Il est difficile de ne pas faire de rapprochement entre les images de la tuerie de la mine de platine de Marikana non loin de Johannesburg et ceux de Sharpeville ou de Soweto.
{Massacres de la mine de MARIKANA le 16 Août 2012}
Il y a de cela 52 ans, une foule de Noirs du township de Sharpeville s’avance vers une station de police pour protester contre les lois ségrégationnistes de l’Apartheid. La police ouvre le feu et 69 personnes sont tuées.
{Massacres de Sharpeville le 21 Mars 1960}
Plus près de nous, le matin du 16 juin 1976, 20.000 lycéens se regroupent dans Soweto pour refuser l’enseignement de l’Afrikaans au détriment de l’Anglais et des langues Africaines locales. Les forces de l’ordre abattent sans hésiter 700 enfants.
Photo restée célèbre de Mbuyisa Makhubo portant Hector Pieterson agonisant aux côtés de sa sœur affolée, Antoinette Sithole.
Ces deux événements tragiques sont considérés comme étant des signes avant-coureurs indéniables de la décrépitude du système ignoble de l’Apartheid. Sa chute définitive attendra encore près de vingt ans, mais elle arriva.
Les enquêtes sur la tuerie d’une quarantaine de mineurs ces dernier jours apporteront sans doute son lot d’explications, voire de justifications cyniques des faits. Une chose est néanmoins certaine, cette protestation pose un jalon ineffaçable dans l’histoire de la libération des peuples opprimés. Il y a un certains temps, je polémiquais avec mon ami Fabien Cishahayo sur un site internet au sujet de l’Afrique du Sud d’aujourd’hui. Il était très critique sur le chemin du développement qu’empruntait le pays ; à ses yeux une petite élite Noire s’est acoquiné à la bourgeoisie Blanche et a ainsi créé une nouvelle classe « Arc-en-ciel »ii dirigeante qui amasse des richesses colossales sans contribuer à la promotion des classes laborieuses constituées presqu’entièrement par les Noirs. Quant à moi, j’étais plus optimiste, et … j’avais tort.
Une révolution, telle que celle opérée en Afrique du Sud par l’ANC et ses alliés, est tout à fait remarquable. Mais, même si la lutte pour la libération d’un peuple est une lutte héroïque louable, même si la victoire électorale se pérennise pour le bonheur du parti bénéficiaire ; l’enracinement dans une culture démocratique exige encore plus des dirigeants. Les arrangements au sommet comme, par exemple, l’ancien parti raciste (Le Parti National) qui s’est dissout dans l’ANC, ressemblent aux « gouvernements d’union nationale» ailleurs sur le continent. Il s’agit en fait d’un partage de pouvoir entre les élites, sans considération aucune des préoccupations de leurs bases, des différences d’options idéologiques et surtout sans une quelconque plate-forme minimale commune et publiée pour que toute la nation sache ce sur quoi les politiciens opposés farouchement hier se sont si bien accordés aujourd’hui… comme larrons en foire.
Quelles que seront les supputations autour de cet événement, le massacre de Marakina constitue aussi un signe avant-coureur de bouleversements sociopolitiques majeurs en Afrique noire. A moins que nos élites sachent lire les signes du temps, anticiper les vents du changement pour s’adapter aux exigences persistantes des peuples affamés de pain et de paix: « Il n’est pas trop tard, mais il est temps! »