Ce lundi 31 mai, sur demande du Conseil de sécurité de l’ONU, le Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies pour le Burundi a fermé ses portes. Le Burundi sera couvert, désormais, par le Bureau de l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs. Pour nombre d’acteurs politiques, ce bureau a échoué par rapport à son mandat.
« Au cours des 5 dernières années sous la direction du conseil spécial du Secrétaire général des NU, Jamal Benomar, puis sous le leadership de son successeur, Michel Kafando, et enfin celui de l’ancien sous-secrétaire général, Bintou Keita, le Bureau a travaillé avec tous les acteurs burundais et régionaux dans l’intérêt du peuple burundais », a indiqué Huang Xia, l’Envoyé spécial du Secrétaire général des NU pour la région des Grands Lacs, lors des cérémonies officielles de la fermeture du bureau.
Avec le soutien de l’ONU et de ses partenaires, de la sous-région et de l’Union africaine, poursuit-il, le gouvernement et le peuple burundais ont enregistré des progrès majeurs et indéniables dans la consolidation de la paix et la réconciliation nationale depuis 2015.
« Certes, comme ailleurs, les défis persistent encore. Nous savons tous que la consolidation de la paix, le développement et la réconciliation sont des entreprises de longue haleine qui exigent de la patience et de persévérance. » Selon Huang Xia, la vision du chef de l’Etat d’un Burundi plus prospère et réconcilié avec lui-même semble, chaque jour, prendre forme de manière progressive. « Le Bureau de l’envoyé spécial du SG tire sa révérence. Mais la grande famille des NU, elle, reste bel et bien présente. L’équipe-pays reste résolument engagé aux côtés de l’Etat et du peuple burundais dans le renforcement de la coopération. »
« La présence du bureau n’est plus nécessaire »
« La page se tourne, le départ s’annonce déjà, mettant fin à la mission officielle du Bureau au Burundi après cinq ans d’excellentes et productives prestations dans sa dynamique de soutenir un dialogue inter-burundais inclusif et règlement pacifique du conflit, ainsi que les efforts nationaux visant à instaurer une paix durable », va souligner Isidore Ntirampeba, secrétaire permanent au ministère des Affaires étrangères. « Qu’il me soit donc permis de vous prendre à témoins oculaires de la cohabitation pacifique des Burundais, de la sécurité sur tout le territoire burundais, de la tranquillité et de la paix recouvrée, des efforts consentis pour lutter contre l’impunité et la corruption, de la libération des milliers des détenus par la grâce présidentielle». Isidore Ntirampeba évoque aussi le retour massif des réfugiés burundais en provenance de la quasi-totalité des pays d’asile ainsi que des efforts en cours en vue de la normalisation de relations diplomatiques avec des partenaires sur le plan bilatéral et multilatéral.
Isidore Ntirampeba précise que la présence de l’ONU à caractère exclusivement politique n’est plus pertinente. « Seule sa présence à caractère socio-économique à travers l’Equipe pays pour accompagner le Burundi dans ses efforts de développement socio-économique est nécessaire ». Et de souligner que le Burundi bénéficie déjà du soutien des NU à travers son Equipe – pays avec qui d’excellentes relations de travail ont déjà été établies notamment dans le cadre de leur soutien au Programme national de Développement (Burundi 2018-2027). « Les enjeux et orientations stratégiques sont entre autres : une croissance soutenue et inclusive pour une résilience économique et un développement durable, une gouvernance axée sur la sauvegarde de la souveraineté nationale, la sécurité, et la gouvernance, les mécanismes efficaces de mobilisation des ressources et capitalisation de la coopération et la recherche du financement innovant».
Des relations souvent houleuses
Etabli en juillet 2016 par la résolution 2303 du Conseil de sécurité de l’ONU, le mandat principal du Bureau sous la conduite de l’Envoyé spécial était de travailler avec le gouvernement burundais et les autres parties prenantes concernées ainsi qu’avec les autres partenaires sous-régionaux, régionaux et internationaux, pour soutenir un dialogue Inter-Burundais inclusif ainsi que les efforts nationaux visant à instaurer une paix durable.
