Les pluies diluviennes qui se sont abattues, ce 29 mars, sur la région de Rumonge et de Bururi ont causé des ravages tant humains que matériels incommensurables, laissant la population dans un dénuement total.
Le lac Tanganyika miroitant de mille feux est la seule illusion sur la félicité qui pourrait régner en ces lieux. À part les corps et les maisons que ce même lac a engloutis et qu’il ne rendra peut-être jamais, un drame quotidien se joue à une dizaine de mètres de ses rives. Deux semaines après, les 600 sinistrés vivent dans des conditions intenables. Obligés de s’abriter dans des tentes de fortune, de demander refuge chez des amis ou de dormir à la belle étoile, les sinistrés, hagards, terrassés, n’arrivent toujours pas à croire au malheur qui leur est tombé dessus.
Ku Mwambuko, colline Kibingo. Debout devant le ravin où avait été jadis sa maison, Samson Ndimurwanko se désole de son triste sort. « J’ai tout perdu. Même les habits que je porte sont ceux que des amis m’ont prêtés. »
Sur les immenses pierres qui ont déboulé du flanc des montagnes surplombant la région, les hommes sont assis, désœuvrés, abattus, devisant toute la journée durant sur leur malheur. « Nous sommes paysans, et notre ressource est la terre, mais voilà, nos champs ont été emportés, alors on est là et on ne sait plus quoi faire. »
Obligés de quémander
Jimmy Nsengiyumva, petit écolier de 13 ans, se balade à midi près du lac dans des haillons. Il avoue avoir eu son dernier repas la veille au soir. Sur les raisons de sa présence à cet endroit, il donne une réponse accablante. « J’ai honte de regarder mes parents quémander de la nourriture, c’est pourquoi je suis venu me cacher ici. »
Ces rescapés survivent désormais grâce à la solidarité collective et aux dons des organisations de bienfaisance.
Jeanne est assise sous une tente, entourée de sa progéniture. Au milieu d’eux, un repas composé de pate de manioc et de poisson. « La pate vient de la farine que des bienfaiteurs nous ont offerte, et le poisson a été pêché par des amis qui vivent plus en amont et qui n’ont pas été touchés. » informe-t-elle.
Dès les premiers temps, plusieurs organisations de bienfaisance se sont mises à pied d’œuvre pour venir en aide aux nécessiteux. La Croix Rouge, World Vision et UNFPA ont déjà acheminé des vivres et des habits pour parer au plus urgent. Mais malgré ces efforts, tous les besoins ne sont pas comblés, car jusqu’à présent, les sinistrés sont obligés de se soulager dans la nature, dormir sans moustiquaire, tout cela pouvant occasionner des risques sanitaires qui peuvent virer aux fléaux.
Un avenir incertain
De devant, un bloc de 6 classes de l’école fondamentale de Rutunga donne l’impression d’être intact, mais passé derrière, tout un pan du mur a disparu, les bancs-pupitres avec. La boue jusqu’à mi-mollet, des élèves essaient de déblayer les cinquantaines de centimètres de dépôts qui se sont entassés dans les quelques salles de classe encore debout.
La directrice de cette école sinistrée, Joy Ndikumana, ne voit aucun moyen de s’en sortir sans aide extérieure : « On n’a nulle part où on pourra mettre les élèves pour le prochain trimestre. Tout le matériel a aussi disparu. »
Une question taraude toutes les personnes rencontrées : « Comment se reconstruire alors qu’on a tout perdu ?»
Désormais à chaque fois que le tonnerre gronde et que le ciel vire au gris, tout le monde lève les yeux vers l’horizon, la peur au ventre, se demandant ce que les versants escarpés de ces montagnes leur réservent encore.