Samedi 5 mai, Mgr Evariste Ngoyagoye a officiellement cédé ses responsabilités d’archevêque de Bujumbura à Mgr Gervais Banshimiyubusa, récemment nommé par le pape. Ce dernier appelle à une bonne collaboration des prêtres.
Cathédrale Regina Mundi. 9h. Dès l’entrée, tout augure une journée particulière. Une bannière à l’effigie de Mgr Gervais Banshimiyubusa, nouvel archevêque de Bujumbura est accrochée sur les grillages. Des véhicules qui entrent sont triés. Exception faite pour ceux des dignitaires, les particuliers stationnent à l’extérieur.
C’est la date de prise de possession canonique du nouvel archevêque. Dans le patio, les jardins de la cathédrale grouillent de monde. Des évêques en provenance des pays voisins se sont joints à leurs collègues burundais dans ces cérémonies.
Quatre Rwandais, notamment ceux de Butare, Byumba et Ruhengeri, ont fait le déplacement. L’évêque de Kigoma en République unie de Tanzanie est aussi là. Les diocèses d’Uvira et de Bukavu sont représentés par les vicaires généraux. En plus, tous les prêtres dépendant de l’archidiocèse de Bujumbura sont venus réaffirmer leur serment de fidélité envers le nouvel archevêque.
Trois ministres, Jeanne d’Arc Kagayo, ministre chargée de la Bonne gouvernance, Félix Mpozeriniga celui de la Fonction publique et Pascal Barandagiye, ministre de l’Intérieur et de la Formation patriotique, sont présents.
Les anciens chefs d’Etat, Sylvestre Ntibantunganya et Domitien Ndayizeye, l’ancien premier ministre Adrien Sibomana, le Premier vice-président de l’Assemblée nationale, Agathon Rwasa et son épouse, des ambassadeurs notamment celui de la France, Laurent Delahousse, etc., sont sur place.
L’ambiance est festive. En plus de la méditation, des chants, des discours, bref, la litanie de l’Eglise catholique agrémente cette messe d’installation du successeur de loin de Mgr Michel Ntuyahaga, Premier évêque de Bujumbura.
Quelques minutes après le rassemblement (1ère partie d’une messe catholique), le secrétaire du Nonce apostolique lit la lettre de nomination de Mgr Gervais Banshimiyubusa. Le souverain pontife l’a écrite en latin, langue officielle du Saint siège. Un prêtre burundais traduit.
«Que les autorités politiques s’en inspirent»
Mgr Evariste Ngoyagoye remet par la suite à son successeur la cathèdre, le fauteuil majestueux sur lequel un évêque s’assoit quand il célèbre une messe dans la cathédrale. Elle n’avait pas d’occupant dès le commencement des cérémonies. Cela pour montrer que l’archidiocèse de Bujumbura n’avait pas de pasteur. Il lui donne aussi une crosse, celle-ci symbolise la houlette du pasteur qui veille sur le troupeau.
Tous ceux qui prennent la parole, évêques et laïcs, sont reconnaissants envers Mgr Evariste Ngoyagoye et affables vis-à-vis du nouveau pasteur. Le premier, témoignent-ils, n’a ménagé ni ses forces ni ses connaissances pendant son épiscopat pour développer l’archidiocèse de Bujumbura. Celui-ci est désormais constituée de plus de 30 paroisses.
Ses pairs le remercient surtout pour le bel exemple. Il respecte l’article 401 du droit canon. Celui-ci prévoit le renoncement d’un évêque qui atteint 75 ans. «Notre aîné montre que l’Eglise catholique n’est pas une propriété de telle ou telle autre personne», lance Mgr Joachim Ntahondereye, évêque du diocèse de Muyinga et président de la Conférence des Evêques catholiques du Burundi (Cecab).
Il ne s’est pas dit : « Caramvunye sinokirekura » c’est-à-dire «J’ai conquis la cathèdre après tant de sacrifices, je ne peux pas la céder». Une allusion au slogan cher du parti au pouvoir. Toute la galerie éclate de rire. Et aussitôt d’indiquer que cette passation de témoin représente une leçon significative: l’alternance pacifique.
Au nouvel archevêque, Mgr Ntahondereye tient à souligner une particularité de l’archidiocèse de Bujumbura. «Celle-ci est très importante dans la mesure où c’est ici que sont prises les grandes décisions pour le pays».
Ce président de la Cecab félicite les chrétiens de l’archidiocèse de Bujumbura. Le pape leur octroie un bon et clairvoyant pasteur. Mgr Gervais Banshimiyubusa est à l’origine notamment de la restitution aux chrétiens des décisions prises dans les réunions de la Cecab.
En plus, il s’est investi beaucoup pour la signature de l’accord de convention entre le Vatican et l’Etat burundais. Il suit de près tout ce qui concerne l’Eglise et le pays : «Il ne mâche pas ses mots».
Un partenaire privilégié de l’Etat
Pascal Barandagiye, ministre de l’Intérieur, insiste quant à lui sur une bonne entente entre le gouvernement et l’Eglise catholique. Celle-ci a beaucoup de fidèles par rapport à d’autres Eglises autorisées au Burundi : «J’espère que je ne me trompe pas». Ainsi, c’est une «chance» quand l’Exécutif et l’Eglise catholique parlent d’une même voix. Au cas contraire, la population perdrait la tête.
De son côté, le nouvel archevêque exprime la joie, la reconnaissance, les souhaits de bonne collaboration avec les prêtres, etc. Il pense aussi aux Burundais en exil. «Je les embrasse comme leur pasteur. Parmi eux, il y en a beaucoup qui sont de cette archidiocèse». Il souhaite que les causes à l’origine de leur fuite trouvent de solutions afin qu’ils soient apaisés et rentrent.
Mgr Banshimiyubusa confie que sa responsabilité est lourde. Métaphoriquement, il la compare au chemin de la croix. «Néanmoins, je resterai toujours à l’écoute de Dieu, c’est lui qui m’a envoyé dans cette archidiocèse en ce moment-ci. Il sait seul pourquoi». Il interpelle le soutien de ses collaborateurs et des chrétiens : «Un roi est fait par ses hommes et un parent par ses enfants».
Il promet de prier pour les autorités afin que «Dieu en lequel elles croient » puisse les éclairer. Au terme de son allocution, cet archevêque ressortissant du diocèse de Ruyigi annonce sa première décision : «Je nomme Mgr Anatole Ruberinyange, vicaire général». Ce dernier est reconduit.
Les cérémonies prennent fin avec une longue procession. Les prêtres devant, les évêques derrière, ils dirigent tous les pas vers la cathédrale Regina Mundi. Le nouvel archevêque, souriant, salue les chrétiens massés de part et d’autres pour contempler les successeurs de Saint-Pierre au sein de leur Eglise.
Mgr Evariste Ngoyagoye part à la retraite après 38 ans d’épiscopat, 17 ans au diocèse de Bubanza et 21 ans à l’archidiocèse de Bujumbura. Quant à Mgr Gervais Banshimiyubusa, le pape le nomme archevêque de Bujumbura après 18 ans à la tête du diocèse de Ngozi.