Le Bureau était aussi appelé à collaborer avec toutes les parties prenantes, y compris le gouvernement, l’opposition, les partis politiques, la société civile, les chefs religieux et à la mise en place de mesures de confiance afin d’améliorer la situation des droits de l’homme et de la sécurité, et de créer un environnement propice au dialogue politique.
Néanmoins, les relations entre les Nations unies et les acteurs politiques n’ont pas été des plus chaleureuses. On se souvient qu’en juin 2015, l’envoyé spécial de l’ONU pour les Grands Lacs, Saïd Djinnit, a jeté l’éponge de son poste de médiateur au Burundi. Il avait été récusé par les opposants à un 3ème mandat de feu président Pierre Nkurunziza.
Après la publication d’un rapport accablant des experts onusiens, Gitega a suspendu sa coopération avec le bureau du Haut-commissariat aux droits de l’Homme au Burundi. Dans la foulée, il s’est retiré de la Cour pénale internationale (CPI). De plus, il s’est opposé à la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU d’envoyer 228 policiers. En 2016, le gouvernement du Burundi a même exigé le départ de l’Envoyé spécial du SG des NU, Jamal Benomar.
Pour un défenseur des droits de l’Homme qui a requis l’anonymat, c’est un sujet éminemment politique. Selon lui, la présence de l’ONU au Burundi a suscité pendant des années des tensions entre l’organisation et les autorités burundaises, qui contestaient le fait que leur pays soit sous observation du Conseil de Sécurité. « La fermeture est une décision regrettable. Le bureau ferme sans avoir pu organiser un véritable dialogue entre les parties en conflit depuis l’éclatement de la crise de 2015. L’élection d’Evariste Ndayishimiye n’a pas résolu la crise, Ndayishimiye s’est malheureusement engagé dans la continuité de la politique de feu président Nkurunziza. » Pour lui, la fermeture du Bureau de l’Envoyé spécial, certes exigé par les autorités burundaises, sonne à la fois comme une main tendue au nouveau régime et comme un message d’impuissance de la communauté internationale. « Pour la population burundaise, c’est un mauvais signal. »
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Tatien Sibomana : « Le Bureau de l’Envoyé spécial du SG de l’ONU a raté sa mission»
« Le Bureau a échoué dans tous les aspects de ses missions », analyse l’acteur politique, Tatien Sibomana. Selon lui, le Bureau avait été créé pour assainir le climat politico-sécuritaire qui prévalait dans le pays. Et cela à travers un dialogue inclusif. « Vous savez que le dialogue s’est clôturé en queue de poisson. Tous les problèmes qui étaient sur la table sont restés comme tels. »
Le 2e échec de ce Bureau, d’après Tatien Sibomana, est qu’au niveau sécuritaire, les problèmes qui existaient au moment de sa création n’ont pas également trouvé de solutions. « En conséquence, tant que la situation politico-sécuritaire n’est pas assainie, les aspects socio-économiques ne marchent pas à merveille. Ce qui me laisse croire que le Bureau de l’Envoyé spécial du SG de l’ONU a raté sa mission au Burundi. Ni le dialogue n’a été conclu, les droits de l’Homme se recherchent encore pour ne pas dire qu’ils sont toujours violés de façon massive. On entend chaque jour des cadavres qui sont retrouvés ici et là. Sans oublier le verrouillage politico-médiatique. »
M. Sibomana estime que les Nations unies se sont rendu compte qu’elles n’ont aucun rôle à jouer, ils ont jugé bon de fermer. « La Russie et la Chine essaient d’occuper la place qui était dévolue à l’Occident. Ces deux puissances ne manquent pas d’influencer certains pays africains auprès du Conseil de sécurité de l’ONU. Ce qui laisse présager qu’elles ont joué une certaine influence dans la prise de cette décision. » Pour lui, cela risque de gêner les droits de l’Homme au Burundi, car la Russie et la Chine aujourd’hui s’opposent avec l’occident sur cette question.
