Les fidèles de la nommé « Zebiya » (Euzebie en français), de la colline Businde, en commune Gahombo, ont empêché le déroulement de la messe, à la paroisse Rukago. Certains chrétiens ont été battus. Des coups de feu ont été tirés et trois personnes blessées.
<doc5706|left>Niyongabo Basile, 24ans, fait partie des jeunes encadrés par la paroisse Rukago, en commune Gahombo, dans des activités sportives et culturelles. Dimanche 21 octobre, il s’est réveillé très tôt pour se rendre à la messe. Il a tout vu et raconte.
6h30. Une centaine de fideles de la nommée « Zebiya » arrivent à la paroisse. Toutes les filles et femmes portent des voiles sur la tête. Euzebie n’est pas avec eux, comme elle le fait souvent. Voyant la forte présence de ces fidèles inhabituels dans sa paroisse, Remy Nsengiyumva, le curé, craint du désordre. Il appelle des policiers et ordonne de fermer les portes de l’église.
Mais la messe doit débuter à 7h. Les gens arrivent petit à petit. Les policiers les laissent entrer en écartant ceux de chez « Zebiya ». Ces derniers opposent une farouche résistance et refusent de se faire discriminer. La tentative de la police échoue.
8h. Les prêtres de la paroisse partent célébrer la messe dans les succursales. Le Curé reste. Il sort du couvent afin de s’enquérir de la situation. Sur le coup, les adeptes de « Zebiya » s’en prennent à lui. Il est obligé de prendre fuite en rebroussant chemin. En essayant de le poursuivre, certains d’entre eux sont passés à tabac par les hommes en uniformes.
Dans l’église, les chrétiens ne savent plus à quel saint se vouer. Jusqu’à 10h, aucune issue n’est trouvée. Entre-temps, le commissaire-adjoint de la police de Kayanza arrive. Il essaie de rapprocher les parties mais en vain.
11h. Le vicaire général du diocèse de Ngozi, Monseigneur Antoine Madaraga, arrive. « La messe aura bel et bien lieu », décide-t-il. Les policiers ont l’ordre d’empêcher, par tous les moyens, les gens de chez « Zebiya » de franchir les portes de l’église. Ceux-ci foncent. La police les disperse à coups de matraques. Ils ripostent en leur lançant des pierres. La police tire pour se défendre. Sur le champ, trois personnes sont blessées par bales. Certains témoins affirment avoir vu aussi un des fideles de « Zebiya » tirer avec un pistolet.
La peur au ventre, la population civile fuit dans toutes les directions. Quelques instants après, seuls les adeptes de « Zebiya » reviennent, les mains en l’air, vers les policiers. Ils veulent être des martyrs, disent-ils. Les forces de l’ordre les laissent entrer dans l’église où ils sont immédiatement enfermés. Tout à coup, ils se mettent à chanter, à scander des slogans pour célébrer ce qu’ils estiment comme une victoire.
16h30. Le commissaire régional de la police, Eustache Ntagahoraho, arrive. Il ordonne d’appréhender tous ceux qui sont en train de perturber l’ordre public. Les adeptes de « Zebiya » sont immédiatement embarqués dans les pick-up de la police qui sont sur place. Ils sont amenés dans différents lieux de détention. Les uns à kayanza, les autres vers Ngozi.
Les autorités réagissent
Pour Monseigneur Madaraga, la violence n’est pas une solution. « Ils peuvent toujours venir prier à l’église, à condition qu’ils acceptent de se plier au règlement », souligne-t-il.
Jacqueline Ruragoka, administrateur de la commune Gahombo, annonce que des mesures seront bientôt prises, après la réunion de sécurité, au niveau provincial, qui va se pencher sur le cas. De son côté, Eustache Ntagahoraho, commissaire régional de la police, affirme avoir déjà transféré le dossier en justice pour que les prévenus soient jugés conformément à la loi. « Des enquêtes sont également menées pour savoir s’il y aurait ceux qui détenaient des armes illégalement. Parmi ces détenus figureraient des anciens militaires », précise le commissaire.
| L’histoire de « Zebiya » remonte au temps de sa scolarité. La sœur Bernarda, d’origine italienne, l’a formée dans son centre de couture, nommé Foyer de Rukago. Elle est témoin des premières « dérives » de son ancien élève.
En 1999, « Zebiya » est couturière au Foyer de Rukago où elle affiche un comportement anormal. Pendant les heures de services, raconte la sœur, « Zebiya » somnole et ne fait plus son travail correctement. Sœur Bernarda l’approche pour savoir ce qui cloche. Elle apprend que son employée passe des nuits blanches en train de « prier ».
La consacrée de Sainte Dorothée essaie de la convaincre que chaque chose a son temps, mais sans succès. Quelques temps après, la famine fait rage dans les ménages les plus démunis. La sœur décide d’acheter le haricot et le riz, ailleurs, pour nourrir ses employés sur le lieu du travail. « La vierge Marie m’a empêché de consommer ces produits », réagit la jeune « Zebiya ».
Durant la même période, l’ankylostome frappe dans le coin. Soeur Bernada se sent contrainte de procurer des chaussures à son équipe pour la protéger. Mais « Zebiya » refuse, une nouvelle fois. « La vierge Marie m’a montré qu’il ne faut pas porter ces chaussures », brandit-elle. C’est ainsi qu’elle quitta le centre et commença à réunir des gens, en leur disant qu’elle avait eu des visions de la Vierge Marie. |