Le 18 juillet, le monde célèbre la naissance de Nelson Mandela. Au Burundi, cette personnalité a joué un rôle crucial dans la résolution de la crise de 1993.
Nelson Mandela chérissait l’idéal d’une société libre et démocratique dans laquelle tout le monde vivrait ensemble dans l’harmonie et avec des chances égales. Il a succédé à Julius Nyerere, le 1er décembre 1999, comme médiateur dans les pourparlers inter- burundais officiellement ouverts en juin 1998.
Tout en maintenant la structure mise en place par Nyerere, il a poussé le G7 (Partis Hutus) et le G10 (Partis Tutsi) à conclure un accord. Au début, il avait abordé la question burundaise avec une grille de lecture, tirée de son expérience personnelle : celle d’une majorité opprimée par une minorité. Cette allusion faite à l’apartheid avait suscité la méfiance des Tutsis. Mais avecle temps, Mandela a compris que la situation burundaise était plus complexe, que ce n’était pas « une minorité qui opprimait une majorité ». Il n’hésitait pas à se montrer ferme vis-à-vis des deux camps.
Madiba n’accordait pas de répit aux protagonistes de la crise. Il alternait des réunions confidentielles sans témoins ni notes et les interpellations en public. Certaines étant perçues comme humiliantes par les Burundais. « Maintenant, je comprends pourquoi les Tutsis vous ont opprimés pendant quatre siècles, c’est parce que vous n’êtes pas des leaders » s’est-il un jour adressé à Jean Minani et à Léonard Nyangoma. Ils ne sont pas les seuls à avoir subi les foudres verbales du vieux.
L’ancien Président de la République Pierre Buyoya a été accusé de vouloir se comporter comme Pinochet l’ancien dictateur chilien. Quant aux rebelles, Mandela leur disait qu’ils sont faibles pour faire tomber l’armée loyaliste de l’époque et qu’ils déversent leurs colères sur des civils innocents. Cette fermeté a permis de faire bouger les rigides positions des négociateurs burundais.
Un homme sensible aux conditions humaines
A la surprise générale, lors de sa visite au Burundi, le 11 juin 2000, il s’est tout de suite dirigé à la prison centrale de Mpimba. Il a fait fi du protocole pour s’enquérir des conditions carcérales. Les yeux larmoyants, il a dénoncé ce lieu de détention comme impropre à la vie humaine. Pour l’ancien président Sylvestre Ntibantuganya, ce geste démontre l’importance qu’il accordait à la dignité humaine et aux droits de l’homme.
S’exprimant devant le commandement de l’armée, il leur a signifié que les réclamations des rebelles sur l’armée d’alors avaient une part de crédibilité.
D’autant plus que l’armée était taxée de mono ethnique. «Si vous acceptez l’intégration, vous occuperez une meilleure position morale qu’eux. En retardant votre engagement, vous leur donnez par contre matière à continuer les combats », a-t-il déclaré.
Mandela a imposé une date butoir pour la signature de l’accord. Bien qu’elle fût considérée comme irréaliste par nombreux observateurs, celle-ci n’a jamais été modifiée. « Personne n’osait remettre en question une décision de Mandela », écrit l’ancien président Buyoya dans son livre.
L’accord a été finalement signé, avec des réserves, le 28 août 2000 au terme de 26 mois de débats publics entre 17 partis politiques, le gouvernement et l’Assemblée nationale. Seul bémol : l’absence des groupes rebelles à la signature.
Sa notoriété a permis d’arracher un accord qui a permis de trouver la stabilité du pays. 2015, plus d’une année après sa disparition, le Burundi est retombé dans une nouvelle crise. La médiation actuelle peine à imprimer ses marques. Elle patine.
Mais, c’est peut-être l’ancien président Buyoya qui résume mieux le rôle de cet homme dans le processus de paix d’Arusha : « C’était un Médiateur difficile, très dur, mais par contre, honnête. Il a apporté un plus aux négociations, notamment cet aspect d’intégrité : s’il était dur, il l’était avec tout le monde. S’il faisait pression, il la faisait sur tout le monde, avec le seul objectif de faire avancer la cause de la paix. » Intégrité. Tout est dit.