Tatien Sibomana demande à Antonio Guterres, Secrétaire général des NU, de faire extrêmement attention. « Il y a beaucoup de textes et des valeurs qui doivent être défendus par l’ONU. S’il laisse la Russie et la Chine continuer à influencer les résolutions prises par le Conseil de sécurité, je me demande si réellement les vraies missions contenues dans la Charte des NU ne risquent pas de voler en éclats. »
Kefa Nibizi : « on avait confié à ce bureau une mission très difficile»
« D’une part, la fermeture de ce bureau est venue au moment opportun d’autant plus que le Conseil de sécurité avait d’abord décidé de retirer le Burundi sur son agenda et que les rapports périodiques sur le Burundi ne sont plus nécessaires », indique Kefa Nibizi, le président du Conseil pour la Démocratie et le Développement durable du Burundi (CODEBU-Iragi rya Ndadaye). D’après lui, le Conseil de sécurité a constaté que le Burundi n’a plus besoin d’un accompagnement politique direct suite à l’évolution de la situation sociale et politico-sécuritaire.
Concernant le bilan de ce bureau, Kefa Nibizi trouve qu’il est difficile de l’établir. « C’est vrai que ce bureau a essayé de rapprocher les uns et les autres par plusieurs mécanismes, à intérieur ou à l’extérieur. Le dialogue qu’il était venu accompagner s’est terminé en queue de poisson du fait qu’il s’agissait d’un dialogue entre des partenaires caractérisés par des rapports de force disproportionnés. » Pour M. Nibizi, on avait confié à ce bureau une mission très difficile. « Le bureau a fait ce qu’il pouvait, mais les conditions n’étaient pas réunies pour qu’on puisse aller de l’avant. »
Gustave Niyonzima : « Le Burundi devrait continuer à être suivi par les Nations-Unies »
Selon ce juriste et défenseur des droits humains, la crise politique datant de 2015 n’est pas encore terminée. « Le Burundi est toujours plongé dans une crise politique meurtrière marquée par des violations massives des droits humains à savoir assassinats ciblés contre les opposants, tortures atroces, disparitions forcées, viols comme arme de guerre, incarcérations arbitraires et illégales contre les opposants, etc. » De plus, poursuit Gustave Niyonzima, plusieurs milliers de Burundais sont toujours en exil et sont poursuivis jusque dans leurs camps de réfugiés. « Les crimes de droit international sont toujours perpétrés au jour le jour et sans poursuites judiciaires. Ceux qui perpètrent ces crimes odieux sont des préposés de l’Etat ainsi que les Imbonerakure du parti au pouvoir qui demeurent protégés et impunis. »
Pour Gustave Niyonzima, le Bureau de l’envoyé spécial du SG des NU devait normalement être maintenu pour assurer la supervision et lancer des alertes pour tous ces crimes odieux. « Le Burundi devrait continuer à être suivi par les Nations-Unies via leur envoyé spécial. »
Quant au bilan de ce bureau de l’envoyé spécial, cet activiste des droits humains, trouve qu’il a toujours eu des bâtons dans les roues via les obstacles du gouvernement burundais afin de ne pas clarifier, déterminer et prouver les crimes perpétrés contre les opposants au Burundi « Il n’a fait qu’assister impuissamment face à ces crimes perpétrés quotidiennement. » D’après Gustave Niyonzima, le bureau n’a pas d’ailleurs fait des efforts intensifs pour inciter l’ONU à mettre en œuvre les résolutions prises par le Conseil de sécurité sur le Burundi.
Hamza Venant Burikukiye : « Un bilan positif »
Pour le représentant légal de CAPES+, le Burundi ayant évolué vers la stabilité politique et démocratique suite aux efforts déployés dans la consolidation de la paix et de la sécurité, l’accompagnement politique n’a plus raison d’être. « En témoigne la présence des troupes burundaises dans le maintien de la paix dans des pays en déstabilisation politique et sécuritaire comme en Somalie, la République centrafricaine ainsi que le retrait du Burundi sur l’agenda du Conseil de Sécurité des Nations Unies et la levée des sanctions par l’Organisation internationale de la Francophonie, etc. »
Pour Hamza Venant Burikukiye, ce jour restera gravé dans la mémoire comme le jour de la victoire, d’honneur voire du renforcement de l’indépendance nationale. Selon lui, cette fermeture n’est pas une rupture des relations entre le Burundi et les NU. D’après lui, le bilan de ce bureau onusien reste positif et salutaire surtout dans la consolidation de la paix et le dialogue inter-burundais.
