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Me Evrard Giswaswa lâché

05/05/2013 Commentaires fermés sur Me Evrard Giswaswa lâché

L’ancien maire de la ville de Bujumbura a récemment fait l’objet de plusieurs dossiers de malversations économiques. Pourtant, il n’avait jamais été inquiété jusqu’ici. D’aucuns estiment que l’incendie du marché central de Bujumbura constitue un prétexte pour son arrestation.

<doc7445|left>Lundi, 11 mars 2013. Evrard Giswaswa, directeur général d’Air Burundi, est invité pour une réunion organisée par le ministère des Transports à l’intention de ses hauts cadres. Toutefois, il annonce dès tôt le matin son absence. La veille, alors qu’il rentre fraîchement d’une mission de travail à Dakar (Sénégal), il trouve à son domicile une convocation du procureur en mairie de Bujumbura.

Après plusieurs hésitations, confient des sources dignes de foi, il décide vers 11 heures, de se présenter au parquet. A sa grande surprise, l’homme qualifié d’intouchable du CNDD-FDD se retrouve devant la commission mise en place au lendemain de l’incendie du marché central de Bujumbura pour enquêter sur les origines de la catastrophe. Nos sources indiquent que Me Giswaswa sera dur avec elle. Il estime que la commission n’est pas compétente pour l’interroger. Il évoque ainsi son statut de député élu, il exige les mesures d’immunité parlementaire, sans succès.

Vers 16h45, après 4 heures d’interrogatoire musclé. Me Evrard Giswaswa apprend qu’il est arrêté. Sur son mandat, on peut lire trois chefs d’accusation : complicité de gestion frauduleuse, prise illégale d’intérêt et concussion dans l’enquête sur l’incendie du marché central de Bujumbura.

Selon des fuites dans la commission, Me Giswaswa a été arrêté à cause de 1000 places installées illégalement dans ce marché et dont la gestion était floue. Mais, pire encore, ces places étaient dans les passages prévus pour les sapeurs pompiers en cas d’incendie, ce qui aurait gêné leur progression le jour de l’incendie.
L’infraction est prévue par le code pénal burundais dans ses articles 437, 430 et 440. Il risque une peine de plus de 5 ans de prison ferme. Il rejoint à Mpimba Cyprien Horugavye, ancien directeur général de la SOGEMAC, société qui gérait le marché, également été arrêté dans le cadre des enquêtes sur l’incendie.

Un emprisonnement qualifié d’illégal

Pour Me Salvator Kiyuku, son avocat, cette arrestation est paradoxale car cette commission n’est pas compétente en la matière. Normalement, un tel cas ressort de la Cour anticorruption. Opinion partagée par Pierre Claver Mbonimpa, président de l’Aprodh. Quant à Pacifique Nininahazwe, président du Forum pour la Société Civile, il s’interroge sur le lien entre l’incendie du marché central et sa gestion frauduleuse.
Des versions que conteste Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome, qui confirme que la commission d’enquête mise en place concernant l’incendie du marcgé central de Bujumbura est bien compétente dans tout ce qui concerne le marché.

Toutefois, il estime également que c’est une mise en scène : « Nous avons à maintes reprises décrié l’implication de Me Evrard Giswaswa dans des affaires mafieuses mais en vain. » Il rappelle l’agrément de la société City Trade qui se verra octroyée l’exploitation de la villa du maire alors que les actionnaires sont un certain Prosper Hakizimana et Anne Gabriella Igiraneza, enfant de moins de dix ans de Me Giswaswa. Selon toujours le président de l’Olucome, la convention est signée entre City Trade (locataire) et la mairie (bailleur) représentée par Me Evrard Giswaswa. Dans le contrat, il est stipulé que la société accepte de payer un loyer de 2 millions de Fbu par mois, une avance sur loyer de 232.623.496 Fbu pour la réhabilitation. En outre, la mairie doit superviser les travaux. Cependant, c’est la société City Trade, locataire, qui s’en charge alors qu’elle n’en a pas les droits. Par conséquent, le délai de réhabilitation sera dépassé, le directeur technique de la mairie ne verra pas toutes les pièces justificatives des travaux supplémentaires, etc.

Gabriel Rufyiri revient aussi sur la société Burundi Car Services où Me Giswaswa, David Nikiza, Moise Nzeyimana et Alexandre Gahomera, tous du CNDD-FDD sont actionnaires. Chacun d’eux avait apporté 30 millions Fbu. La société offre des services d’entretien des véhicules, le commerce général, l’import et export, etc. L’Olucome trouve la position du maire incompatible avec cette activité. Gabriel Rufyiri se demande pourquoi la justice ne s’est pas saisie de ces cas à l’époque.

Plus un bouc émissaire qu’autre chose

Il est vrai que le nom de l’ancien maire a été cité, avec celui d’autres hautes personnalités, dans plusieurs dossiers de corruption ou de malversations financières, mais il n’avait pas encore été inquiété jusque-là, ses associés ayant le bras long.
Pourtant, il semble que son sort avait été scellé depuis longtemps. Après la mairie, il a demandé de réintégrer l’Assemblée Nationale comme député, mais en vain. Il ne fallait surtout pas qu’il retrouve son immunité. Mais, lâché comme il l’était, même cette immunité n’aurait pas servi à grand-chose, Hussein Radjabu en est l’exemple le plus parlant.

Le jour de son arrestation a coïncidé avec l’atelier du BNUB, où le 1er vice-président de la République a terminé son discours d’ouverture en rappelant la politique de tolérance zéro initiée par le Chef de l’Etat. Lequel, en visite de travail en France, rencontrait le même jour les grands patrons français auxquels il a sûrement vanté les résultats de sa lutte contre la corruption.

Il est clair donc que Me Evrard Giswaswa avait déjà été lâché, bien avant l’incendie du marché central. Même durant les travaux communautaires du Cndd-Fdd, il n’était plus aux côtés des grosses pointures du parti. Personne ne peut nier que Me Giswaswa n’était pas un enfant de chœur, qu’il trempait dans plusieurs dossiers de malversation dans lesquels il était associé à d’autres hautes personnalités du pays et du parti au pouvoir. Mais l’arrêter et l’incarcérer dans le dossier incendie du marché est un prétexte. Le pouvoir a eu besoin d’un bouc émissaire, et il a puisé dans ses réserves, assez garnies, des membres, de la dernière heure, du parti au pouvoir.

<quote>D’après le règlement intérieur de l’Assemblée Nationale du Burundi, en ses articles 8 et 10, un député nommé au Gouvernement ou à toute autre fonction publique, incompatible avec le mandat de député et qui l’accepte, cesse immédiatement de siéger à l’Assemblée Nationale et est remplacé. Il en est de même d’un député nommé à une fonction quelconque rémunérée de l’Etat du Burundi, d’un Etat étranger ou d’une organisation internationale. Dans ce cas, ce député ne jouit plus de l’immunité parlementaire.</quote>

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