Le président de l’Association pour la mémoire et la protection de l’humanité contre les crimes internationaux dresse les questions qui hantent {la gestion de la mémoire} au Burundi, dans un entretien accordé au Groupe de Presse Iwacu ce dimanche 28 octobre.
<doc5762|left>« Pouvoir apprendre aux gens de respecter les morts lâchement assassinés, réclamer la vérité sur ce qui s’est passé et aller vers le bannissement de crimes contre l’humanité », sont les grands objectifs de toute commémoration selon Aloys Batungwanayo, de l’Amepci Gira Ubuntu (Association pour la mémoire et la protection de l’humanité contre les crimes internationaux). D’après le lui, lorsqu’on commémore, on le fait en la mémoire des personnes bien connues. Par exemple, signale-t-il, en 1993, il y a des Hutu qui ont tué les Tutsi et vice-versa. Il faut donc, découvrir la vérité et la commémoration est une étape de ce processus.
En outre, dans ce cheminement, les gens osent raconter ce qui s’est passé. « Ceci touche inévitablement les criminels qui, par voie de conséquence, font un examen de conscience », explique-t-il. Au fur et à mesure que ces commémorations se répètent, précise Aloys Batungwanayo, les criminels peuvent être démasqués et ainsi ne plus récidiver. « Par après, la vérité sera connue et la machine judiciaire enclenchée », fait-il remarquer.
Selon lui, amener les Burundais à avoir cette culture de commémoration n’est pas facile. Car, explique-t-il, dans l’histoire du Burundi, il y a eu des régimes qui ont empêché les personnes de pleurer les leurs, des gens qui ont été obligés d’effacer toutes les traces des leurs, tuées ou massacrées.
Aloys Batungwanayo souligne que c’est une « culture du silence » qui a été imposée aux Burundais jusqu’à ce que les victimes aient honte de le dire alors que « normalement ce sont les criminels qui devraient avoir honte ».
Pour le président de l’association AMEPCI Gira Ubuntu, malgré cet état de fait, les gens ont appris, petit à petit, à briser ce silence imposé : « Ils parviennent à parler, à pleurer leur mort, à vouloir raconter ce qui s’est réellement passé dans des cadres restreints. Ceci est une bonne chose, une thérapie en soi », note Aloys Batungwanayo.
« Brisons ce silence »
Le président de l’association AMEPCI Gira Ubuntu trouve qu’il faut « briser ce mur du silence et rendre la dignité aux chers disparus, lâchement massacrés. » D’après lui, à chaque commémoration, une personne qui a perdu un proche, devrait aller s’incliner à l’endroit où a été enterré ce dernier. « Ailleurs, les gens vont même devant une rivière de triste mémoire pour s’incliner », indique-t-il. C’est, d’après lui, une façon de donner la dignité aux personnes tuées ou massacrées.
Malheureusement, poursuit-il, au Burundi, le contexte ne s’y prête pas. Sous d’autres cieux, indique Aloys Barutwanayo, ce sont les victimes, regroupées en associations, qui organisent les commémorations. Mais, rappelle-t-il, la loi de 1992, qui régit les associations sans but lucratif, ne reconnaît pas une association à base ethnique. Pour ce, il propose que les Hutu et les Tutsi se mettent ensemble et rendent hommage à tous les disparus, toutes ethnies confondues. « Ce sera le début de la vérité et de la reconnaissance de nos chers disparus », conclut-il.