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Société

Mutimbuzi : Une femme discriminée et chassée

03/04/2019 Commentaires fermés sur Mutimbuzi : Une femme discriminée et chassée
Mutimbuzi : Une femme discriminée et chassée
Joselyne Kwizera : « Mes enfants meurent de faim.»

Joselyne Kwizera a été expulsée du toit conjugal par les fils de son mari. Motif : elle a un enfant albinos. Les activistes des droits de la femme s’indignent et plaident pour les droits de cette femme.

11h, lundi 25 mars. Nous sommes sur la 14e avenue de la colline Kirekura, zone Maramvya,  en commune Mutimbuzi de la province Bujumbura. La colline se situe au sud de la route nationale Bujumbura-Bubanza.

A quelques 15 km de la ville de Bujumbura. Cette localité est une plaine verdoyante. On y voit différentes cultures : haricots, maniocs, riz, arbres fruitiers… Les habitations présentent un look diversifié. Des maisons en briques cuites,  des maisonnettes en briques adobe et d’autres encore en bambous.…

Joselyne Kwizera habite à la 14e avenue. Une avenue quasi impraticable, très boueuse. Cyclistes et motards y passent très difficilement.

C’est sur cette avenue que nous rencontrons Joselyne Kwizera. Cette veuve de 33 ans, cultivatrice, est mère de 4 enfants dont une albinos de six ans. Larmes aux yeux, elle  nous salue tout de même. Mais difficile  pour elle  de sortir la voix. Elle sanglote. Un moment de silence. Après, elle s’efforce de raconter son calvaire.

« Tout commence après le décès de mon mari en juillet dernier. Après sa mort, j’ai subi des menaces de la part de ses fils. Ces derniers disent que la famille n’a jamais connu d’albinos. Ils m’accusent donc d’avoir  commis l’adultère ». Suite à ces menaces et chantages, Mme Kwizera quitte le toit conjugal. « Je suis allée louer une maison ailleurs. Mais à un moment donné, j’ai été incapable de payer le loyer et j’ai été chassée ».  Elle habite une maisonnette construite  par les bienfaiteurs catholiques.

De son vivant, raconte-t-elle, son mari avait donné à cet enfant albinos deux parcelles, l’une pour  la culture du manioc et du haricot,  de 15m sur 30, et l’autre pour le riz, de 20m sur 50. Elle avait une propriété de palmiers à huile et de bananiers à exploiter pour faire vivre et scolariser l’enfant. Mais après la mort  de mon mari,  poursuit-elle, ses fils m’ont empêchée d’y cultiver. « Mes enfants meurent de faim. Il arrive même qu’ils passent des nuits sans manger ». Et de demander aux âmes charitables de lui venir en aide.

Ce qui est inquiétant, ajoute-t-elle, c’est que ces garçons commencent  à morceler cette propriété et à vendre quelques lopins de terre.

Joselyne Kwizera affirme avoir saisi l’administration locale. Cette dernière s‘est penchée sur la question. Mais, regrette-t-elle, ses beaux-fils ne respectent pas les décisions prises par l’autorité collinaire.

Contacté à propos de ces accusations,  Donatien Ntirampeba, un des fils du défunt, s’est refusé à tout commentaire.

Que justice soit faite

A ce propos, Nzirukanyi Simon,  chef de colline, dit être au courant du problème. Il affirme que cette veuve a été expulsée d’une façon injuste. Il précise  que les propriétés de cette veuve ont été accaparées par les fils de son mari.

Cette autorité promet de régler ce conflit : « Nous envisageons de réunir les parties au conflit pour rétablir la veuve dans ses droits. »

Même approche du côté des leaders communautaires. Joselyne Riziki, activiste des droits humains dans cette localité, dit avoir contacté la victime sur ce dossier. C’est un comportement rétrograde, dit-elle,  qu’il faut à tout prix décourager. « Nous allons réunir les parties au conflit pour leur prodiguer des conseils ». En cas de non suivi de ces derniers,  martèle-t-elle, nous allons inciter la veuve à saisir la justice.

Jean Martin Bizimana, secrétaire général de l’association Albinos sans frontières, dénonce cette expulsion. «Les droits de cette veuve ont été bafoués. Mettre au monde un enfant albinos  n’est pas un péché ». M. Bizimana précise que son association va intervenir en faveur de cette femme. Il promet de collaborer avec l’administration communale pour rétablir cette veuve dans ses droits. Et d’insister : « Au besoin, nous allons saisir la justice.»

Espérance Ntirampeba, présidente de l’association Solidarité des femmes burundaises pour le bien-être social et le progrès, se dit, quant à elle, étonnée de tels agissements. C’est de la discrimination, s’indigne-t-elle, qui continue envers les femmes. «Cela relève de l’ignorance et des croyances obscurantistes ». Et d’interpeller la victime à porter plainte devant la juridiction compétente.

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