts et merveilles à condition d’obéir servilement aux bons pasteurs ayant remplacé les bons missionnaires d’antan. Comme nous savons ce qui nous opprime et nous maintien dans la pauvreté, que faisons-nous pour changer notre destin ? L’urgence n’est plus tant de chanter notre négritude, mais plutôt se lever et affronter l’adversité avec courage et détermination. Lee Kuan Yew, le bâtisseur du Singapour moderne, nous livre une de ses recettes :
« We had to make extraordinary efforts to become a tightly knit, rugged, and adaptable people who could do things better and cheaper than our neighbors, because they wanted to bypass us and render obsolete our role as the entrepôt and the middleman for the trade of the region. We had to be different.” ((Lee Kuan Yew, From the Third World to First, The Singapore Story: 1965-2000, New York, Harper Collins Publishers, 2000, p7.))
Traduction libre : « Nous avons dû faire des efforts extraordinaires pour nous transformer en un peuple uni et vaillants capables de mettre sur le marché de meilleurs produits à un prix défiant toute concurrence. Nos voisins voulaient confiner notre pays dans un rôle d’entrepôt et d’intermédiaire commercial. Nous avions choisi un destin différent. »
De projets destructeurs et/ exploiteurs de l’Afrique il y en a eu et il y en aura toujours. Des « Conférence de Berlin » nous guettent à chaque étape de notre histoire. Le salut de l’Afrique de demain, c’est d’investir dans le savoir et l’éducation qui sont deux choses différentes, mais intimement liées. Le monde de demain sera divisé entre ceux qui ont ces deux valeurs et ceux qui n’en ont pas ou pas assez. C’est encore Lee Kuan Yew qui conclu pour nous:
« (…) we stand a better chance of not failing if we abide by the basic principles that have helped us progress: social cohesion through sharing the benefits of progress, equal opportunities for all, and meritocracy, with the best man or woman for the job, especially as leaders in government.” ((Idem p 696))
Traduction libre : “(…) nous sécuriserons notre succès si nous restons fidèles aux principes suivants qui nous ont toujours guidé : la cohésion sociale par le partage des bénéfices acquis, les mêmes chances pour tous, le culte du mérite afin que toute personne soit au poste qu’il ou elle mérite ; et cela est particulièrement crucial au sujet des leaders qui dirigent le pays. »
Fort de ces principes sacro-saints, nul besoin de quota ou autres politiques discriminatoires toujours grosses d’inégalités et de violences récurrentes.