Simon Bizimungu : « Ce n’était pas encore le moment de fermer »
Pour le Secrétaire général du parti CNL, il n’était pas encore le moment de fermer ce bureau. « Il y a des choses qui ne marchent pas encore dans plusieurs domaines. » Selon Simon Bizimungu, ces travailleurs onusiens ont essayé d’accomplir quelques-unes de leurs missions. « Ceux qui disent que c’est un échec de la part de l’ONU ont quelque part raison. Concernant le dialogue inter-burundais, il y a des choses qui n’ont pas marché. » Toutefois, Simon Bizimungu ne jette pas le tort aux seules Nations unies. « C’est la sous-région qui était chargée de faire aboutir ce dialogue inter-burundais mais malheureusement elle n’a rien fait ».
Olivier Nkurunziza : « Nous avons apprécié leurs contributions »
« Nous constatons que le Bureau a aidé dans le rapprochement des acteurs politiques. De plus, il a soutenu le facilitateur et médiateur dans le conflit burundais. Nous trouvons qu’ils ont beaucoup aidé dans l’appui technique et financier », confie le Secrétaire général du parti Uprona. « Comme le Conseil de sécurité des NU a jugé que la situation est normale après les élections de 2020, la raison de vivre de ce bureau n’a plus de sens. Le Coordinateur-résident du système des NU va justement continuer à contribuer dans le sens du développement durable du Burundi. »
Le parti Uprona indique avoir apprécié la collaboration avec ce bureau et leurs contributions. « Je pense que ce n’est pas la fin. On ne souhaite pas que le bureau revienne, car cela voudrait dire que le pays est en insécurité. Nous allons continuer à collaborer autrement et par d’autres canaux», conclut-il.
Pour réussir une mission, elle doit être clairement définie et les besoins clairement identifiés avec des objectifs à atteindre. Depuis 2015, on parle d’une crise parfois aves des propos très alarmants.
Au commencement, une histoire de 3ème mandat et donc un mandat de trop ! S’il faut abattre les hommes et femmes qui se sont éternisés au pouvoir, le Burundi ne ferait pas un poids devant Museveni (35 ans de pouvoir), Obiang Nguema (41 ans), issayas (30 ans), Paul Biya (40 ans), Kagame (21 ans) etc.. Si l’Onu devait régler des questions de mandat, il fallait chercher ailleurs !
De la violation des droits de l’homme ensuite ! Oui il y a des violations des droits de l’homme au Burundi mais ce pays en détient le monopole au point que le monde y focalise son attention ? Je ne pense.
Des hommes et femmes ont rivalisé « en propos » : génocide en cour, génocide en préparation, génocide imminent etc…ce génocide n’a pas eu lieu, ni en 2015, ni en 2021 ! Et pourtant des hommes et femmes qui semblent avoir fait du combat pour les droits de l’homme un monopole persiste, des écrits à l’appui, que le pays est au bord du génocide ! L’on arrive à se demander si réellement ils ne souhaitent pas un drame pour le pays qui les a vu naître (pour ne pas dire : leur pays). Si la présence de l’ONU au Burundi était aussi pour prévenir à cette catastrophe tant chantée, quel but à y rester ?
Souvenons-nous qu’au commencement, il y eut l’ONU avec son câble diplomatique qui alertait sur la préparation d’un génocide, qu’il y a eu cet appel au secours du président du Frodebu pour faire face à ce génocide qui n’était plus à cacher, qu’il y a eu cette mobilisation tout azimut du monde à travers conférence, colloque, tribunal Roussel, saisine de la cour pénale internationale, insultes, conseil des droits de l’homme etc…tout ça pour démolir ce beau pays, « abolir son peuple », « abattre ses dirigeants », mettre à genoux son économie.
Après ces essais, quelle place aurait encore un bureau de l’envoyé spécial au Burundi si cette même ONU à travers son Conseil de Sécurité a décidé de retirer le Burundi de son agenda politique ?
« warapfunywe ntiwapfuye ». N’en déplaise à ses détracteurs !