Deux mois après sa réouverture, certains commerçants dénoncent une concurrence déloyale causée par les commerçants opérant à l’extérieur sur les rues qui se trouvent autour du marché. D’autres fustigent le deux poids deux mesures dans l’attribution des stands. Le commissaire du marché promet d’y remédier.
Le marché de Kinama, en commune urbaine de Ntahangwa, au nord de Bujumbura mairie, fait partie des sept marchés urbains qui ont été réhabilités. Il a rouvert ses portes en août dernier et dispose de plus de 2.050 stands. La construction des stands n’est pas encore achevée. D’autres n’ont pas connus un début de construction. La plupart des stands déjà construits sont cadenassés. D’autres sont fonctionnels.
Les alentours de ce marché grouillent de monde. Des commerçants qui s’agglutinent avec des marchandises entassées pêle-mêle. Ils sont toujours installés tout autour des avenues et rues. Certains occupent de petits kiosques en bois.
D’autres étalent leurs marchandises par terre devant les maisons des particuliers, bloquant de temps en temps le passage. Même à l’intérieur du marché, les marchandises ne sont pas séparées. Vendeurs de souliers, habits et produits vivriers sont mélangés.
Les commerçants qui opèrent à l’intérieur de ce marché se lamentent du manque de clients. Ils viennent à compte-gouttes. Ils expliquent qu’avec la réhabilitation de ce marché, de nombreuses boutiques ont été installées aux alentours, « détournant » ainsi leurs clients.
C‘est pour cette raison que certains commerçants ont préféré ne pas mettre en danger leurs capitaux et sont restés à l’extérieur du marché. Ceux qui opèrent à l’intérieur du marché fustigent le manque de clients. Leurs activités sont au ralenti.
Une des bénéficiaires des stands rencontrée dans ce marché ne mâche pas ses mots : « Les alentours du marché sont garnis de shops avec des articles variés, mais qui sont semblables à ceux de l’intérieur du marché. Les clients restent à l’extérieur. Je ne parviens pas à écouler mes marchandises. Je risque de fermer.»
Même son de cloche pour Immaculée, tenancière d’un commerce de produits cosmétiques. « Voyez, la plupart des stands sont cadenassés. Leurs propriétaires opèrent, pour la plupart, à l’extérieur du marché. J’écoule à peine mes marc
handises. Autant rester à la maison pour m’occuper d’autre chose ».
Situation similaire pour Mme Ndihokubwayo. Cette vendeuse de fruits indique que ses bénéfices vont decrescendo. Elle déplore le manque à gagner qu’elle enregistre. « Nous sommes concurrencés par ceux qui opèrent le long des avenues. Nous enregistrons des méventes, chaque jour. Or, nos produits sont périssables ».
Des propos corroborés par Germain, commerçant de matériaux de construction. « L’affluence des clients n’est pas la même ». Il fait savoir qu’il travaille à perte. « J’encaisse un bénéfice de 20000 BIF par jour alors que mes collègues opérant à l’extérieur en enregistrent le triple ». Et de proposer une solution : « Il faut que ceux qui vendent les mêmes marchandises soient regroupés dans un même quartier. Cela évitera le désordre et la concurrence déloyale.» Il réclame également la fermeture de toutes les activités s’exerçant dans les rues qui se trouvent autour du marché. « Il faut que ces commerçants rejoignent les autres à l’intérieur du marché ».
Une attribution de stands mal opérée
« La commission chargée de l’attribution des stands dans les marchés réhabilités en a attribué à certains plutôt qu’aux vrais acquéreurs », déplore N.B. Certains anciens occupants n’ont pas bénéficié de stands. « Il y en a qui ont même reçu plus de trois emplacements », martèle-t-il. Il demande aux gestionnaires de ce marché de corriger ces imperfections.
D’autres fustigent le coût élevé des shops. Jean Ndimubandi est un vendeur de friperie. Il n’a pas déménagé. Et comme les autres, il exerce son commerce le long du lycée municipal de Kinama. « Je n’ai pas rejoint les autres, faute de moyens. M
on chiffre d’affaires ne me permet pas de louer un stand qui revient à 100 milles BIF. Le coût des stands les moins chers varie entre 50 mille et 60 mille BIF. Et moyennant une avance de six mois ». Et de dénoncer le fait que des stands sont cadenassés alors qu’il y a des demandeurs. « C’est de la spéculation. Leurs acquéreurs veulent les revendre à plus cher ». Il interpelle les gestionnaires du marché de retirer les stands à ceux qui ne les exploitent pas.
Un autre se lamente comme quoi il a demandé une place, en vain. « Faute de moyens, je n’ai pas pu avoir un stand. Il fallait avoir au moins 690000BIF et un pot de vin ».
Le commissaire du marché rassure
Désiré Ndikumana, commissaire du marché de Kinama, reconnaît le désordre qui s’observe dans ce marché. Pour lui, cela est dû au non-achèvement de la construction des stands. « Nous allons contraindre les nouveaux acquéreurs de stands à parachever les constructions ». Il promet de rétablir l’ordre dans ce marché. « Nous allons séparer les commerçants selon leurs marchandises, les regrouper quartier par quartier ».
Par ailleurs, ce gestionnaire du marché fait savoir que ceux qui opèrent aux alentours vont rejoindre les autres à l’intérieur.
Interrogé sur la spéculation de certains acquéreurs de stands, ce commissaire se veut catégorique : « Nous allons récupérer leurs stands et les distribuer aux autres.»
A propos de faux acquéreurs de stands, M. Ndikumana reconnaît que les lamentations des commerçants sont fondées. Ce commissaire indique que les imperfections sont en train d’être analysées par une commission ad hoc au cas par cas. Et de rassurer : « Ceux qui ont formulé des recours auront gain de cause.»
Pour rappel, sur financement de l’Union européenne, six marchés de la municipalité de Bujumbura ont été réhabilités et sont fonctionnels. Seul le marché de Kanyosha n’a pas encore rouvert ses portes.