Sœur Lucrezia Mamic et M. Francesco Bazzani ont été immortalisés, dans le « jardin de la résurrection » à l’hôpital de Kiremba. La communauté chrétienne, l’administration provinciale, communale et celle de l’hôpital ont inauguré, ce samedi 24 mars, un mémorial dédié aux deux disparus.
Il s’agit d’une représentation du Burundi construite en pierres, avec le Nord un peu en hauteur par rapport au Sud. Dans cette maquette, à Ngozi, plus exactement à Kiremba, on y a planté deux fleurs : « Elles nous rappellent nos deux amis », explique le directeur de l’hôpital en donnant encore plus de détails : « La plus grande est rouge. C’est la couleur que Francesco adorait. Ce rouge signifie aussi le sang qui a tant coulé dans notre pays. Nous espérons que celui versé à Kiremba sera le dernier. La plus petite fleur est blanche. C’est le symbole de la pureté de sœur Lucrezia. » Au milieu des deux plantes, en fer, Jésus Christ crucifié. « Loin de nous l’idée de la mort, mais plutôt celle de la résurrection », insiste le directeur de l’hôpital pour qui, la même cérémonie fait office de levée de deuil, « comme le veut la coutume burundaise après un bon moment observée, en principe sans travailler, après l’inhumation. » D’ailleurs, il précise que justement ce mémorial symbolisait la vie à la place de deux tombes, image de ce qui ne vit plus.
« Ne vous découragez pas ! »
Mais avant de se retrouver dans ce verdoyant jardin de la résurrection, à l’hôpital, les 2000 places assises de l’église avaient été littéralement envahies par les paroissiens, à 11 heures, pour une messe en mémoire des deux « martyrs de Kiremba ». C’est là que l’abbé Isaïe Ntahondi, a parlé du sens de cette cérémonie : « En cette journée mondiale de prière pour les missionnaires martyrs, nous nous rappelons que ceux que nous célébrons sont morts au nom de l’Evangile. Sœur Lucrezia et Francesco sont parmi eux », précise le curé de la paroisse avant de continuer son homélie. Invité à prononcer son discours juste avant la fin de la messe, le président de l’Assemblée Nationale, mandaté par le président de la République, fustige ceux qui ternissent l’image du pays en tuant des bienfaiteurs : « Encore une fois, nous nous insurgeons contre des assassins, guidés parfois par la cupidité. Au nom du président de la République, nous nous joignons aux familles éprouvées, à l’Eglise catholique, à la Croatie et à l’Italie en ces moments de dures épreuves. » Tout en demandant aux volontaires et à tous ceux qui soutiennent le pays de ne pas se décourager, le numéro un de l’Assemblée Nationale leur rappelle que le pays a plus que jamais besoin d’eux : « Qu’ils augmentent plutôt d’efforts pour aider, soutenir Kiremba et le pays. Ainsi, ce sera un hommage vibrant rendu à Sœur Lucrezia et à M. Bazzani. Ce sera également un témoignage vis-à-vis de leur œuvre pour le développement de cette paroisse », souhaite-t-il, avant d’aller, suivi de deux médecins de l’hôpital, déposer une gerbe de fleur sur le mémorial.
Kiremba revit
Comme si l’appel du président de l’Assemblée Nationale avait trouvé écho, l’hôpital de Kiremba recouvre, peu à peu, son fonctionnement normal. Nicola Bonvicini, un volontaire italien, y est depuis janvier de cette année pour la reprise des activités : « Nous y allons lentement, mais surement. Tous les soins sont couverts comme avant », rassure-t-il en annonçant que le meilleur est à venir : « Le docteur Navarro Antonio, un médecin italien, arrive bientôt pour renforcer les capacités de ces collègues ici. Ainsi, sept médecins (quatre Congolais et trois Burundais) seront formés pendant 25 jours, en radiologie et en échographie. » En outre, ajoute M. Bonvicini, la congrégation des sœurs Servantes de la Charité en Italie, continue d’envoyer le nécessaire pour assurer la nutrition des malades à l’hôpital. Comme avant donc, ces derniers sont nourris deux fois par jours (matin et midi) grâce à ce bénévolat. Rappel des faits Dimanche 27 novembre 2011, vers 20 heures 30 minutes. Des coups de feu sont entendus dans le couvent des sœurs de Kiremba : sœur Lucrezia Mamic (50 ans) est assassinée, à bout portant. Les voisins, dont Francesco Bazzani, directeur de l’ASCOM (ONG italienne, principal bailleur de l’hôpital de Kiremba), se rendent sur les lieux. Ce dernier et une autre religieuse, sœur Carla, sont pris en otage par les assassins de sœur Lucrezia qui exigent les clés d’une voiture. Joseph Nzobarinda (25 ans) et Dieudonné Niyongabo (24 ans), les deux malfrats, obligent M. Bazzani de conduire, le bout du canon braqué sur sa tempe. Il s’exécute. Mais ils sont interceptés par des policiers, à une vingtaine de kilomètres de Kiremba. Dans leur fuite, les deux assassins sont attrapés le lendemain et traduits en justice. Verdict : perpétuité. Deux jours après le triste événement, les corps de sœur Lucrezia et de M. Bazzani sont transportés en Italie en même temps que Kiremba se vide de tout ce que le centre a fièrement comme volontaires et médecins européens.