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Massacre de Kivyuka : les rescapés veulent un monument. Le ministre de l’Intérieur s’y oppose

05/05/2013 Commentaires fermés sur Massacre de Kivyuka : les rescapés veulent un monument. Le ministre de l’Intérieur s’y oppose

Pour les rescapées du massacre du 3 mai 1996 à Kivyuka (province Bubanza) où plus de 430 civils périrent sous les balles de l’armée burundaise en guerre à cette époque contre la rébellion (FDD), il n’est pas question que les leurs ne soient pas enterrés dignement. Le ministre de l’Intérieur n’est pas pour le moment d’avis qu’il faille y ériger un monument exigé par la population.

<doc2693|left>Pour Edouard Nduwimana, ministre de l’Intérieur, « enterrer ces gens dans un cimetière connu est une façon de réconcilier la population ». Il souligne que les travaux de bitumage exécutés par la société SOGEA SATOM doivent continuer. Chaque fois qu’il y a des os déterrés, dit-il, ils seront enterrés dans des cimetières connus conformément à la loi.

Les rescapés ne s’opposent pas aux travaux de la société SOGEA SATOM mais demande à cette société plus de prudence pour ne pas déterrer les restes de ces personnes tuées et enterrées dans des fosses communes, car disent-ils, la CVR (Commission Vérité et Réconciliation) devra s’en servir pour plus de lumière sur ce massacre.

Entre-temps, ils demandent une indemnisation puisque, insistent-ils, ce massacre a été perpétré par les militaires. En colère, ils s’attaquent au gouvernement : « Comment le gouvernement peut-il nous expliquer son silence sur ce qui s’est passé ici durant 16 ans? Aucun membre du gouvernement, aucun membre de l’armée n’avait jamais songé venir nous consoler ou nous dire pour quelle raison les nôtres ont été massacrés ».

Jacques Kenese, le gouverneur de la province Bubanza en compagnie du ministre de l’Intérieur s’est gardé de tout commentaire.
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Les militaires pointés du doigt

<doc2694|right>Le centre de Kivyuka, situé à 15 km du chef lieu de la province Bubanza, est à 6 km des bureaux de la commune Musigati. Il se trouve tout près d’une rivière qui porte le même nom, ’’ Kivyuka’’. Ce centre est surplombé par quatre collines : Muhororo, Gashinge, Munanira et Kiziba. Le chantier de bitumage de la route Bubanza-Ndora serpente les flancs de ces collines et bat son plein.
A la moindre approche d’un journaliste, un cercle se forme et chacun veut s’exprimer pour donner le déroulement, non pas de ce déterrement mais du carnage de Kivyuka.

Selon Pierre Ntawumuha, un rescapé et qui a perdu sa femme dans ce carnage, le drame est arrivé le 3 mai 1996 : « Un hélicoptère a survolé le marché de Kivyuka aux environs de 11 heures et a fait des tours dans le sillage de la Kibira et il est reparti. Entretemps, les rebelles (FDD) avaient détruits un pylône électrique. Quelques minutes après, une trentaine de militaires bien armés et l’administrateur communal de l’époque, Ruriryanino Gratien, sont venus, en compagnie d’autres gens. Prise de panique, la population s’est volatilisée dans la nature et le marché s’est vidé. »

Les militaires et l’administrateur, poursuit M. Ntawumuha, se sont alors mis à les rappeler, à travers un haut-parleur, tout en les rassurant que la sécurité était garantie : « Ayant suivi l’appel de l’administrateur, les gens ont quitté leurs cachettes pour se rassemblés de nouveau sur la place du marché », se rappelle-t-il en indiquant que l’administrateur a alors commencé à accuser la population de collaborer avec les rebelles : « A ce moment, les militaires avaient déjà installé un gros fusil à un endroit surélevé et vers 12 heures un parmi eux est venu murmurer à l’oreille de l’administrateur en lui indiquant l’heure sur sa montre », raconte M. Ntawumuha d’une voix tremblotante, mais poursuit quand même son poignant récit : « Après un discours injurieux, l’administrateur s’est retiré, quelques militaires lui ont suivi et ils se sont faufilés entre les maisons. A cet instant, les bombes, les balles, les grenades,…se sont abattu sur cette population. »

Après ce forfait su, continue-t-il, les rescapés sont sortis de leurs cachettes : « Nous avons essayé d’enterrer les cadavres dans une fosse commune. J’en ai personnellement compté 300. Cinq jours après, ces militaires sont revenus et ont créé une insécurité dans les collines dans le but d’inciter les gens à fuir : « ils en ont profité pour déterrer nos morts pour les éparpiller dans d’autres fosses des environs. Ils les déplaçaient à l’aide de leurs camions. »
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