Depuis que le Président de la République a fait allusion à une probable révision de la constitution, le sujet fait couler beaucoup d’encre, les uns craignant cette initiative, les autres la louant, selon leurs intérêts. Cependant, la démarche semble plus compliquée qu’il n’y paraît.
En cas de révision de la constitution, le pouvoir, qu’il soit de bonne ou de mauvaise foi, doit d’abord préciser les dispositions constitutionnelles qu’il souhaiterait exposer au débat, afin qu’elles soient révisées, en élargissant les points de vue, au risque de rester dans des spéculations.
<doc2725|right>Selon le constitutionaliste Pascal Rwankara, il existe deux procédures. Soit, il y a un projet déjà élaboré, auquel cas le gouvernement ferait œuvre utile en ayant proposé quelques pistes des dispositions qui posent problèmes. Soit, il peut prendre l’initiative du débat au parlement sur les dispositions constitutionnelles qui pourraient être soumises à révision.
En matière de procédure de révision, il est toujours universellement admis de procéder par le mécanisme de ciblage des dispositions à réviser. Certaines pourraient être modifiées sans fâcher les partis politiques, notamment les dispositions à caractère budgétaire, social et environnemental. « Sans être exhaustif, disons que les dispositions constitutionnelles qui pourraient toucher les équilibres ethniques, par exemple, les corps de défense et de sécurité, sont des dispositions constitutionnelles qui ne pourraient pas être revisitées sans avoir des répercussions particulières au niveau constitutionnel », indique le professeur Pascal Rwankara.
Que craint l’opposition ?
La plus crainte actuelle de l’opposition réside en grande partie dans le fait que, étant extraparlementaire, elle risque de se retrouver exclue du débat politique. Par conséquent, si la révision était effectuée, l’opposition actuelle ne pourrait pas avoir une possibilité de blocage. Mais cela non plus n’arrangerait pas le pouvoir qui risquerait de faire cavalier seul.
« Quoi qu’il advienne, si, par extraordinaire, la révision constitutionnelle, touchait des dispositions fondamentales, on reviendrait à la case départ si d’aventure, par exemple, le parti qui est majoritaire actuellement ne gagnait pas les élections. Ce qui serait aberrant dans la mesure où on ne revisite pas la constitution juste par simple jeu de calcul ponctuel ou épisodique », ajoute le constitutionnaliste.
Par où commencer ?
La question est de savoir s’il faut revoir les réserves de l’Accord d’Arusha, pour le compléter, ou alors revoir les dispositions constitutionnelles en vigueur. S i on doit commencer par revoir les réserves, il ne serait plus question de réviser la constitution. En effet, l’Accord d’Arusha a été adopté par plusieurs partis politiques, dont certains l’ont signé avec des réserves qui n’ont jamais été discutées. Raison pour laquelle certaines dispositions actuelles, se fondant sur l’absence ou le vide juridique concernant ces réserves, continuent justement à poser quelques problèmes. On n’ignore, par exemple, s’il y a des règles ou des lois organiques qui peuvent aller en profondeur pour vider l’opacité de certains aspects de la constitution, tels que le contrôle parlementaire qui ne peut s’exercer sur certaines institutions, l’absence de la Haute cour de justice, … Toutes ces questions peuvent être des matières à confrontation politique. « Avant de revoir ce qui est déjà en vigueur, il faut d’abord combler les vides », pense le professeur Rwankara.