La saison culturale B est en cours sur toute l’étendue du territoire national. Les agriculteurs de la province de Mwaro s’y préparent activement. Ils disent que les engrais minéraux et les semences sélectionnées, éléments incontournables dans la culture des champs, ne sont pas en quantité suffisante. L’administration locale tranquillise.
« Il m’a été difficile de recevoir de l’engrais minéral au début mais j’ai pu en avoir. Tout le monde n’a pas pu avoir cette chance. Les gens vont à la commune pour récupérer les commandes qu’ils ont faites mais ils reviennent bredouilles et désemparés. Ceux qui n’ont pas conservé les semences de la précédente saison s’en procurent au marché et c’est cher. Un kg de haricots coûte 3500 FBu », raconte Esther Nsabimana de la commune Gisozi.
Les gens commencent à labourer leurs champs pour les préparatifs de la saison culturale B, avons-nous constaté le 19 février 2025 dans la province de Mwaro. Plusieurs agriculteurs rencontrés se plaignent du manque d’engrais minéraux et du difficile accès aux semences sélectionnées qui coûtent chères sur le marché.
Esther Nsabimana précise que les agro- entrepreneurs qui ont de grandes surfaces achètent presque tout le stock de fertilisants agricoles. Ainsi, ceux qui n’ont pas de grands moyens ne peuvent plus s’en procurer.
Des agriculteurs de la commune Kayokwe disent qu’ils ont déjà payé l’engrais minéral mais qu’ils n’ont pas encore réceptionné leurs commandes.
Marie Nahayo de la colline Gihinga, témoigne qu’elle ne reçoit pas la fumure comme il se doit alors qu’elle a déjà payé sa commande. « J’ai un bordereau qui atteste cela.»
Elle souligne qu’elle a en abondance les semences sélectionnées. Pour les espèces dont elle ne dispose pas, elle s’en procure auprès des ONG qui sponsorisent les activités agropastorales.
Selemani Nyandwi de la colline Gihinga, sous-colline Rugenge, affirme que pour la saison culturale B, il a seulement la fumure organique fabriquée par lui-même. « Les engrais minéraux ne sont pas disponibles. Le gouvernement ne nous en fournit pas. » Il fait remarquer que les stocks sont pourtant remplis. Il ne comprend pas donc comment on ne lui donne pas les engrais minéraux.
Concernant les semences sélectionnées, il trouve qu’elles coûtent chères. En effet, un kg s’achète 3500 FBu pour le haricot alors que l’année passée, c’était entre 2 500 et 2 700 FBu. « Les semences sélectionnées ne sont pas facilement accessibles. Pour les pommes de terre, aujourd’hui c’est 4 000 FBu le kg. C’est aussi cher.»
Les agriculteurs plaident qu’on leur fournisse à temps les fertilisants agricoles. Ils ne veulent pas que cette saison de pluie dite « Impeshi » s’achève sans avoir vaqué à leurs activités champêtres. « Celui qui reçoit tôt les engrais cultive avec en train son champ puisqu’il espère un grand rendement. Celui qui n’a pas encore reçu cela est terriblement désavantagé. Celui qui ne plante pas durant ces deux dernières semaines risque de voir cette saison se terminer sans qu’il ait planté. Et tout cela constitue une grande perte pour lui. Nous devons mélanger la fumure animale avec l’engrais minéral. Si on utilise seulement la fumure minérale, on n’obtient pas une grande production », souligne une dame creusant des sillons dans son champ pour y planter le haricot.
Des faits avérés
Libère Nzokiratevye, directeur provincial de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage affirme qu’effectivement, il y a un problème concernant les engrais minéraux dans la province de Mwaro. Selon les chiffres à sa disposition sur les commandes faites, il y a encore un manquant par rapport à la quantité dont ils ont besoin.
« Les agriculteurs ont fait la commande de l’engrais de la Fomi Imbura qui s’élève à 3106 tonnes. Nous avons reçu une quantité d’environ 1 176 tonnes donc 40 % de la demande ». Il avoue que les 60 % qui manquent vont être complétés par l’engrais Otesha provenant de la Fomi de la Tanzanie.
Il tranquillise en disant que le peu qui arrive au fur et à mesure est donné aux agriculteurs qui vont aller l’utiliser pour semer dans leurs champs. « Ceux qui sont prioritaires sont ceux qui vont planter le haricot vert grimpant. Pour ceux qui plantent le haricot nain, ils ne sont pas encore en retard. Ils ont jusqu’au 15 mars pour planter », précise-t-il.
Il ajoute que là où ils ont un gros souci, c’est au niveau du fertilisant urée. Les agriculteurs avaient précommandé environ 700 tonnes mais dans les stocks de la province il n’y a que 2 tonnes. « L’urée n’est pas disponible en quantité voulue sur tout le territoire national. Mes supérieurs hiérarchiques sont conscients de cela et ils sont à la recherche de solutions »
Il mentionne qu’il y a des gens qui n’ont pas reçu l’urée pour la saison précédente. « On ne peut pas leur en fournir même maintenant. Les autorités nous ont dit que l’urée n’est pas fabriquée ici au Burundi. La Fomi auprès de laquelle nous nous approvisionnons en engrais minéraux importe l’urée. Nous avons la liste de ceux qui en avaient fait la commande et qui n’ont pas pu recevoir cet engrais minéral. Nous allons les régulariser au fur et à mesure. Nous avons l’espoir que ceux qui sont chargés de fournir cet engrais vont le faire á temps. »
Il souligne que ce problème sera résolu et que l’urée sera utilisée pendant les autres activités de champ notamment pendant le sarclage ou le buttage.
Une contradiction
« Les agriculteurs ont un accès aux graines de semences sélectionnées. Les multiplicateurs de semences en ont déjà en quantité suffisantes, surtout la pomme de terre et le haricot. », indique Libère Nzokirantevye. Il invite aussi les autres provinces à venir s’en procurer chez eux.
Cependant, Marc Bacanamwo, multiplicateur de semences dans la province de Mwaro et secrétaire général du Collectif des producteurs de semences du Burundi ne le voit pas de cet œil. Selon lui, il y a un problème de semences sélectionnées de pomme terre. Cela a été causé par l’arrivée tardive des pluies en saison culturale A dite « Agatasi « . « Beaucoup d’entrepreneurs semenciers ont planté vers le mois d’octobre et la pomme de terre a un cycle végétatif d’au moins 4 mois. Donc, la récolte a débuté vers le mois de janvier 2025. Elle bat son plein vers ce mois de février et on continue les récoltes vers ce mois de mars. »
Il précise que pour cette saison, ils vont avoir du mal à obtenir des semences germées qui pourraient donner naissance à d’autres semences pour la saison culturale C de 2026.
« Les semences de haricot, de soja et de blé ne sont pas aussi épargnées. En effet, à cause des changements climatiques, il y a eu une carence de pluies durant tout ce mois de février. Donc, la production sera vraiment minime. », se lamente-t-il.
A cet effet, il plaide auprès du gouvernement, des partenaires techniques et financiers pour faire de l’irrigation sur leurs terrains.
« L’Institut des Sciences agronomiques au Burundi (Isabu) a besoin d’une subvention. C’est lui qui fournit les semences de prébase utilisées par les entrepreneurs semenciers. Les infrastructures et le matériel utilisé dans l’irrigation coûtent chers. », ajoute-il. Il souligne que si rien n’est fait, il sera difficile de faire face aux changements climatiques.
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