Vendredi 22 novembre 2024

Économie

Muyinga, le haricot interdit !

25/01/2017 10

Les commerçants ne sont plus autorisés à vendre le haricot hors de la province Muyinga. Cette décision du gouverneur a créé polémique.

Les commerçants n'ont plus le droit de faire sortir les haricots hors de Muyinga
Les commerçants n’ont plus le droit de faire sortir les haricots hors
de Muyinga

Le gouverneur de Muyinga vient de prendre une décision qui fait polémique : les commerçants ne peuvent plus faire sortir le haricot hors de la province Muyinga. «C’est quoi cette mesure?», s’interroge un commerçant de Muyinga. Les grossistes des haricots fustigent cette mesure. «On pensait que la circulation des biens est garantie sur tout le territoire ?», se demande un grossiste de la province Kayanza. «Est-ce que le gouverneur a le droit de prendre cette décision?», s’interroge un autre. Ces commerçants ne décolèrent pas. D’après eux, ce n’est pas seulement en province Muyinga que l’administration a pris cette décision. A Kirundo, c’est la même pratique. «Je suis allé chercher à Kirundo des haricots pour mes élèves. J’ai été refoulé», témoigne un directeur d’école de Muyinga.

«C’est pour nous protéger», explique le gouverneur de la province Muyinga, Aline Manirabarusha. D’après elle, la récolte a été mauvaise et elle pense que la prochaine le sera aussi. «Des commerçants en provenance d’autres provinces viennent et raflent toute notre récolte. Nous ne voulons pas crier à la famine après l’épuisement de nos stocks.» Aline Manirabarusha fait savoir qu’elle a donné l’ordre aux administrateurs d’être vigilants. «A l’intérieur de la province, c’est permis. Mais chaque grossiste doit nous dire la destination de ces haricots.» Selon le gouverneur, il existe des commerçants qui stockent les haricots pour les revendre au prix fort en cas de pénurie. D’après les fournisseurs des écoles à régime d’internat, des camps militaires ou de police, cette mesure les perturbe beaucoup car ils doivent demander la permission à l’administration provinciale. «Nous accusons du retard dans nos livraisons. Cette mesure doit être supprimée», indiquent-ils.

«C’est du nouveau!»

Aimable Nkunzumwami, assistant du ministre du Commerce, indique qu’ils ne sont pas au courant de cette mesure. «Nous pensions qu’il y avait une circulation libre des marchandises.» Même réponse de la part de Térence Ntahiraja, porte-parole du ministère de l’Intérieur et de la formation patriotique. «C’est du nouveau, pour moi.» Il indique qu’il était uniquement au courant du cas de Kirundo. «Pour la province de Kirundo, c’est un cas exceptionnel.» D’après lui, le gouverneur de Kirundo a pris cette décision à cause de la famine qui sévit dans cette région. «Des gens venaient avec des camions et partaient avec des tonnes et des tonnes de haricots. Il fallait empêcher cela.»

Pour le cas de Muyinga, Térence Ntahiraja indique que le gouverneur a le droit de prendre des mesures à court terme pour la sécurité des biens et des personnes. «La mesure prise par le gouverneur n’est pas une loi. C’est une façon de réguler ce commerce.» Toutefois, il indique qu’il faut une éducation de la population car cette dernière a tendance à vendre toute la récolte. «Sinon, la circulation des biens est permise sur tout le territoire burundais.»

Bujumbura, victime de ces mesures?

A la Gare du nord sur la route Bujumbura-Bugarama, les grossistes des haricots se disent touchés par ces mesures. «Les haricots que nous vendons viennent de Kayanza, Ngozi ou Gitega.» Ils font savoir qu’ils n’ont plus le droit de s’approvisionner en provinces Kirundo et Muyinga. «On nous chasse quand nous y allons.»Toutefois, ils assurent qu’ils arrivent quelquefois à contourner ces mesures. «Nous payons des pots-de-vin au cours de tout le trajet.»

D’après ces commerçants, ces mesures ont un énorme impact sur les prix des haricots dans la capitale. «N’eût été ces mesures, les prix des haricots seraient très bas. Nous demandons la suppression de ces mesures.»

Forum des lecteurs d'Iwacu

10 réactions
  1. Congo

    Je ne connais rien de la circulation des biens mais j ai déjà assisté à Gitega à une vente de haricots en saison de récolte pour le mettre dans des entrepôts. Ceci pour créer au temps des semences une fausse pénurie qui fait flamber les prix. Le perdant était toujours le paysan alors que le commerçant gagnait plus de 70%. Si notre peuple était instruit alors je serai de accord avec une libre circulation des biens. Sans instruction il faut tjrs agir pour le peuple.

  2. RUGAMBA RUTAGANZWA

    L’incompétence de ceux qui gouvernent le Burundi, sans vision ni projet de société dépasse l’entendement. On ne sait pas qui fait quoi, où et comment..! Ridicule tout simplement… !

