Vendredi 11 avril 2025

Environnement

Mukaza/Gestion des déchets ménagers : les citadins crient au secours

07/03/2025 Commentaires fermés sur Mukaza/Gestion des déchets ménagers : les citadins crient au secours
Mukaza/Gestion des déchets ménagers : les citadins crient au secours
Dans cette parcelle de Bwiza, des braseros n’ont presque plus de place. La cuisine est pleine de déchets ménagers

Puanteur, crainte des maladies dites des mains sales, …. Telle est la situation qui règne dans plusieurs ménages de la commune urbaine de Mukaza. Ils accusent Bujumbura Cleaning Company (BCCO) chargé de la collecte des déchets ménagers de ne plus respecter le contrat. Une situation que confirme l’administration.

« Que voulez-vous qu’on dise ? Regardez dans cette cuisine. Il n’y a plus de place pour les ustensiles. Les déchets ménagers ont débordé parce que ceux qui sont chargés de leur collecte viennent de passer plus d’un mois sans le faire. C’est terrible. Notre santé est menacée », lâche un habitant de Bwiza, à la 9e avenue, en commune urbaine de Mukaza.

Il indique que, selon le contrat, BCCO devait passer chaque mois pour enlever ces déchets ménagers. « Ce qui est très frustrant, c’est que même s’ils viennent après deux mois, ils exigent le paiement en totalité alors qu’ils ont enregistré un mois de retard. C’est du vol tout simplement », charge cet habitant, s’exprimant sous anonymat pour des raisons personnelles.

Il n’est pas le seul à se lamenter. « Quand le vent souffle, c’est de la puanteur dans toute la parcelle. Parce que ces déchets ne sont pas régulièrement enlevés. Nous craignons la survenance non seulement des maladies des mains sales mais aussi des maladies respiratoires. Les asticots qui sortent de ces tas de déchets nous envahissent dans nos maisons. Vraiment, BCCO devait se ressaisir », plaide le prénommé Gaspard, un autre habitant de Bwiza.

Le sexagénaire dénonce d’ailleurs un deux poids, deux mesures dans le travail de BCCO : « Il arrive des cas où on voit le camion circuler dans notre quartier. Mais, le constat est qu’il existe des parcelles régulièrement desservies alors que d’autres sont sautées sciemment. Quelle injustice ! »

A Nyakabiga, une autre zone desservie par BCCO, des lamentations aussi existent. « On ne sait plus ce qui se passe. Nous pouvons passer plusieurs mois sans voir un camion de BCCO venir récupérer ces déchets. Malheureusement, nous continuons de payer mensuellement. Quand les policiers viennent pour des fouilles perquisitions, quelques fois, ils exigent de leur montrer la quittance d’enlèvement des déchets ménagers », déplore la prénommée Joséphine, la quarantaine, une habitante de Nyakabiga, non loin du campus Mutanga. Pour elle, ce secteur est très mal organisé.

L’administration est au courant, BCCO se justifie

Contacté, Florent Nkerabahizi, administrateur de la commune urbaine de Mukaza a reconnu qu’il y a un sérieux problème au niveau de la gestion des déchets ménagers ces derniers mois. Avant de nous diriger vers l’association BCCO, il a avoué qu’il comprend les lamentations de la population : « C’est aussi notre constat. Nous avons essayé d’échanger avec les coopératives mais elles évoquent le problème du manque de mazout. »

Seulement, cet administratif rassure que la mairie est en train de suivre le dossier. « Car, c’est elle qui lui a donné le contrat. » Et malgré la persistance de ce problème de carburant, il demande aux coopératives qui enlèvent les déchets de faire de leur mieux.

A son tour, Eric Nsabumukiza, directeur commercial, des relations publiques et porte-parole de BCCO a indiqué qu’il existe aujourd’hui deux défis qui handicapent leur travail. D’abord, le manque du carburant. « Quand ce produit manque, nous faisons de notre mieux pour satisfaire nos clients mais sans carburant, les retards de collecte deviennent inévitables. »

Afin de résoudre le problème, il indique que la mairie se bat pour chercher des voies et moyens de trouver du carburant suffisant auprès de la Société pétrolière du Burundi, Sopebu. Mais, les litres mis à sa disposition restent insuffisants.

Ce qui fait que presque toutes les coopératives qui enlèvent les déchets ménagers ne sont pas servies selon leurs besoins.

Il évoque aussi un autre défi lié au lieu de déchargement. « Durant la saison pluvieuse, le tronçon qui mène vers là devient impraticable. La route est boueuse et glissante. Ce qui fait que des camions peuvent passer trois jours en attendant le déchargement. Ce qui entraîne des retards. »

Malgré ces défis, il tente de tranquilliser sa clientèle. « A nos clients, nous leur disons que toutes ces questions sont connues par les autorités municipales. La mairie est à l’œuvre pour que tous ces défis soient résolus. »


RENCONTRE

« En cas de non-respect des engagements, des pénalités doivent être appliquées »

Face à la problématique de gestion des déchets ménagers, Tharcisse Ndayizeye, environnementaliste et professeur d’Universités fait le point. Il propose quelques pistes de solution.

