Les noms de Mwalimu et de Madiba, anciens médiateurs dans la crise burundaise ont occupé les débats au cours de la 4ème Conférence du Réseau de Recherches sur la Burundi tenue à Nairobi du 2 au 4 juillet2019.
Plusieurs chercheurs et professeurs venus de différentes universités dont celles du Burundi ont revisité l’expérience de ces illustres disparus.
Leur aura plane toujours sur le Burundi en prise aujourd’hui avec une crise depuis le coup d’Etat manqué du 13 mai 2015.
Leur expérience en matière de médiation ont amené ces chercheurs à se poser des questions : «Et si Nyerere et Mandela leur volaient au Secours ! » Tel est le titre d’une analyse menée par le politologue Gérard Birantamije.
Il se focalise sur la crise politique de 2015 et la médiation aujourd’hui en panne. Pour le gouvernement burundais, il ne faut même plus en parler, c’est fini, le cap est mis aujourd’hui sur les élections de 2020.
Pour ce politologue, la médiation dans la crise burundaise est en crise mais la porte reste ouverte même si le gouvernement burundais résiste. « Si la sous-région se ressaisit, il y a possibilité de reprise de ce processus ».
Selon Gérard Birantamije, l’appui de la sous-région fait défaut et Mkapa l’a bien dit, il n’a pas eu son soutien. La carrure des deux illustres médiateurs dans la crise burundaise manque : «Museveni n’est pas Mandela et Mkapa n’est pas Nyerere ».
Museveni a passé la patate chaude à Mkapa et … vice versa
D’après Richard Moncreiff, représentant régional d’International Crisis Group, aujourd’hui, il faut se mettre à l’évidence que l’EAC est mal placée pour mener une sorte de médiation dans la crise burundaise. «C’est surtout par le fait que le Burundi fait partie intégrante de ce groupement régional et quand tout au début Museveni a été désigné pour être médiateur, il a passé la patate chaude à Mkapa».
Il y a une autre donne régionale à ne pas perdre de vue : «Il y a des rivalités changeantes entre les pays membres de la région et cela n’est pas de nature à faciliter les choses pour le Burundi. Comme corollaire, le Burundi est devenu une question secondaire».
Pour ce chercheur d’ICG, il y a peu de chance que la sous-région réussisse aujourd’hui ce qu’elle n’a pas pu faire dans ses trois ans de médiation de la crise burundaise. «Il faut une pression pour infléchir certaines positions des différents acteurs. Les élections de 2020 ne changeront pas grand-chose».
Pour Me Germain Baricako, membre de l’antenne burundaise de l’International Leadership Foundation et de l’Association pour la Prévention de la Torture (APT), l’UA devrait déclarer l’échec de la médiation menée par l’EAC et prendre à bras le corps le dossier burundais.
Le représentant régional d’ICG invité à la 4ème Conférence du Réseau de Recherches sur la Burundi tenue à Nairobi est catégorique : «La Communauté internationale a laissé s’installer l’autoritarisme de Kigali et de Kampala et cela a sûrement joué sur l’échec de médiation de la crise burundaise».
La figure de Mandela, ancien médiateur, sera également au centre d’une recherche menée par Christine Deslaurier. Pour cette historienne, Madiba entend impulser une nouvelle dynamique à la médiation. Il ira jusqu’à présenter en public comme acquis des demi-accords obtenus en privé avec différents protagonistes sachant très bien que personne n’osera le contredire au vu de son aura.
Pour cette historienne, quand Mandela entame sa médiation, il veut avancer et n’hésite pas à le faire savoir avec des phrases incisives. «Il dira un jour que tant que les Tutsi resteront au pouvoir, le conflit sera sans fin. Mais il n’épargne pas non plus la classe politique hutu et traite de barbarie les massacres perpétrés par la rébellion».