Jeudi 21 novembre 2024

Société

Muhuta: quand le camp de travail permet aux jeunes en vacances de transcender les différences

29/08/2024 Commentaires fermés sur Muhuta: quand le camp de travail permet aux jeunes en vacances de transcender les différences
Muhuta: quand le camp de travail permet aux jeunes en vacances de transcender les différences
Des élèves en vacances déplacent des briques sur la colline Gabaniro.

Organiser des camps de travail pour les élèves en vacances est un moyen efficace de renforcer l’unité et d’éviter la propagation des messages de haine. Un encadrement de proximité qui porte ses fruits.

Sur la colline Gabaniro, dans la zone Gitaza, commune Muhuta, province Rumonge, des jeunes élèves en vacances participent à un camp de travail organisé par l’administration locale. Ils y fabriquent et transportent des briques, tout en étant sensibilisés à l’unité, la cohabitation pacifique et la lutte contre la propagation des messages haineux.

Jean Ndayizeye, élève de cette colline, souligne qu’il n’existe aucune forme d’exclusion, qu’elle soit politique, ethnique ou religieuse, dans le choix des participants à ces activités. « La diversité est bien présente. Nous venons de toutes les catégories sociales. C’est un moment d’unité pour contribuer au développement de notre commune et de notre pays. »

Sous anonymat, un autre élève explique que ces activités occupent les jeunes, les empêchant de tomber dans la manipulation politique pendant les vacances. « Nous sommes ici en tant qu’élèves pour fabriquer des briques, indépendamment de toute considération politique. On nous enseigne l’unité et la cohésion sociale. »

M.K, un autre participant, exprime sa fierté de contribuer au développement local. Il estime que ces briques peuvent aussi aider à la réhabilitation des maisons de veuves et d’orphelins. « Comme d’habitude dans notre quartier, nous sommes guidés par une morale. Nous nous informons pour contribuer au développement de notre pays. »

Un élève note que, lors des travaux, les jeunes n’hésitent pas à plaisanter entre eux, évoquant parfois leur origine politique et ethnique. « C’est normal. Par exemple, dire que quelqu’un avec un nez large est Hutu et un autre avec un nez pointu est Tutsi, sans aucune haine. »

Pour une autre jeune fille, les politiciens ne sont pas les seuls à semer la discorde; certains religieux, dit-elle, divisent également les gens lors du recrutement de fidèles. « Ils dénigrent certains pour gagner la confiance des autres. C’est pourquoi les jeunes doivent rester unis. »

Ces jeunes sont conscients que la propagation de la haine entre composantes sociales a eu des conséquences désastreuses dans le passé, notamment des crises cycliques avec des pertes humaines et matérielles. Pour eux, il est essentiel de rejeter tout message de haine ou de division. « Ce camp de travail nous rappelle que nous sommes tous les mêmes. Ceux qui tiennent des propos violents doivent être dénoncés et punis. »

Un vecteur de cohésion

Pour Aimable Sibomana, chef de colline de Gabaniro, les camps d’été ont une importance capitale pour renforcer l’unité et la cohésion. Lors des travaux de fabrication et de transport des briques, ils sont sensibilisés aux bonnes attitudes à adopter. « Nous insistons sur la communication non-violente, l’amour du prochain, l’entraide et la manière d’éviter toute manipulation politique. »

Cet administratif de proximité rappelle que la prolifération des messages de haine conduit à des conséquences néfastes. « Si la haine est inculquée aux enfants dès leur jeune âge, c’est dangereux pour le pays. La cohésion sociale et le développement en sont impactés. C’est pourquoi ils doivent en être protégés. »

Selon Elie Nahimana, acteur de paix, la communauté burundaise a été déchirée pendant des années par divers conflits. « Le camp de travail est une technique de reconstruction communautaire. Il permet de rassembler les jeunes de toutes sensibilités politiques et de tous groupes sociaux sans distinction. »

Il estime qu’il est aujourd’hui crucial d’organiser de tels camps pour tous les jeunes, qu’ils soient élèves, étudiants, ou non-scolarisés. « C’est une occasion de suivre une rééducation spirituelle, morale et psychosociale. Bref, c’est un moment d’unité, de convivialité, de fraternité. Il permet de transcender les différences. »

Ce pasteur explique que dès le premier jour, une ligne de conduite est dégagée pour éviter toute communication non-violente. Cela permet de vivre en harmonie et de rester ensemble en cohésion. « On leur rappelle que, dans leurs opinions et communications, ils ne doivent pas être influencés par leurs groupes d’appartenance, qu’ils soient ethniques, religieux, politiques, ou autres. »

Elie Nahimana cite enfin les bénéfices de ces activités lors de la crise de 1999. « À cette période, des jeunes de quartiers différents se regardaient en chiens de faïence sur des bases ethniques. Certaines ONG ont expérimenté cette technique pour rassembler les jeunes autour d’activités communes. » Il mentionne que la Giz, une agence de coopération internationale allemande pour le développement, a également organisé de telles activités pour renforcer la cohésion sociale et la réconciliation.

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