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Société

Nomukura he ?, Où le (la) trouver?

12/09/2011 Commentaires fermés sur Nomukura he ?, Où le (la) trouver?

On y parle amour, copinage, fiançailles, … Et le public adore. Rencontre avec les acteurs de l’une des émissions les plus écoutées la nuit burundaise venue !

Mercredi soir, par une fraîche nuit d’août de 2011, dans un des quartiers de la capitale. Il est 22 heures, la famille a déjà eu sa pâte de manioc à l’haricot, la veuve s’apprête à aller se coucher. Ses filles, elles, vont un peu veiller, l’oreille collée au téléphone qui est sous option Radio Publique Africaine → 93,7 FM. Le générique passe, et la voix nerveuse de l’animateur annonce le programme Nomukura he ? (Où le [la] trouver ?). Ils auront été des milliers à attendre cette heure, plus d’une centaine de sms envoyés à Gilbert Niyonkuru, animateur de l’émission, genre cet appel angoissé : « Je suis en relation avec un garçon, depuis quelques mois. Mais le mec est muet ! Que faire? »

Le mercredi soir, les appels sur le téléphone de Gilbert continuent de tomber jusqu’à 4h, entre ceux qui n’ont pas entendu passer leurs doléances, ceux qui n’ont pas pu écouter l’émission et qui veulent s’assurer qu’elle sera rediffusée ( dimanche 15h), ou des auditrices qui veulent passer à Gilbert un « coucou » fondant de gentillesse…

On y parlait des Batwa…

Nomukura he ? est à l’origine une émission qui traite de la vie des couples Batwa. A l’époque, Gilbert, originaire de Makamba, est encore étudiant en communication à l’Université Lumière. Cet orphelin de père et de mère (depuis ses 5 ans) a vécu dans différentes familles des parentés. Il y développe une grande sensibilité sur la vie familiale, et les relations de couples. En 2008, à 23 ans, alors qu’il effectue son stage dans la rédaction de la RPA, on lui confie une interview où il décide cette fois-ci d’aborder les relations amoureuses entre étudiants.
Deux mois plus tard, la direction de la radio le propulse animateur titulaire de {Nomukura he ?}. Gilbert a su trouver une corde sensible, les relations amoureuses. Et l’auditoire suit.

Dans une culture burundaise pudique et peu incline à des épanchements de tels genres, la recette fait mouche. Les langages de l’amour, comment gérer les risques d’aimer, l’épineuse question des relations sexuelles…
Pour corser l’affaire, Gilbert s’entoure d’invités qui viennent enrichir son débat à l’antenne. Très souvent, des mères ou pères de famille qui viennent présenter leur expérience de vie en couple. Pour aborder le thème d’une sexualité réussi, {Nomukura he ?} invite des femmes de chauffeurs… Le public applaudit. Des textos tombent: « Cher Gilbert, quelle blessure as-tu vécue pour parler de tout cela? », veulent savoir des admiratrices.

Puis l’invité de choc

L’émission va prendre un second souffle à la mi-2010, quand Gilbert rencontre Reynolds Butari, jeune licencié en psychologie auteur à l’Université Espoir d’Afrique, d’un mémoire de licence intitulé « L’apport du sentiment amoureux dans une vie de couple vivant en milieux urbains africain: cas de la commune Kinindo ». Selon son auteur, « il s’agissait de chercher à comprendre la dynamique du couple (monogame et hétérosexuel), comment les gens peuvent baser le choix de leur partenaire sur un sentiment qu’ils se donnent rarement la peine de cultiver, l’amour ».

Avec l’apport de ce « conseiller conjugal », Nomukura he ? monte d’un cran. Le public s’élargit avec des jeunes des quartiers dits « aisés ». Car Reynolds parle leur langage, à coups de formules massues. Échos d’une alimentation de Rohero gardée par deux citadins : « J’ai quitté ma petite copine, mais elle ne veut pas le croire !», se plaint un auditeur. Dans un kirundi qui mélange argot, swahili et français, le conseiller conjugal explique que la fille sait bel et bien que son ex l’a quitté, mais elle ne veut pas s’y faire par crainte… de solitude ! Conseil à la fille : « Qu’elle sorte, qu’elle aille dans des mariages, des dots et des levées de deuil, qu’elle voie autre chose, elle ira mieux! »

Les choses ont changé

Plus d’une année après son apparition dans Nomukura he ?, évaluation de Reynolds : « Les participants sont plus ouverts et moins enclin à accuser leur partenaire par rapport au début, et leurs questions sont de plus en plus compliquées et détaillées ». Quant à sa profession, « avant les gens n’y trouvaient aucune utilité. Il s’agissait de montrer que nous sommes autant utiles qu’un mécanicien, un dentiste ou un informaticien », note-t-il.

Et s’il reste un mot que Gilbert répète encore et encore dans son émission, elle est à lire dans cette phrase du chanteur Percy Sledge: « Prends le temps de la [le] connaître ». Si on lui demande le plus chaud des souvenirs avec Nomukura he?, il vous raconte cette fille de 10 ans habitant Ngozi qui l’apostrophe lors d’une visite dans une famille : « Je t’ai entendu parler des femmes qui mettent des préservatifs dans les bagages de leurs maris au cas où… » La pauvre.

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