Après avoir soufflé ses 17 bougies, ce jeune espoir du Club Aigle Noir, inspire pas mal de gens. Humble, ce natif de Mugamba marque déjà les esprits depuis 2018. A son actif, ce coureur de fond a une médaille d’or remportée aux Jeux Olympique de la Jeunesse en Argentine.
Dimanche, 24 mars, il est 8h. Je suis au parking de Musaga pour emprunter la RN7, direction Vyuya dans le Mugamba à la découverte d’un champion. Avant ce voyage, Richard Manirakiza, le chauffeur d’une voiture du type Toyota Probox, me fixe et me demande ma destination : «Où est-ce que tu vas exactement chez nous à Mugamba?»
Ma réponse est courte et directe : «Je vais voir un jeune athlète du nom de Butoyi ! » La réponse du conducteur est spontanée : «Ah, le type est très connu dans la localité avec son grand frère.»
Le véhicule s’éloigne de la ville en slalomant pour éviter les nids de poules sur la route serpentant dans les collines surplombant la capitale économique Bujumbura, puis le climat change. Une demi-heure plus tard et nous voilà à Jenda avec ses montagnes verdoyantes à perte de vue.
À 9h 45, la voiture fait son premier arrêt. Nous sommes au chef-lieu de la commune Mugamba. Le chauffeur me dit que je dois prendre une moto pour arriver à Gataka, la colline de mon champion Butoyi.
Une quarantaine de minute à moto, on arrive chez M. Nahigombeye qui était dans l’enclos. Jean de Dieu est là.
Avec son père, ils m’accueillent chaleureusement. J’entre dans la maison. Elle est en tôle. On commence à discuter. J’apprends qu’il a commencé à courir dès l’âge de 7 ans. Une petite anecdote : courir derrière les vaches, c’était son entraînement. « J’ai entendu qu’il y aura une compétition ici à Mugamba. J’ai décidé d’y participer mais je ne savais pas si je peux réussir». Il décroche la 17e place. C’était une surprise pour lui. Il ne s’y attendait pas.
Sa carrière d’athlète commence alors. Les encouragements fusent de partout. Les habitants de Mugamba découvrent un nouveau talent. Son véritable baptême de feu se passe à Nyakararo au mois de septembre 2017. Il se classe premier dans une compétition de cross-country de 12 km dans la région de Mugamba.
L’an 2018 a été prolifique pour ce jeune prodige de Mugamba. Lors des Jeux africains d’Alger, le 25 juillet, il se classe 5e. En octobre 2018, ce jeune garçon de Mugamba fait des merveilles. Il surprend tout le monde en remportant sa première médaille d’or le 12 Octobre sur 1500 m en 3min 54’ 32’’ devant le français Tixien Corentin et le Brésilien Pinho Leite Lucas.
Son palmarès dans le cross-country a renforcé sa position de numéro 1 au classement des points et a fait retentir l’hymne national ’’Burundi Bwacu’’ pour la première fois dans l’arène des Jeux Olympiques de la Jeunesse.
Fils de Côme Nahigombeye et Gaudance Ndagijimana, Jean de Dieu Butoyi est né le 4 avril 2002 sur la colline Gataka, Zone Vyuya, Commune Mugamba en province de Bururi. Le chouchou de Mugamba, comme son jumeau Bukuru, fait sensation dans l’athlétisme Burundais malgré son jeune âge. 7e dans une fratrie de 9 enfants, ce jeune champion est actuellement élève en 8e année à l’Ecole fondamentale Kirinzi.
Un modèle pour la jeunesse de Mugamba ?
Malgré ses meilleures performances, Jean de Dieu Butoyi affirme qu’il rencontre beaucoup de défis. Manque de maillot de course, de chaussure de course inadéquate… Ce que son entraîneur, André Sindayigaya, confirme.
« Il travaille beaucoup. 6 heures d’entraînement par semaine. Sans oublier le trajet qu’il fait en allant à l’école. Ici, ce n’est pas facile de récupérer l’énergie dépensée. » Avant d’ajouter que le lait est sa seule nourriture pour la récupération.
Cet enseignant au Lycée communal Mugamba, en même temps entraîneur du Club Aigle Noir, affirme que l’avenir de son prodige est loin d’être terminé vu son développement. Son rêve est qu’un jour Jean de Dieu Butoyi remporte une médaille aux Jeux olympiques dans la catégorie des seniors.
Le club Aigle Noir a déjà fait émerger plusieurs athlètes. Le jeune Jean de Dieu et Elvanie Nimbona, une autre athlète de la commune Mugamba qui évolue en Italie, a poussé d’autres jeunes de la localité à aimer ce sport.
M. Sindayigaya compte plus de 80 jeunes regroupés dans quatre groupes (benjamins, minimes, cadets et seniors) dont 15 filles et garçons qui ont déjà défendu les couleurs nationales.
Irène Niragira, 15 ans et en 6e année primaire, a commencé à courir en 2017. Actuellement, elle se classe 1ère dans le Club Aigle Noir de Mugamba. Son rêve est de battre le record de son idole Francine Niyonsaba. « Ma famille est derrière moi, elle comprend ce que je fais et ça me fait plaisir».
Malgré les contraintes et les conditions de vie difficiles, il exhorte les autres jeunes à pratiquer ce sport. « Cette discipline m’a permis d’acheter une vache. C’est un honneur pour moi».
De son côté, l’entraîneur André Sindayigaya demande aux autorités de les aider à aménager le terrain se trouvant à proximité de la Paroisse Mugamba. «Les jeunes pourraient s’entraîner facilement».