  3. Jereve

    Après avoir coupé les relations avec beaucoup de partenaires extérieurs, après avoir fermé les frontières avec le voisin du Nord, après avoir exigé que chaque ménage enregistre dans un cahier toute personne venant d’autres régions (ce qui est une entrave à la circulation des personnes), après avoir chassé toute personne et toute organisation nationale ou internationale pouvant porter un œil critique sur les agissements du pouvoir… La liste est aussi longue qu’une route. Il n’y a rien d’étonnant qu’on ferme aujourd’hui les frontières provinciales et communales pour bloquer la circulation des marchandises. Ne trouvez-vous pas qu’en nous enfermant dans nos coquilles, nous ouvrons grande ouverte la porte à la misère?

    • Bukuru

      Tout cela aura des conséquences graves pour notre pays. Nos autorités manquent de vision, de clairvoyances et de bonne logique. Est ce que les gens de Muyinga n’ont pas besoin des produits alimentaires qui viennent des autres provinces. Si Kayanza refusait que sa pomme de terre sort de la province, que ce qui se passerait. Le problème au Burundi est que nos autorités pensent qu’ils maîtrisent tout et les techniciens n’ont plus de place. Je suis sûr et certain que la province de Muyinga a un grand déficit alimentaire et elle devait s’ouvrir à l’extérieur au lieu de s’enfermer sur elle. Aussi, les paysans de Muyinga n’ont pas d’autres ressources monétaires palpables autres que la vente du haricot. Où vont-il trouver l’argent pour acheter le sel, le sucre, la farine de mais/manioc, etc. Vous abusez de l’analphabétisme de la population madame le gouverneur!

  4. Bolingo

    AHHH , le Burundi est devenu un vrai capharnaüm où chacun peut décider un bon matin de passer outre les lois en vigueur, dit-on l’exemple vient d’en haut: interdiction d’exporter des marchandises au Rwanda. Et si chaque province décidait d’abroger la loi sur la libre circulation des biens, Le Burundi serait le premier pays Locavore, donc consommer local :
    – Rumonge: huile de palme et ndagala et le fufu.
    – Cibitoke: tomates et bananes et le fameux Rugombo.
    – Bugarama: tous végétariens par contrainte: c’est bien pour la santé.
    – Kirundo et Muyinga: Haricovores.
    Et bien vous pouvez compléter la liste.

  5. Dr J.Isaac Bizimana

    Non et non! Il n’est pas dans les prérogatives d’un Gouverneur de prendre des mesures entravant la circulation des biens et des personnes au sein d’une même nation! C’est illégal et contre-productif! Que se passerait-il si les provinces de Bujumbura, Rumonge ou Makamba interdisaient la vente des indagara ailleurs qu’a Bujumbura pour par exemple permettre au lac de se repeupler ? Et surtout que font ces dirigeants qui s’étonnent ne pas etre au courant de ces mesures irresponsables et surtout illégales maintenant qu’ils sont au courant ?

  6. Kabingo Dora

    Je ne comprends pas pourquoi les gens ne comprennent la raison de ces interdictions bidons de laisser les produits agricoles circuler librement de provinces à provinces: cette mesure vient  » d’en haut » . Il s’agit d’une politique globale visant à affamer  » les minorités de Bujumbura » qui n’acceptent pas le 3eme mandat. Ni plus ni moins . Et lorsque je parle de minorité vous comprennez certainement ce que je veux dire. On aura tout vu dans ce pays. Le pouvoir central va finir par se déliter totalement , on aura alors des « roitelets » dans diffférentes provinces .

    • Bakari

      @Kabingo Dora
      « Et lorsque je parle de minorité vous comprennez certainement ce que je veux dire. »

      Franchement je ne pige rien de ce que vous voulez dire par vos minorités! Faites-moi un dessin svp!
      Par ailleurs, la circulation des biens & services dans l’EAC n’est pas pour demain à ce que je vois, si déjà celle intra-muros est encore aussi problématique!

  7. MASABO

    « «C’est du nouveau!»

    Aimable Nkunzumwami, assistant du ministre du Commerce, indique qu’ils ne sont pas au courant de cette mesure. «Nous pensions qu’il y avait une circulation libre des marchandises.» Même réponse de la part de Térence Ntahiraja, porte-parole du ministère de l’Intérieur et de la formation patriotique. «C’est du nouveau, pour moi.» Il indique qu’il était uniquement au courant du cas de Kirundo. «Pour la province de Kirundo, c’est un cas exceptionnel.» D’après lui, le gouverneur de Kirundo a pris cette décision à cause de la famine qui sévit dans cette région. «Des gens venaient avec des camions et partaient avec des tonnes et des tonnes de haricots. Il fallait empêcher cela.»
    Mes excellences, voici l’intérêt, entre autre, de la presse. Vous informer ! La liberté totale d’expression vous aiderait à améliorer la gouvernance. Si on ne vous chante que tout va très bien, cela vous rendra moins imaginatif.

    • nunu nado

      Empecher La vente des produits agricoles dans les autres provinces du meme pays : 1) C’est empecher la libre circulation des personnes dans son propre pays et de 2) C’est empecher la libre circulation de la monnaie. Or, la monnaie doit circuler pour conserver sa vraie valeur d’echange mondiale
      Ceux qui vendent le haricot vont acheter autre chose dont ils ont besoin ailleurs que dans leurs provinces. Les gens de Muyinga et Kirundo vont-ils manger leurs recoltes de haricot seulement et
      jusque quand?

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