Aujourd’hui, malgré l’existence des coopératives chargées de collecter les déchets ménagers, des habitants de Mukaza se lamentent. Votre commentaire.

La situation de collecte des déchets au Burundi est effectivement préoccupante. Car, si la gestion des déchets ménagers n’est pas effectuée correctement, cela peut avoir des conséquences graves sur la santé publique et l’environnement. Une organisation efficace dans la collecte des déchets ménagers est essentielle pour prévenir ces risques. Ainsi, il y a quelques pistes pour améliorer cette gestion et en faire une opportunité de recyclage.

Comment le faire selon vous ?

Il faut d’abord une planification et la fréquence.

C’est-à-dire ?

Il est crucial de définir une fréquence de collecte des déchets claire et régulière en fonction du volume de déchets produit dans chaque zone. Ici, au Burundi, il n’y a pas d’études dans ce sens.

Par exemple, dans les quartiers résidentiels à forte densité comme Buyenzi, Bwiza, Kinama, Musaga, Kamenge, etc., les collectes pourraient être effectuées plus fréquemment (une fois par semaine), tandis que dans les zones moins densément peuplées, une collecte mensuelle peut suffire. Il est important que ces horaires soient respectés selon les contrats signés avec les ménages.

Il faut aussi une communication et une sensibilisation. Les citoyens doivent être informés de l’obligation de se débarrasser des déchets ménagers et de l’importance de séparer les déchets recyclables des autres.

Il faut respecter les horaires de collecte et utiliser des camions et bacs appropriés. Il faut éviter que la collecte des déchets devienne une source de propagation des déchets. Des campagnes de sensibilisation et de communication devraient être mises en place pour encourager les bonnes pratiques.

En outre, il faut un contrôle et de la responsabilité.

Concrètement, que voulez-vous dire ?

Là, les entreprises ou services chargés de la collecte des déchets doivent être soumis à un suivi rigoureux et à des audits réguliers pour vérifier que les contrats sont respectés. En cas de non-respect des engagements, des pénalités doivent être appliquées.

Il nous faut aussi des infrastructures et des équipements qui répondent aux normes. On doit s’assurer qu’il y a suffisamment de points de collecte, de bacs adaptés et d’espaces pour les déchets, afin que les habitants aient un accès facile à ces services.

Quels sont les risques sanitaires et environnementaux d’une mauvaise gestion des déchets ?
Oui, les déchets mal gérés représentent une menace importante pour la santé publique et l’environnement. Côté santé publique, les déchets non collectés peuvent entraîner la prolifération des maladies.

Les débris organiques en décomposition peuvent attirer des insectes et des rongeurs qui sont des vecteurs de maladies. En outre, l’accumulation des déchets peut devenir un terrain propice aux bactéries pathogènes.

Côté pollution environnementale, les déchets mal gérés, notamment les plastiques et autres matériaux non biodégradables, peuvent polluer les sols, les eaux souterraines et les océans menaçant ainsi la biodiversité et la qualité de vie des communautés locales. De plus, les gaz dégagés par la dégradation des déchets dans des conditions non contrôlées (comme dans les décharges à ciel ouvert) peuvent contribuer au réchauffement climatique.

Quid de leur recyclage et revalorisation ?

Le recyclage est une solution idéale pour transformer les déchets en ressources utiles. Ce qui réduit ainsi leur impact environnemental. Oui, lorsqu’ils sont correctement triés et gérés, les déchets peuvent être recyclés et transformés en produits nouveaux. Ce qui présente plusieurs avantages.

Lesquels ?

Il s’agit notamment de la réduction de l’encombrement des décharges. Le recyclage permet de réduire le volume des déchets envoyés dans les décharges. Ce qui contribue à leur gestion durable.

Il y a aussi la conservation des ressources naturelles. En recyclant les matériaux comme le papier, le plastique, le verre et les métaux, on peut réduire la consommation des ressources naturelles et diminuer l’empreinte écologique.

Il faut citer aussi la création de l’emploi. Le secteur du recyclage offre des opportunités économiques et peut contribuer à la création des emplois locaux dans la collecte, le tri et la transformation des déchets.

Quel message aux décideurs ?

Aux décideurs et aux responsables de la gestion des déchets, je dirais que :
« Les défis liés à la gestion des déchets sont immenses et doivent être pris au sérieux. Une gestion efficace, régulière et transparente de la collecte des déchets est indispensable pour protéger la santé publique et préserver notre environnement. Je vous encourage à veiller à ce que les services de collecte respectent les engagements contractuels et à investir dans des infrastructures modernes et adaptées. De plus, il est crucial d’encourager le recyclage et la valorisation des déchets pour en faire des ressources utiles, créant ainsi un cercle vertueux qui bénéficie à la fois à la communauté et à la planète. N’oublions pas que chaque action compte et que l’avenir de nos quartiers, de nos enfants et de notre planète en dépend. »

Il est aussi urgent de mettre en place des solutions durables et de renforcer la collaboration entre les autorités locales, les entreprises et les citoyens pour une gestion plus responsable des déchets.

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